Pour Mouloud Hamrouche, ancien chef du gouvernement, dit des réformateurs, de septembre 1989 à juin 1991, la prise de l’Algérie par la France coloniale en 1830 a été facilitée et rendue possible par la démission de l’empire Ottoman qui gouvernait à l’époque par le système du califat islamique.
«Le pouvoir islamique du califat Ottoman a abandonné les algériens et les a livrés aux français», a affirmé d’emblée l’orateur, lors d’une conférence-débat animée, jeudi soir, au niveau de la salle des conférences de l’hôtel Royal, à l’invitation de l’Association des journalistes de Béjaïa (AJB). Cette mise au point n’est pas fortuite. Elle intervient au moment où des courants islamistes s’agitent et veulent faire croire aux algériens qu’ils représentent la solution pour «sortir le pays de la crise». Certainement, Hamrouche fait allusion aux appels de réhabilitation de l’ex FIS, auxquels le gouvernement a émis, d’ailleurs, à niet total. Par ailleurs, c’est un tableau noir de la situation politique, économique et sociale du pays qu’a dressé l’ancien chef du gouvernement. Devant une assistance nombreuse, Hamrouche a affirmé que la démocratie n’est pas ce qui caractérise notre pays. «Malheureusement, l’Etat démocratique de droit n’est pas là. Il y a des députés, mais pas un parlement. Il y a des ministres, mais sans gouvernement», a-t-il annoncé. Pour l’orateur, le pays est géré par « des réseaux d’intérêts et des clans qui se livrent à la corruption et aux abus de pouvoir». Quelle solution préconise Hamrouche pour « sauver l’Algérie d’une éventuelle dérive» ? «Il faut revenir à un consensus national», répond le conférencier. Pour appuyer ses propos, Hamrouche est allé puiser son argumentation dans l’histoire. L’Algérie, affirme-t-il, «vivait des siècles dans un enfermement national». Cet isolement a été aboli, selon l’orateur, «lors de la création de l’OS (organisation secrète), chargée de préparer et de mener la guerre de libération nationale contre le colonialisme français. Comment ? «L’OS avait pris des hommes des Aurès pour les envoyer en Kabylie. De même, elle a envoyé des hommes de la Kabylie pour aller combattre dans les Aurès. Aussi, elle a pris des hommes de l’Ouest pour les affecter vers la région de l’est et vice-versa. Je pense que c’est l’image d’un consensus national qui n’existait pas auparavant», a-t-il expliqué. Dans ce sillage, Hamrouche s’est dit contre le recours à la rue et à la violence pour imposer le changement. «La solution n’est pas de sortir dans la rue. Il faut qu’on discute entre nous ! Faisons de la concertation ! Dialoguons avant qu’il ne soit trop tard!», a-t-il insisté. Pour l’ancien candidat à la présidentielle de 1999, si le changement du pouvoir s’est fait attendre, «c’est à cause de la fragilité de la société et son incapacité à s’organiser», répond-il à une question posée sur les raisons du maintien du pouvoir en place.
Boualem Slimani

