El Mokrani vu par des universitaires

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Mokrani et l’insurrection qu’il a mené en 1871 reste «l’un des événements historiques majeurs» qui ont marqué profondément la résistance algérienne contre le colonialisme français, a affirmé en substance, hier, Tassadit Yacine, écrivain, chercheur en culture berbère et membre du laboratoire d’anthropologie sociale au Collège de France, à l’ouverture du 1er colloque international sur la «révolte de 1871». C’est un portrait de chef de guère hors du commun, d’un homme politique avisé et charismatique, capable de drainer des foules nombreuses, qu’a dressé l’oratrice sur le personnage de Mokrani, au 1er jour de ce colloque. «C’est la première fois qu’un soulèvement aussi important a eu lieu dans la région de Béjaïa. La personnalité charismatique de Mokrani et sa posture d’homme politique et de chef de guerre lui ont permis de mobiliser toutes les tribus de la région, pour combattre les armées françaises», a-t-elle indiqué. La résistance de Mokrani, qui s’est révolté contre le colonialisme français, non seulement pour défendre ses terres, mais aussi, selon l’intervenante, pour « sauvegarder tout un ordre politique, administratif et des structures sociales régissant la vie en Kabylie à cette époque». Ce soulèvement, enchaîne Tassadit Yacine, a été lourd en conséquences pour la Kabylie. «Les retombées de l’insurrection de 1871 sur la Kabylie étaient désastreuses. 30 000 insurgés tués, destructions des villes, répression féroce du colonialisme sur les habitants et incendie des récoltes», a-t-elle souligné. A cela s’ajoute le payement d’impôts, les plus élevé au monde à cette époque. «Les Kabyles ont payé quelques 500 milliards de francs, qui ont permis à la France de s’acquitter de sa dette vis-à-vis de l’Allemagne (Prusse)», a-t-elle annoncé sous l’étonnement des présents, qui ignorent cette vérité historique. Abordant dans le même sens, Mouloud Kourdache, doctorant, a expliqué dans sa communication intitulée «At Muqran : histoire d’une dynastie et d’un pouvoir politique », que la famille de Mokrani est issue de la dynastie des Ath Abbas, établie en 16ème siècle, et que ce facteur l’a prédisposé à devenir leader. D’ailleurs, selon le conférencier, Mokrani «était perçu par les français comme étant une personne charismatique». Par ailleurs, le conférencier Georges Morin, instituteur français né à Constantine, a axé son intervention sur la nécessité de «surmonter la tragédie coloniale et construire un avenir solidaire par l’information et la culture». «Il faut absolument décortiquer cette sombre période du colonialisme avec objectivité et mettre tout sur la table. L’enseignement de l’histoire doit servir à la réconciliation des mémoires, malgré les blessures», a-t-il préconisé.

Boualem Slimani

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