Le chef-d’oeuvre d’un visionnaire

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à l’occasion du 10ème anniversaire de la disparition de l’un des monstres sacrés de la littérature algérienne, Mohammed Dib, la direction de la culture de la wilaya de Tizi-Ouzou, en collaboration avec la faculté des Lettres et des langues de l’université Mouloud Mammeri, a organisé hier, une journée d’étude autour de la vie et de l’œuvre du romancier, à la maison de culture de Tizi-Ouzou.  La première communication, intitulée « Mohammed Dib : de la trilogie algérienne à la trilogie nordique », fut présentée par Mme Aïni Bettouche, du département de français de l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou.  Selon la conférencière, ‘’La trilogie nordique’’ ou ‘’Le cycle de l’exil’’ de Dib serait en fait « un quatuor », une œuvre à quatre volets ! « La trilogie est un ensemble de trois œuvres formant une suite autour d’un thème précis, qui désigne initialement trois œuvres dramatiques grecques. Et la trilogie Dibienne n’a de commun avec cette dernière que l’aspect dramatique qu’elle campe dans un univers réaliste », soutiendra Mme Bettouche. L’auteur débute son cycle des trilogies avec ses trois romans de la trilogie ‘’Algérie’’ qui sont : ‘’La grande maison’’ publié en 1952, ‘’L’incendie’’ en 1954 et ‘’Le métier à tisser’’ en 1957. Dans cette œuvre monumentale,  Dib fait l’analyse d’une lente prise de conscience politique du peuple algérien. « Le premier volet de la trilogie ‘’Algérie’’ nous raconte une période terrible de l’histoire, où la faim ne laisse point de place au sentiments. Cette trilogie représente l’engagement politique de Mohammed Dib », observera l’oratrice. « Quant à sa fameuse ‘’Trilogie nordique’’, ce sont ses séjours en Finlande qui la lui inspireront », poursuivra Mme Betouche. En effet, le romancier s’est pris de passion pour un autre genre d’écriture après s’être rendu à plusieurs reprises en Finlande où il collabora, avec un certain Guillevic, à la traduction d’oeuvres d’écrivains finlandais.  Avec  ‘’Les terrasses d’Orsol’’ publié en 1985, ‘’Le sommeil d’Eve’’ en 1989 et ‘’Neige de marbre’’ en 1990, l’auteur explore les territoires de l’exil, l’amour, la rupture et l’aliénation. ‘’L’infante Maure’’ s’impose alors de fait comme un quatrième volet de cette trilogie.  « La trilogie finit donc en un ‘’quatuor’’ qui ferme la boucle narrative entamée dans « Les terrasse d’Orsol », conclura la conférencière.  La deuxième intervention, intitulée « Le personnage de l’enfant dans l’incendie de Dib », fut présentée en langue arabe par Mr. Djallal Maouche et Mr Kamel Mala.  Avec ‘’L’incendie’’, nous retrouvons le personnage de « Omar », un orphelin qui vit avec sa famille dans une petite chambre de « Dar Sbitar ». Omar comme tant d’enfants s’est trouvé dans l’obligation d’arrêter sa scolarité pour subvenir aux besoins de sa famille et manger à sa faim. Les conférenciers mettront le stress sur la détresse de Aïni, la mère de Omar, qui devant les réclamations quotidiennes de ses enfants maudit sont défunt mari, qui l’a laissée dans la misère, et s’acharne sur sa progéniture. Omar comme ses sœurs et sa grand-mère subissent au quotidien les foudres de Aïni, écrasée par les poids du désespoir et de la faim. Une vie de misère, une enfance volée, où les sentiments et l’affection maternelle n’avaient pas droit de citée. Mohammed Dib est né un 21 juillet 1920 à Tlemcen au sein d’une famille bourgeoise ruinée. Il entame sa scolarité dans sa ville natale et la termine à Oujda au Maroc. De 1938 à 1940, il exerce comme enseignant à Zoudj Bghel, près de la frontière marocaine. Il sera ensuite interprète auprès des armées alliées, à Alger, de 1943 à 1944. De 1950 à 1952, Mohammed Dib travaille au journal « Alger républicain ». Il écrit également dans « Liberté », journal du parti communiste algérien. Mohammed Dib séjourna en France, alors que paraît, aux éditions du Seuil, ‘’La grande maison’’, premier volet de sa trilogie ‘’Algérie’’ inspirée par sa ville natale. Il y décrit la misère dans les villes et les campagnes, des grèves des ouvriers agricoles et des revendications nationalistes naissantes. Les deux autres volets de la trilogie, ‘’L’incendie’’ et ‘’Le métier à tisser’’ sont parus en 1954, l’année même du déclanchement de la guerre de libération national. Il sera expulsé d’Algérie par la police coloniale, en raison de ses activités militantes et pour avoir abordé explicitement la guerre d’indépendance dans ‘’Un été africain’’. Parallèlement à son travail de romancier, ses recueils de poèmes, ‘’Omneros’’, en 1975 et ‘’Feu beau feu’’ en 1979, célèbrent l’amour et l’érotisme. Dans ses dernières œuvres ‘’Simorgh’’ et ‘’Laezza’’, il revient sur ses souvenirs de jeunesse. Il décèdera, à Paris, le 2 mai 2003, à l’âge de 82 ans.

K. T.

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