Wilaya à vocation agricole, Bouira voit ce créneau se heurter à différents problèmes liés notamment aux aléas climatiques, la faiblesse des rendements et le manque de périmètres irrigués (ce qui ne permet pas la diversification des cultures).Quant au secteur industriel, il se confine jusqu’à présent dans des unités publiques datant des années 1980 et une zone industrielle qui n’arrive pas encore à attirer les investissements à la hauteur des espoirs qui ont présidé à sa création.La situation de l’emploi dans la wilaya de Bouira reste toujours préoccupante malgré une légère tendance à la reprise, tendance rendue toutefois aléatoire par la fragilité des nouveaux emplois crées et la lenteur du rythme de leur progression. D’après les statistiques officielles, le taux de chômage jusqu’à la fin de l’année 2004 s’éléve au niveau du territoire de la wilaya à 26 % de la population active. Cette dernière est estimée, selon les même sources à 181,261 personnes, tandis que la population totale de la wilaya est évaluée, en fin 2004, à 708,519 habitants, comptant 50,58 % de sexe masculin et 49,42 % de sexe féminin.La caractère global des chiffres du chômage ne rend évidement pas compte des situations réelles prévalant dans les 45 commune que compte la wilaya de Bouira. En les désagrégeant et en les ventilant par localité, apparaissent les disparités géographiques du phénomène du chômage.Ainsi les estimations de 2002 donnaient la commune de Dechmia, à 46 km au sud-ouest de Bouira, à la tête du “peloton” avec un taux assommant de 59,71 % de la population active en chômage. Suivaient, parès les autres communes du sud de la wilaya : Hadjra Zerga, Ridane et Mesdour, avec, respectivement, les taux de 57,95%, 53,11% et 50%. La seconde remarque qu’il y a lieu de faire dans ce maquis de chiffres, c’est que les centre urbains sont moins frappés par le chômage que l’arrière-pays rural.L’exemple de la commune de Lakhdaria est édifiant à ce sujet puisqu’elle enregistrait un taux de 15,29% de chômage. Enfin, dans les commune kabylophones de l’est de la wilaya, les chiffres oscillent entre 15,51% pour El Adjiba, 37,32 pour Saharidj, 46,07 % pour Aghbalou et 47,59 pour la commune d’Ahnif.La relativisation des chiffres globaux données pour l’ensemble de la wilaya est aussi valable pour les chiffes donnés par commune en raison des disparités très prononcées entres les hameaux, les bourgades et les chefs-lieux de communes. Même si les données brutes les concernant ne sont pas disponibles, certaines des localités ayant fait l’objet d’enquêtes précises de la part des services de l’Agriculture et des forêt, menées dans le cadre des projets de proximité et du PER (projet d’emploi rural), présentent des taux de chômages ahurissants atteignant les 60 à 70 % de la population active.Les populations auprès de qui ces enquêtes ont été réalisées résident généralement dans les régions de montagne ou sur les zones steppiques.Comme sur l’ensemble du territoire national, l’origine directe du chômage dans la wilaya de Bouira est double : d’abord, la perte d’emploi pour les anciens salariés des entreprises publiques en difficulté, ensuite l’arrivée sur le marché du travail de nouveaux contingents de demandeurs d’emploi.Ces derniers sont formés de jeunes diplômés ou de personnels non-qualifiés.Certains des anciens employés d’entreprises financièrement étouffées ou qui ont carrément mis la clef sous le paillasson ont pu rebondir et constituer de petites entreprises (EURL ou SARL).C’est le cas de l’ex-EMIFOR, une entreprise de wilaya de travaux forestiers dissoute en 1996 et de l’ex-ENAL (entreprise nationale du livre) dont les employés ont constitué une SARL sur la base du patrimoine de l’entreprise-mère.La catégorie la plus touchée par le problème du chômage demeure la frange la moins qualifiée de la société.On peut vite s’en rendre compte en consultant les chiffres des demandes d’emploi au niveau des agences d’Emploi de la wilaya pour l’année 2004 : sur un total de 10933 demandeurs, seuls 791 ont les niveau 5 et 6, c’est-à-dire des techniciens supérieurs ou des ingénieurs, tandis que les niveaux, 1 et 2 (personnel sans qualification particulière) comptent 4907 demandes pendant l’année 2004.Cette configuration du chômage pose des problèmes autrement plus difficiles puisqu’elle intègre la nécessité du volet formation, et cela quand l’âge et la volonté du chômeur le permettent.S’il y a une donnée extra-économique qui a influé d’une manière déterminante sur l’emploi et les revenus pendant ces dix dernières années, c’est bien celle de la situation sécuritaire ayant régné dans les compagnes de Bouira.En effet l’installation des maquis et des zones de repli dans les massifs montagneux et les incursions terroristes opérées sur des dizaines de kilomètres à la ronde ont complètement déstabilisé ces régions sur les plans humain, social et économique.Que ce soit sur les monts de Zbarbar, des Bibans ou du Djurdjura, le terrorisme a été à l’origine des déplacements de populations, une sorte d’exode rural massif inattendu qui avait obligé des centaines de familles à vendre au rabais les objets domestiques et les troupeaux d’ovins, de bovins et de caprins pour pouvoir se permettre une location de logement en vile.De statut d’anciens propriétaires exploitants, ces familles sont ravalées au statut de salariés sans système d’assurance, et cela quant elles trouvent du travail. Dans le cas contraire, elles subissent une chute abyssale dans les bas-fonds de la misère, de la prostitution et de la mendicité.Le phénomène est, en tous cas, visible à l’œil nu dans certains quartiers ou taudis de Bouira-ville ou de certaines autres agglomérations urbaines.
