Zbarboura : une agglomération marginalisée

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Zbarboura est l’une des grandes agglomérations de la commune de Lakhdaria. Elle se situe à l’est du chef-lieu de la municipalité à quelques trois kilomètres. Elle compte principalement le vignoble d’où le nom Zbarboura (fruit prémices de la vigne) donné à la localité. Elle se nomme aussi Madinet El Hayet, qu’un colon français lui a attribuée. Aujourd’hui, après l’implantation des deux unités de production des peintures et des détergents, elle est connue sous le nom de “SNIC”. Elle compte deux bourgs : Zbarboura, un village socialiste agricole inauguré par le Président Boumediène et l’ancienne contrée, Madinet El Hayet où un colon a édifié sa bâtisse. Lors de notre passage dans la localité, notre attention et notre curiosité furent attirées par l’état des ruelles. Nous décidons alors de visiter le village dans tous les sens. A première vue, les ruelles sont impraticables en hiver et poussiéreuses en été. Aucune ruelle n’est revêtue, hormis la route principale qui mène à Zbarboura. Les maisons sont de nouvelles constructions, les anciennes habitations sont aménagées ou démolies pour être bâties en villas RDC ou R+1. La typographie des quartiers et des ruelles offre au visiteur l’aspect d’un lotissement nouvellement créé ; néanmoins “Les premières maisons datent de 1958”, nous dit un citoyen. Les ruelles n’ont jamais été revêtues, aménagées. A cette question, un citoyen nous répondit : “Les responsables considèrent nos habitations illicites. Nous avons demandé qu’on nous délivre des actes de propriété, notre doléances reste sans réponse, même la prise en charge des problèmes de la localité est vaine. Alors, comment voulez-vous qu’on opère la réhabilitation des ruelles?” En définitive, Madinet El Hayet a l’aspect d’un village de campagne.

Rareté de l’eauL’eau, cette denrée vitale, est la préoccupation primordiale des citoyens. En été, les robinets sont secs, la population est contrainte à s’alimenter par la location de citernes à 600 DA. En hiver, elle se fait rare aussi. A ce propos, un citoyen nous signale : “Un seul puits, un seul château d’eau, d’un volume qui ne répond guère à nos besoins en eau”.

Les jeunes et l’emploiMalgré l’existence de deux unités de production, les jeunes de la localité ne bénéficient pas de l’emploi. Seuls quelques jeunes, environ 15, ont été recrutés ces deux dernières années. Certains pratiquent le commerce à la sauvette, d’autres cherchent une tâche pour un salaire journalier et les autres n’ont que le café-maure pour se réunir autour d’une table et jouer aux dominos ou se rendre à Lakhdaria. Pour les citoyens, la plupart des ouvriers sont recrutés hors de la localité. A ce propos, nous avons demandé si les jeunes se sont manifestés auprès des responsables des deux usines, nous avons eu des réponses affirmatives et négatives…

Les problèmes des enfants scolarisésOn enregistre un nombre très important d’élèves qui fréquentent les CEM et les lycées de Lakhdaria. Les moyens de locomotion existent, mais toujours est-il qu’on signale de l’insuffisance. Pour arriver à l’heure, les élèves sont obligés de se rendre à l’arrêt, tôt le matin. A cela s’ajoute une autre difficulté : l’accès des fourgons desservant la ligne Zbarboura-Lakhdaria, est interdit. Les élèves sont déposés à l’entrée est de la ville. Pour se rendre à leurs établissements respectifs, soit ils parcourent la distance qui les séparent à pieds, soit ils déboursent encore 10DA. “Les frais de transport s’élèvent à 40 DA au lieu de 20 par jour”, nous dit un lycéen qui ajoute : “Pourquoi l’accès de nos fourgons est-il interdit, alors que les autres sont libres ? Pourquoi cette marginalisation, et pourtant, Zbarboura est l’une des agglomérations de Lakhdaria.”L’effectif est très important. La localité dispose de deux écoles primaires. La nécessité de construction d’un CEM s’impose. Lors de notre discussion, un citoyen nous annonça qu’à Zbarboura, il y avait un projet de réalisation d’un CEM mais il a été transféré à Lakhdaria, à Haï Zitoun. Pour remédier aux difficultés du transport des scolarisés, les élus locaux de l’APC se sont engagés à mettre à la disposition des élèves des fourgons pour le ramassage scolaire, mais, ce n’est que promesse non tenue. “Ce ne sont que des paroles pour apaiser notre désagrément”, dira un collégien en 3e AM. Les citoyens redoutent l’isolation et la marginalisation que leur infligent les autorités locales.

