Tizi-Ouzou redécouvre les plaisirs du plein air

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Le chef-lieu de Tizi-Ouzou n’a pas, grand-chose, de quoi se vanter en matière de lieux d’évasion. à peine quelques places et jardins publics, dont l’entretien laisse à désirer pour certains… Pire, on ne peut y accéder quand on veut. Et pourtant, les choses auraient pu être complètement autres, en mieux, avec la soif manifestée par la population locale. Il suffit, en effet, d’un rien pour susciter des engouements des plus imprévisibles…

Comme ces opérations de réhabilitation de certains sites de l’espace urbain. C’est le cas par exemple du plus grand jardin situé du côté du siège administratif de la wilaya. Il a été assez bien retapé même si certains éprouvent la nostalgie de l’ancien aménagement. Le fameux bassin rempli d’eau, se trouvant au centre, manque, en effet, cruellement, dans le nouveau décor. Mais bon ! D’autres apprécient peut-être mieux les lieux tels qu’ils sont devenus… En tous les cas, celui qui a conçu la nouvelle maquette n’admettra jamais que c’était mieux avant. Bref, en dépit du temps mis dans sa réhabilitation et l’argent qu’a coûté cette opération, l’essentiel est que le jardin a été mis à la disposition du grand public. Mais de quelle manière ! Il est clôturé comme une «forteresse» ou un «pénitencier». Il ouvre et ferme ses portes comme une administration. C’est à croire qu’il s’agirait d’un musée…  A vrai dire, c’est un espace qui n’a rien de particulier. A peine une cafétéria et un jet d’eau, qui sont à l’arrêt la majeure partie du temps, ainsi que quelques bancs, même pas en nombre suffisant, pour les jeunes couples qui privilégient ce lieu pour leurs rencontres amourettes. Ce qui a donné au coin une certaine réputation… Le comble, c’est que ce lieu dispose d’une seule issue. Donc, si par malheur quelqu’un de la famille venait à surprendre les tourtereaux, ils n’ont même pas une autre issue «d’évasion» pour fuir le gênant face à face, notamment, avec les fâcheuses habitudes et les inviolables tabous de notre société… En gros, ces places n’ont, donc, pas trop changé mis à part la clôture. Les travaux envisagés et la consistante facture consentie n’ont pas rendu, pour autant, le site fréquentable pour tous… Rares sont les familles qui s’y aventurent. Ajouter à cela, ce grand handicap d’absence de parking. Il aurait été d’ailleurs, plus utile d’envisager une toute autre étude pour le site et prévoir un sous-sol pour le stationnement des véhicules et aménager comme il se doit un espace aéré pour servir d’entrée plus adéquate au stade Oukil Ramdane, avec, bien entendu, une belle esplanade à agrémenter de verdure ! Il en résulterait un beau complexe de proximité pour les riverains. Mais ce n’est qu’une hypothèse. La situation actuelle du site est complètement différente. On a réalisé un jardin fermé et presque hermétique et les familles n’osent pas trop y pénétrer. Il faut dire qu’en plus de cette réputation du jardin «squatté» par les couples, il a toujours été connu comme un espace que se seraient approprié les non-jeûneurs. Ceci pendant le mois de carême. Mais cette «appellation parallèle» lui colle toujours… C’est aussi l’une des raisons du désintérêt des familles à le fréquenter. En plus, quand on se rend dans un jardin public, c’est pour profiter, généralement, de la nature en plein périmètre urbain. Or, au jardin Muhand Oul Hadj, c’est le béton qui domine et tout est cloitré par des grilles en fer…  Heureusement que le wali a prévu d’autres espaces pour la ville et ses habitants, à l’image de la place de l’olivier, aménagée à la rentrée ouest de la ville. Sur place, il n’y a pas grand-chose non plus. Même pas une fresque pour orner les lieux et leur donner de la vie. Juste un parterre en pavés et cet olivier sec qui sort de terre. On aurait pu mettre un jeu de lumières ou pourquoi pas songer à illuminer l’arbre comme un sapin de Noël… ça le rendrait plus beau et plus attractif ! Non?