Emploi : un enjeu socialLa résorption du chômage ou au moins, sa réduction ont mobilisé les effort des pouvoirs publics; car, au-delà d’un certain seuil, c’est la stabilité sociale de toute la région, voire du pays tout entier, qui est menacée.Au cours des premières années du nouveau siècle, des actions de protestation sont enregistrées sur l’ensemble du territoire de la wilaya visant à attirer l’attention des autorités locales sur le problème de l’emploi.les grands axes routièrs – RN 5, RN 8, RN 18 – ont connu des épopées retentissantes par les barrages qui y ont été dressés par les populations.Généralement, ce n’est qu’à ce moment-là que les responsables de la wilaya se déplacent sur les lieux pour discuter avec les protestataires et négocier la levée des barrages.Il en a résulté, à chaque fois, des plates-formes de revendications soumises, avec des échéanciers et des programmes précis, à ces mêmes responsables.On a eu à connaître la plate-forme des Ath Mansour et celle de Dirah.Ces révoltes étaient parfois reconduites dans les mêmes formes et les mêmes proportions que lors de leur premièr éclatement dès que les promesses tardent à se concrétiser ou dés que les miettes consenties auront pris une autre direction.Pourtant, les dispositifs mis en place par les gouvernements pour résorber au moins une partie de cette masse de chômeurs ne manquent pas. Des programmes sectoriels et des projets, spécifiques ont été conçus dans le but précis de créer le maximum d’emplois.Parmi ces projets, certains sont destinées à renforcer les capacités de production et à augmenter les revenus des agriculteurs par le moyen du FNRDA, des projets de proximité et du PSRE (programme de relance économique).Par ricochet, ces programmes sont censés créer de l’emploi direct et indirect. Un autre programme, TUP-HUMO (travaux d’utilité publique à haute intensité de main-d’œuvre) a été aussi mis en œuvre depuis la fin des années 90 dans le même but.Il s’agit d’affecter des ouvriers sur des chantiers d’utilité publique pris en charge par des entreprise privées et financées par la direction de l’emploi.L’avantage ici réside dans le fait que le nombre d’ouvriers et la durée de payement des ouvriers sont fixés par l’administration.L’entreprise est également assujettie à la déclaration de ses ouvriers à la caisse d’assurance.Mais, ce genre de projets n’assure pas d’emploi permanent.Il s’agit d’occuper les jeunes quelques mois en attendant qu’ils trouvent un poste plus stable ailleurs.
PalliatifsCes efforts des pouvoirs publics se sont traduits par la création de certains emplois permanents ou temporaires.Pour les résultats obtenus jusqu’à fin 2004, la situation se présente comme suit : – Esil (emploi salarié d’initiative locale) : 2880 postes pour un montant de 46. 224.000 DA.- IAIG Indemnité pour activités d’intérêt général) : 41 00 postes.- Tup-HUmo (travaux d’utilité publique à haute intensité de main-d’oeuvre) : 1269 emplois crées en 2004 sur 67 projets avec un montant de 91.338.943 DA.- ANSEJ : 166 dossiers de création de micro-entreprises ont été financés en 2004 sur un total de 1682 dossiers déposés au cours de la même année.Le nouveau dispositif de la CNAC (Caisse nationale d’assurance chômage) relatif à l’aide à la création d’activités pour les chômeurs âgés de 35 à 50 ans a pu financer 5 projets sur les 62 déposés. L’antenne de Bouira de la Caisse nationale d’assurance chômage, dépendant de la direction régionale de Tizi Ouzou, a pour mission de prendre en charge les travailleurs licenciés pour des raisons économiques sur le territoire de la wilaya de Bouira. La CNAC est créée par le décret exécutif n°94- 188 du 6 juillet 1994 portant statuts de la Caisse. Mais l’antenne de Bouira n’a commencé à fonctionner qu’à partir de février 1998. La prise en charge se traduit par des indemnités dégressives, le versement des allocations familiales et l’assurance maladie. Ces prestations sont accordées au chômeur dans les limites de 12 mois au minimum et 36 mois au maximum. Entre-temps, la CNAC fait des efforts pour réinsérer le bénéficiaire dans le monde du travail, et cela en l’informant des nouvelles possibilités qui s’offrent à lui, en lui assurant, le cas échéant, une formation pour le reconvertir dans un autre métier plus porteur sur le marché du travail. Une autre mission de la CNAC consiste à aider les entreprises en difficulté en prenant en charge une partie du personnel considéré comme étant pléthorique.Actuellement, l’antenne CNAC assure les prestations aux chômeurs avec une indemnité équivalant au dernier salaire que percevait le concerné avant son licenciement. Cette indemnité dégressive (100% du salaire les quatre premiers mois et 50% les quatre derniers mois) ne doit pas descendre au-dessous de 7500 DA, en plus des allocations familiales et de l’assurance maladie. Après la cessation de leurs droits, les chômeurs bénéficient encore de la prestation en allocations familiales. Au moins une fois par année, nous assure-t-on, les inscrits à la Caisse sont convoqués au siège de l’antenne à Bouira pour leur proposer une éventuelle réinsertion ou formation adaptée. On apprend que les inscrits dépassant l’âge de 50 ans sont reversés à la caisse de retraite qui les prendra en charge.Quant aux contrats préemploi (ciblant les jeunes universitaires et techniciens supérieurs) gérés par la direction de l’emploi de la wilaya, ils sont évalués au nombre de 1134 dont 661 féminins. La résorption du chômage est une opération de longue haleine, et les dispositifs actuellement mis en place s’apparentent à des palliatifs sociaux qui ne pourront jamais remplacer une politique économique basée sur l’entreprise et la création de richesses.
Amar Naït Messaoud