Par Amar Naït Messaoud
Ce que les populations et les partis politiques déploraient au cours de ces dernières années sous le nom générique de “climat sécuritaire délétère“ en Kabylie, du fait de la persistance du phénomène terroriste dans certaines niches de la région, est en train d’être remplacé ou prolongé c’est selon, par un banditisme à tous crins, qui s’attaque aux postes, aux banques, aux transporteurs de fonds, aux entrepreneurs, et même aux éleveurs de bétail. Après l’enlèvement de Mebrek Amirouche, fin janvier dernier à Ath Zmenzer, suivi de son lâche assassinat, voilà que l’agence postale de Souk El Had, dans la commune de Timizart, vient d’être attaquée par un groupe armé emportant avec lui un pactole. Cela s’est déroulé hier, samedi, deuxième jour de week-end, en début de matinée, lorsque les premiers clients se sont agglutinés pour retirer leurs maigres avoirs. Quelques jours auparavant, c’est le cheptel bovin du village d’Abizar qui a été ciblé de nuit, par les voleurs. Si, depuis plusieurs mois, la donne sur le front de l’activité terroriste a sensiblement changé conférant l’avantage aux services de sécurité qui ont abattu et arrêté un grand nombre de criminels, la sécurité des biens et des personnes en Kabylie, au sens le plus “classique” d’attaque à main armée, de vol caractérisé d’assassinat crapuleux,…etc, est en train de prendre une ampleur exceptionnelle. La jonction entre les deux formes d’insécurité terrorisme et banditisme, a, pendant plusieurs années, fait régner la peur dans les villes et villages de Kabylie. Les investisseurs, les capitaines d’industrie, les maisons de certains retraités émigrés, et d’autres cibles jugées “sources“ de revenu facile, font face à une terrible épreuve qui risque, à la longue, de saigner à blanc la Kabylie de ce qu’elle a comme énergie créatrice. Tout le monde a pu remarquer que les capitaux sont en train de fuir la Kabylie pour des cieux jugés plus “cléments”. Ceux qui, enfants de Tizi-Ouzou, ont choisi la banlieue d’Alger, Blida, Baba Ali ou Boufarik, pour investir leur argent, suite à la détérioration du climat sécuritaire chez eux, savent qu’il y a une espèce d’ironie de l’histoire car, les derniers lieux cités étaient, jusqu’au début des années 2000, des foyers infréquentables de terrorisme islamiste qui faisait payer des rançons aux industriels et autres entrepreneurs, comme cela se pratique aussi sur les axes de Dellys-Cap Djinet-Baghlia. La mobilisation citoyenne et l’investissement des services de sécurité ont véritablement pesé dans la balance en faveur du retour à la sécurité dans de larges secteurs de ces régions. Paradoxalement, c’est à ce moment-là que la Kabylie plonge dans une autre espèce de peur que fait régner le banditisme, nourri par le chômage, la déscolarisation, les multiples déviations sociales et le recul effarant de l’autorité de l’État. Outre le traitement économique et social de la crise qui touche la jeunesse dans son ensemble, les pouvoirs publics sont aujourd’hui interpellés pour protéger les biens et les personnes, comme le dicte le texte de la Constitution, et faire régner les lois de la République en toutes circonstances.
A. N. M.