Quand un olivier redonne la vie à une cité…

N’empêche que les lieux sont chaque soir pris d’assaut par les familles qui y trouvent un espace ouvert et piétonnier pour faire quelques pas et respirer l’air libre… Il y a même ceux qui viennent y promener leur chien. Vraiment, ce n’est jamais désert. C’est dire que les citadins de Tizi-Ouzou ne sont pas, du tout, exigeants. Et quand le tenancier de la gargote d’à côté qui remonte au temps de la station de taxis inter wilayas, met des tables pour le grand public, on se croirait en ‘’Europe’’. Et on en profite pleinement : Limonade fraîche, café glaces, ambiance mixte et familiale, des jeunes, tablettes à la main, pendant que d’autres s’initient aux rollers… Que du plaisir ! C’est agréable à vivre et à voir. Ce n’est pas encore la patinoire sur glace de la mairie de Paris mais on ressent un peu …la civilisation 2014.  Et de loin meilleure que celle des banlieues parisiennes ! En effet, s’attabler à Tizi-Ouzou en plein air et en famille ne se faisait pas, il y a encore quelques temps. Mais désormais, on apprend à le faire. Ce n’est pas que les jeunes ou les vieux d’ici ne savaient pas le faire jusque-là mais c’est juste par ce qu’il n’y avait pas où. Maintenant c’est possible, et ça draine du monde malgré le peu de commodités sur ces espaces. Un kiosque tabac-journaux, des toilettes publiques, peut-être même un coin fleuriste, à monter et à démonter quand on veut, rajouteraient certainement de la vie à ces lieux, grâce auxquels les Tizi-Ouzéens redécouvrent les plaisirs de la place publique. De sortir. Du plein air… L’ex-gare routière réaménagée et inaugurée, au mois de Ramadhan dernier, en esplanade constitue également un lieu vers où convergent, en nombre, les citadins de Tizi-Ouzou. Ca fait en quelque sorte une extension pour la place de l’olivier puisqu’il suffit de juste traverser la route qui les sépare pour y être. Le décor est meilleur. Des fresques ornent les mûrs de clôture de la surface. Les couleurs rajoutent de la vie aux lieux. Ca leur donne le cachet d’une certaine hospitalité d’une quiétude, d’une tranquillité… C’est comme quelqu’un qui vous reçoit avec un visage qui rayonne… on ne se sent pas repoussé ni pressé de quitter les lieux…  L’ouverture sur place d’une cafétéria et la mise en place d’une sorte de manège pour enfants a suffi pour en faire même un haut lieu de détente. Durant les soirées du Ramadhan, la place, dotée d’une scène carrément en dur, accueillait des galas artistiques dans une ambiance des grands jours. Il fallait parfois jouer du coude à coude pour se frayer un chemin. Ramadhan est passé l’été aussi et l’esplanade ne désemplit toujours pas. Particulièrement en fin de journée. On y reste même jusqu’en début de soirée, malgré la fraîcheur qui commence à prendre place avec la tombée de la nuit. Les familles y savourent de bons moments de détente. A table. Sur des bancs. Ou à même le sol sur ces petits espaces gazonnés… Franchement dommage que ces espaces en vert restent très réduits, toutefois. La grande surface et en sol dur, soit en pavé soit en tuf. Mais on s’en fout ! On laisse ses enfants aller, revenir, courir dans tous les sens, se lâcher, sans cette hantise d’une voiture qui passerait… Ils sont au moins à l’abri. S’il y avait de petits groupes de musiciens amateurs qui viendraient y faire leur ‘’répét’’, un peu comme ça se fait ailleurs, ça rendrait les lieux sans doute plus gais et davantage enchanteurs… Ce n’est pas encore le cas, mais peut-être… un jour. Mais pour que ça arrive, il faut que ça se provoque, s’initie… En attendant, c’est déjà rassurant que les familles occupent les lieux, empêchant qu’ils soient squattés par une certaine frange qui les ferait fuir. La proximité du commissariat de police rassure certainement les parents…

« Peut mieux faire ! »

Et la place s’est déjà faite une bonne réputation. En ville, le jardin de la mosquée reste lui renommé pour les interminables parties de dames que les vieux se livrent à longueur de journée. Au quotidien ! Avec le temps, il en a même émergé des champions connus de la place… Mais depuis des années, c’est là un espace « sénior moustachu »… La gent féminine ne s’aventure pas trop, sinon rarement, dans cette partie haute de la place du 1er novembre. A vrai dire, le coin n’a pas changé de vocation malgré sa réhabilitation et son inauguration en grande pompe, il y a quelques années, un certain 1er novembre. Pas moins de trois ministres ont été dépêchés à l’occasion. Mais depuis, pas un agent n’a été spécialement affecté en permanence pour entretenir les lieux… On passe le balai à l’occasion ! L’autre jardin d’en face, dénommé 1er novembre également, cerné par l’ex-monoprix et la Banque nationale d’Algérie n’aura pas eu meilleur sort. Clôturé également comme une forteresse, il n’a vraisemblablement fait qu’un heureux ou deux : Celui qui a arraché le marché du barreaudage en acier plein et l’entrepreneur qui a eu l’opportunité de tout habiller en pierres taillées… Mais sinon, l’enceinte n’est pas du tout accueillante. Elle est d’ailleurs réduite à des allées en béton, comme creusées en sous-sol avec ces mûrs qui montent de chaque côté. Ca fait penser à un charnier pas encore rempli, à un sillon où peuvent se poster des soldats sur le front de guerre, à un labyrinthe de…Fort Boyard… Bref à tout sauf à un lieu pour se détendre. D’autant plus que les rares espaces en terre qui entourent les arbres donnent l’air d’un champ laissé en jachère… La viabilisation des lieux reste entièrement à imaginer ! Ca, c’est sans doute la remarque d’un esprit tout juste sensé. Et il y aurait certainement cet autre, rompu à la « ruse locale », qui se dira déjà heureux que l’espace soit, d’une manière, sauvegardé n’ayant pas été jusque là du moins, cédé à une quelconque promotion immobilière… Au registre des points positifs, à signaler les deux initiatives historiques de l’actuel wali, Abdelkader Bouazghi, qui a osé baptiser deux places de la ville aux noms de Matoub et Djaout… Elles restent modestes, mais leurs portées sont de loin immenses et très significatives. Aucun responsable officiel ne l’avait osé auparavant… C’est une première qui réconcilie la population locale avec son environnement, avec la place publique. En somme, le constat est tel que la conclusion reste évidente sur ce chapitre des espaces de détente à Tizi-Ouzou. Elle ne peut être vraiment différente de celle d’un enseignant sur la copie d’un collégien dont il n’aimerait pas anéantir les « efforts » fournis : « Elève en amélioration mais peut beaucoup mieux faire ! » En des mots clairs, l’initiative est là. Mais la suite, l’après, bref, le suivi fait cruellement défaut !  

D. C.

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