Poésie sur Alger dans les étals

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Le Corbusier, l’un des maîtres de l’architecture moderne, a signé il y a quelques mois un ouvrage de haute voltige, intitulé « Poésie sur Alger ». L’opus publié aux Editions Barzakh, est compulsé en 79 pages, toutes de poésie vêtues. Au propre comme au figuré. L’insertion de supports iconographiques, dessins et images, apporte une plus value certaine au texte. De quoi se pâmer d’admiration, à fortiori quand on coltine souvenirs et nostalgie de la capitale, et qu’on aspire à son rayonnement. L’architecte Suisse, qui chérissait tendrement Alger, a échafaudé une kyrielle de projets, dont le fil conducteur est la métamorphose complète de la ville. Une ville sublimée, fantasmée, rêvée, hissée au diapason des grandes métropoles. Le Corbusier nourrissait l’ambition de voir la partie haute de la Casbah conservée en tant que patrimoine d’art unique au monde. Tous les palais, lieux de mémoire par excellence, sauvegardés. La partie haute de la ville serait destinée à devenir un centre d’attraction touristique. Un centre d’affaires sous forme de gratte-ciel serait planté dans le quartier de la Marine, ensuite poussé vers le Bastion 15. A la Scala, sur les hauteurs du Fort de l’Empereur, l’architecte voulait voir de vastes et hauts immeubles d’habitation, où les fenêtres donnent sur la mer. Un autre projet fort intéressant consistait à planter une oasis de palmiers sur le port d’Alger. Une oasis verte ondoyant aux brises de la méditerranée. Le Corbusier voyait déjà sa palmeraie étendant un tapis de houle douce au pied de la ville, jouxtant la houle bleue des flots. Hélas, dans une Algérie colonisée sous la conjonction du sabre et du goupion, faire part aux autorités de tels projets, revenait à prêcher dans le désert. Le Corbusier a dû se résoudre à quitter Alger, la mort dans l’âme. Ses multiples propositions sont restées autant de vœux pieux. A la lecture de son ouvrage, on hume comme des effluves d’amertume à travers les pages. A l’évidence, l’architecte a commis cet opus pour exorciser une tristesse qui lui colle aux basques et régler du même coup, une dette d’amour envers une ville qui se confond avec une tranche de sa vie.

Nacer Maouche

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