L’héroïne en avant-première à Béjaïa

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« L’héroïne », le dernier film de Chérif Aggoune, sorti en mai dernier à Alger, a été projeté samedi après-midi à Béjaïa. Le public lui a réservé un accueil chaleureux, faisant l’éloge autant de sa qualité esthétique que de son contenu narratif. L’œuvre, qui retrace le contexte historique de la décennie noire et les violences terroristes qui l’ont caractérisée, a tenté d’en restituer le drame, voire les drames, en focalisant sur le parcours d’une femme courage qui au lieu de baisser les bras et succomber à la fatalité a décidé de reprendre en main son destin et aller de l’avant. Ni la mort de son mari, tué en rase campagne lors d’une embuscade terroriste, ni la perte de ses deux beaux-frères, assassinés pour leur résistance, ni le rapt de ses deux belles sœurs conduites à la montagne, elle-même ayant échappé à une tentative identique, n’ont pu avoir raison de son instinct de survie, ni de son « appétit » de le faire briller. Fuyant la géhenne de la Mitidija, théâtre de violences, de rackets et de meurtres, « Houriya », rôle campé et talentueusement servi par Samia Meziane, s’installe à Alger, et s’y refait « un moral » d’acier, malgré les difficultés et les pesanteurs sociales et familiales. Trouvant une passion pour la photographie dont elle en fait son métier, elle va progressivement, le succès aidant, se sortir d’affaire et se consacrer à l’éducation de ses deux enfants ainsi qu’a celui du nourrisson-orphelin que sa belle-sœur lui a confié avant son kidnapping. Le goût à la vie revient, les ambitions aussi, sans pour autant étouffer les souvenirs du cauchemar vécu. Leurs atrocités hantent encore ses nuits. Pourra-t-elle pardonner ? Elle ne le sait pas. En revanche, elle a une certitude : la vie vaut la peine d’être vécue, semble-t-elle suggérer au sortir du cimetière où elle venait s’incliner à la mémoire de son mari. Une histoire poignante qui fixe un parcours, loin d’être atypique au regard des dizaines de femmes qui en ont été victimes, mais qui a le mérite d’en rappeler la douleur, tout autant que la force mentale et psychologique dont il a fallu faire preuve pour ne pas rester au creux de la grand histoire. Aggoune n’a pas eu à utiliser de grands mots, ni de grands dialogues, pour l’exprimer. « Je me suis contenté de le dire, sans être simpliste avec des phrases simples », a-t-il commenté à la fin de la projection, qualifiant cette œuvre de fiction, d’ »hommage aux courages des femmes, depuis la guerre de libération à aujourd’hui ». En déroulant l’histoire de Houriya, dans un contexte de résistance au terrorisme, il en profite pour louer ses vertus et croquer les pesanteurs qui brident son épanouissement.

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