Enfants exploités, combien sont-ils ?

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Ils seraient 340 000 enfants à être déjà obligés de travailler, en Algérie, selon Mlle Ayadi Zineb, présidente de la section de Béjaïa du bureau national de l’Enfance.

Cette dernière a organisé avant-hier, à l’occasion de la journée internationale des droits de l’enfant, une conférence débat sur le thème du travail des enfants, au niveau de la salle de spectacle de la maison de la culture de Béjaïa. « Notre objectif, à travers cette rencontre, est de sensibiliser la société et les familles sur les droits des enfants. Nous avons lancé un appel aux pères et mères de familles pour qu’ils viennent assister à la conférence pour connaître les droits de leurs enfants et veiller à les protéger. Nous avons choisi d’aborder le problème du travail des enfants, car le phénomène a pris des proportions alarmantes dans notre société. Il y a quelques jours, j’ai vu un enfant qui vendait de l’eau dans des sachets en plastique en plein centre-ville d’Alger, j’en fus toute retournée. Pire encore : au sud algérien, des enfants capturent des scorpions, au péril de leur vie, pour les vendre aux laboratoires afin de subvenir aux besoins de leurs familles.  En tout, on compte quelques 340 000 enfants qui travaillent en Algérie », nous a indiqué Mlle Ayadi. Les trois conférenciers invités par l’association organisatrice de l’évènement se sont également penchés sur les raisons qui poussent les enfants à quitter l’école pour travailler. Pour Azibi Mebrouk, psychologue et cadre à l’Agence de Développement Social (ADS) de Béjaïa, ce sont la pauvreté et les conditions de vie difficiles qui poussent des enfants à quitter l’école en bas âge. « En Algérie, il y a environ 500 000 élèves de moins de 16 ans qui quittent l’école, chaque année. Du coup, on se pose des questions sur le sort de tous ces enfants déscolarisés. Certainement, plusieurs d’entre eux sont exploités ou poussés à exercer de petites activités commerciales pour subvenir aux besoins de leurs familles. On les voit, malheureusement, dans les souks et les rues. Je pense que la déscolarisation des enfants est due, entre autres raisons, à la pauvreté car il y a des parents sans ressources financières qui ne peuvent pas assurer la scolarité de leur progéniture. Nous  avons traité ce genre de cas à l’ADS. En effet, au début de l’année, nous avons trouvé à Amizour, deux enfants âgés de 7 ans et  de 13 ans, issus d’une même famille, qui étaient obligés de quitter l’école pour travailler, parce que leur père est un handicapé. La  prime de 4000 DA que perçoit ce père de famille n’a pas  pu couvrir la scolarité de ses enfants », indiquera M. Azibi.

En Algérie, il y a environ 500 000 élèves de moins de 16 ans qui quittent l’école, chaque année. Du coup, on se pose des questions sur le sort de tous ces enfants déscolarisés. ertainement, plusieurs d’entre eux sont exploités ou poussés à exercer de petites activités commerciales pour ubvenir aux besoins de leurs familles.

Ce dernier tire la sonnette d’alarme et appelle les autorités à se pencher sérieusement sur cette question épineuse. « Vous savez,  on compte plus de 300 000 enfants exploités en Algérie. Il est tant de parler de ce fléau qui gangrène la société algérienne et devient de plus en plus inquiétant », dira encore cet intervenant. Pour rappel, cette journée, dédiée chaque année à l’enfant, coïncide avec le 20 novembre, la date anniversaire de la signature, en 1989, par 191 pays dont l’Algérie, de la convention internationale des droits de l’enfant. La question du travail des enfants a été évoquée sous plusieurs aspects, notamment, social, économique et politique.

Violence et abus sexuels, les autres maux que subissent les enfants

Il a été également question d’un autre mal qui frappe les enfants dans notre pays, celui des abus sexuels et de la violence. Dans la wilaya de Béjaïa, nombreux sont les enfants victimes de ce genre de maltraitances, et aucune assistance, ou presque, ne leur est portée. Selon Mme Haddad, psychologue clinicienne, « en matière d’assistance sociale, l’intervention dans les foyers est quasi-nulle, à cause de l’absence d’un statut pour les assistants sociaux, qui leur permettrait d’élargir leur action auprès des enfants ». Elle ajoutera : « les assistants sociaux sont réduits à des paramédicaux, qui interviennent après que le mal a été fait », a-t-elle expliqué. Outre la sensibilisation, la solution demeure entre les mains des pouvoirs publics qui doivent « se tourner encore plus vers la question de la protection de l’enfant par la mise en place d’une politique globale, qui profitera aux foyers et par ricochet à l’enfant ». D’autre part, le travail des enfants est lié directement à la situation économique des ménages. Beaucoup d’enfants, souvent en très bas âge, sont contraints de monnayer leur force de travail à de très bas prix et à se fourvoyer dans l’informel pour subvenir à leurs propres besoins et ceux de leurs familles. C’est, selon les conférenciers, un problème « liée à la dégradation générale du niveau de vie, qui oblige les enfants à se charger de tâches économiques, au lieu de se consacrer à leur scolarité », a-t-on constaté. Et c’est généralement cette rupture avec le monde scolaire qui les mène à d’autres fléaux et abus de toutes sortes. Pour y faire face, il faudrait « un travail de sensibilisation permanent, aussi bien auprès des enfants que des parents, à travers des sorties dans les écoles et l’organisation de conférences dans les différentes institutions publiques » ont préconisé les conférenciers. Cela doit passer, selon ces derniers, par « une collaboration entre les différents organismes œuvrant pour promouvoir les droits de l’enfant, telles que les associations, le bureau national de l’enfance et les institutions de l’état ». Pour apporter une touche de divertissement à cette journée des droits de l’enfant, le jeune public, présent en grand nombre dans la salle de spectacles de la maison de la culture, a été convié à regarder une pièce théâtrale de la troupe Noudjoum El khachaba. Le programme, concocté par l’association du bureau de l’enfance, en collaboration avec l’association ‘’Cœur généreux et main tendue’’, et l’association ‘’Concorde’’, prévoit plusieurs galas pour la journée de demain. Ils seront animés par des troupes venues de cinq wilayas.

B. Slimani et M.H.Khodja

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