« L’Algérie n’a pas besoin d’une période de transition »

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Des éclaircissements et des mises au point ont été faits, hier, par Ahmed Ouyahia, chef de cabinet à la présidence de la République, lors de la conférence de presse qu’il a tenue, pour donner le bilan des consultations qu’il a menées, au cours de ces dernières semaines, sur la révision constitutionnelle. 

C’est une sorte de revue à mi-parcours, puisque 64 rencontres ont déjà eu lieu avec 75 partenaires invités (partis politiques, personnalités, associations,…). Au cours des prochaines semaines, le chef de cabinet à la présidence de la République recevra les autres partenaires ayant répondu favorablement à son invitation. Pour montrer la volonté du pouvoir politique d’associer les acteurs à la mouture de la nouvelle Constitution, Ouyahia dira : « nous ne dialoguons pas avec nous-mêmes ». Et le dialogue demeure ouvert pour les parties qui ont refusé de s’y associer. Cependant, tout en sollicitant l’avis de tout le monde, Ahmed Ouyahia a déclaré que personne n’était indispensable, notamment lorsque des journalistes lui firent état de certains « poids lourds » politiques qui n’ont pas daigné répondre à l’invitation. 

À mi-parcours du dialogue qui est appelé à se poursuivre les prochains jours, Ouyahia assure que, sans vouloir anticiper les résultats du dialogue, « le consensus est possible ». Néanmoins, le chef de cabinet a tenu, malgré l’appel renouvelé aux autres acteurs de la vie politique à s’associer au dialogue, à se démarquer de la solution de transition telle qu’elle est défendue par une partie de l’opposition. « Si nous allions à la transition, nous serions des récidivistes ». En effet, l’Algérie a trop souffert de ce qui était appelé la transition. L’on peut dire qu’elle était sous régime de transition au moins depuis janvier 1992, lorsque l’arrêt du processus électoral a été décidé jusqu’à 1999, lorsque Liamine Zeroual, chef de l’État, avait organisé des élections présidentielles. Sur ce point, Ouyahia estimera que les participants à la conférence de l’opposition de Zeralda du 10 juin dernier ont fait dans la « surenchère ». « L’Algérie d’aujourd’hui est un Etat aux Institutions démocratiques et n’a nullement besoin de période de transition », a-t-il martelé. Pour M. Ahmed Ouyahia la période de transition pronnée par ceux ayant préféré boycotter les consultations qu’il mène « se veut l’une des plus dangereuse forme d’opposition à l’appel de la Présidence de la République à la participation au dialogue sur la révision constitutionnelle ». Tout en affirmant que les autorités politiques du pays ne sont pas gênées par le travail de l’opposition, expliquant que « Le pouvoir est là pour être « gêné » par l’opposition, c’est le rôle même de l’opposition », Ouyahia, avertit,  s’agissant des éventuelles aventures politiques auxquelles on appellerait les Algériens, que « le peuple algérien ne veut pas servir de carburant à de telles aventures ». Le conférencier a souligné par ailleurs, concernant l’appel de certaines parties à une immixtion de l’Armée nationale populaire (ANP) dans la période de transition, que « l’ANP, digne héritière de l’Armée de libération nationale (ALN), assume une responsabilité constitutionnelle clairement définie et ne saurait être au service de manœuvres politiques ». L’orateur a affirmé en outre que « les portes de la Présidence sont ouvertes aux parties ayant boycotté ces consultation et nous les attendons à tout moment pour qu’elles présentent leurs vues et leurs plates-formes et expriment leurs positions, même si elles sont opposées à celle du pouvoir ». M. Ouyahia s’est, par ailleurs, félicité de la participation du parti du Front des forces socialistes (FFS) à ces consultations soulignant que sa rencontre avec le premier Secrétaire Ahmed Betatache et d’autres dirigeants du parti « était très riche et a montré que le dialogue avec l’opposition était possible. Elle a également reflété une attitude politique civilisée ». Par ailleurs, et bien qu’il refuse d’anticiper les résultats des consultations, sachant que presque la moitié des parties invitées n’ont pas encore été reçues et que le travail de synthèse suivra après la fin des consultation, le chef de cabinet à la présidence de la République pense que, en matière de régime politique qui siéra le mieux à l’Algérie, une tendance générale se dessine pour le régime semi-présidentiel. L’histoire et l’expérience politique de notre pays militent en faveur de cette option. Il s’agira, bien entendu, dans le cadre de ce choix, de consacrer solennellement le principe de la séparation des pouvoirs. 

« Il n’y aura pas de retour du FIS »

La question qui est revenue tel un leitmotiv au cours de la conférence de presse étant celle relative au courant islamiste, et particulièrement à l’éventualité du retour sur la scène politique du FIS dissous. « Il n’y aura pas de retour du FIS », martèlera Ahmed Ouyahia, confortant les déclarations de Abdelmalek Sellal et de Amara Benyounès faites il y a quelques semaines déjà. Interrogé sur l’invitation, en tant que personnalités, d’anciens dirigeants du FIS dissous aux consultations sur la révision de la Constitution, il a souligné que la démarche du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, consiste à « rassembler tout le monde dans le cadre des lois et de la Constitution de la République ». « Ceux qui disent que le pouvoir essaye de récupérer ou de manipuler l’ancien parti dissous pour faire face à l’opposition, je suis au regret de leur dire que le pouvoir a assez de défis et de complications à gérer pour ne pas s’inventer des démarches infantiles », a-t-il dit, ajoutant que  le gouvernement « ne fait pas de la manipulation, mais veut rassembler les Algériens ».

S’agissant de la sempiternelle rumeur portant sur l’éventualité de l’amnistie générale à l’égard de tous les activistes qui ont versé dans des actes de terrorisme, Ouyahia a été catégorique, en rappelant les clauses de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Il dira : « l’amnistie générale est une fumisterie politique ». En ajoutant que les gens qui la demandent, et qui ont refusé de s’associer au dialogue sur la révision constitutionnelle, sont des « prisonniers d’une logique d’appareil ».  S’agissant, enfin, de la procédure par laquelle sera adoptée la nouvelle Constitution, l’ancien Premier ministre informera que « si les amendements à apporter à la Constitution sont profonds, le passage par le parlement et par la voie référendaire est logiquement envisageable ». 

         

 Amar Naït Messaoud

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