L’éclairage public…Les citoyens dénoncent le silence et le refus de l’APC de régler ce problème. La nuit, Zbarboura est plongée dans le noir et devant cet état de fait, les habitants se chargent, eux-mêmes, de la rechange des lampes. S’agit-il d’une action civique, d’une bonne citoyenneté ou tout simplement, le citoyen doit participer à prendre en charge les problème de sa contrée. Aussi, ils signalent les coupures fréquentes et intermittentes du courant électrique.

Le gaz de villeLe réseau de conduite principale du gaz de ville qui alimente la ville de Lakhdaria passe à proximité de la localité de Zbarboura ; néanmoins les citoyens n’ont en pas bénéficié. Par ailleurs, à Taliouine, une autre agglomération 10 km plus à l’Est de Lakhdaria, toutes les maisons sont branchées. A présent, en cette période hivernale, la population rencontre quelques difficultés pour s’approvisionner en gaz butane. Selon les propos des riverains, une requête a été adressée à l’APC et que celle-ci a fourni un dossier aux services de la Sonelgaz, laquelle promet que des travaux, en ce sens, seront lancés. Toutes les conditions sont réunies pour réaliser ce projet à conditions d’avoir une bonne volonté. Pour l’heure, les gens se déplacent à Lakhdaria ou à Kadiria pour acquérir une bouteille de gaz butane.

La décharge publique : lieu de tous les mauxSituée au Sud-Est de l’agglomération, à environ un kilomètre, elle cause à la population des maladies respiratoires. La fumée qui se dégage couvre et envahit tout le village. Un citoyen, asthmatique nous dira : “A mon âge, la soixantaine, je fuis le village toute la journée. Le soir, c’est la vraie souffrance. La fumée et l’odeur me coupent le souffle, notamment quand c’est le vent du Sud-Est qui souffle. Et nos femmes ! Et nos enfants ! Ces pauvres personnes endurent trop !”. Et il termina sa déclaration avec un long soupir. Un jeune de 22 ans intervient et dit : “C’est normal ! de la RN 5, notre village n’est pas apparent. Les usines le cachent et le voilent”. Des enfants viennent, munis de sacs-poubelles, pour fouiller et fouiner dans les ordures. Ils ramassent tout ce qui pourrait être réutilisé, revendu ou recyclé. Pour parer à ce phénomène, les éboueurs mettent le feu mais la fumée nuit à la santé de la population et à l’environnement.”

Des projets et des espoirsNotre visite a été une opportunité pour les habitants de la contrée. Ils se plaignent de leur situation et expriment leurs doléances : la réhabilitation des ruelles, le gaz de ville, l’eau…, la liste est encore longue.Des travaux d’aménagement et de réhabilitation du stade sont lancés et sont à pied d’œuvre. Cette aire de jeu offrira du plaisir et permettra aux jeunes de se regrouper, de se rencontrer et s’évader de la routine qui les ronge. L’agglomération a bénéficié d’un projet de 48 logements RHP mais les bénéficiaires rencontrent d’immenses difficultés. La typologie de ces logements est la même. Les bénéficiaires sont invités à terminer les travaux intérieurs et extérieurs (crépissage des portes, fenêtres, carrelage…). Ces finitions sont assez lourdes pour ces pauvres gens. Nous surprîmes quatre personnes en train de monter les portes et les fenêtres de leurs maisons. L’un d’eux nous invite à visiter sa “nouvelle demeure”. Toutes les chambres sont inondées d’eau et de boue. Ces logements sont bâtis à la limite d’un talus qui dépasse les 6 mètres de hauteur, par endroit. Les risques d’éboulement sont réels et les dégâts matériels étaient causés à deux habitations. Les travaux de terrassement effectués manquent d’étude sérieuse. Les voies d’accès sont des chemins accidentés et impraticables en hiver. Pour nous rendre à ce site, nous avons rencontré des difficultés car ces pistes sont boueuses et même un tracteur ne pourrait y accéder.En définitive, Zbarboura est d’un avenir économique meilleur. Région à vocation agricole, la diversité de cette activité s’impose. Les potentialités existent, mais il suffit que les pouvoirs publics apportent leurs soutiens dans le cadre des programmes lancés par l’Etat.

A. Bouzaïdi

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