Iflissen s’engouffre sous les déchets

Partager

La décharge communale d’Iflissen est fermée depuis dimanche dernier par les habitants de six villages environnants. Ces derniers réclament sa «délocalisation» ou à défaut leur «relogement ailleurs».

Hier encore, les comités des villages concernés, à savoir Ighil Bessoual, Taourirth, Sahel, Adhrar, Timliline, Issenadjene, Aguemoune et Oumadhene, observaient sur place une permanence pour faire respecter leur action. Ils avaient l’air bien décidés à ne pas reculer cette fois. «Nous avons assez attendu. Maintenant c’est à eux (l’Etat ndlr) de trouver la solution. Il n’est plus question qu’on continue à inhaler toutes ces odeurs nauséabondes. Déjà que c’est très désagréable en nature, alors là quand ils mettent le feu pour brûler les ordures, c’est vraiment insoutenable». Celui qui parle comme ça c’est le président du comité du village Sahel. Il est entouré et soutenu par plusieurs autres villageois qui ne manquent pas de le suivre en paroles et en gestes comme pour faire comprendre que l’initiative est clairement collective. Et surtout qu’ils n’ont pas tort et que jusque-là ils s’étaient «vraiment montrés patients». Car, racontent-ils, «le problème ne date pas d’aujourd’hui. La décharge a été créée en 2009 – 2010. A ce moment-là on nous avait dit que c’était provisoire, pour une durée de huit à quatorze mois. Le temps que le projet du CET de Mizrana soit concrétisé. Nous avions alors laissé faire même si c’était là une entreprise qui nous pénalisait. Nous avions privilégié l’intérêt collectif, je dirai même au détriment de notre santé et de celle de nos enfants. Et encore, nous, nous n’allions profiter de rien dans cette affaire, car nos villages ne bénéficient même pas du ramassage d’ordures. Chacun de nous se débrouille pour s’en débarrasser. La décharge ne devait donc accueillir que les déchets du chef-lieu d’Iflissen et ceux des cantines scolaires des localités. Mais nous voilà quatre ans après, et rien n’est fait. Pire, la décharge est devenue un réceptacle de toutes sortes d’ordures. On vient même d’autres communes nous jeter ses saletés ici et nous, nous nous engouffrons dedans». Certains villageois semblent particulièrement en vouloir à l’APC qui aurait même accordé des autorisations d’utiliser la décharge à certains particuliers. «La dernière fois, nous avons surpris un éleveur y jeter des tas de volailles mortes. Et il a dit qu’il détenait une autorisation de l’APC pour le faire. Il y a même des cadavres de vaches sur le site. Ca ne peut plus continuer comme ça,» charge-t-on. Continuant leur plaidoirie qu’ils sont dans le juste, les protestataires expliquent qu’ils n’ont pas agi à l’improviste. «Nous n’avons pas décidé de cette action en nous réveillant dimanche dernier. Nous avons avisé tout le monde. En août dernier, nous avions déjà saisi le maire, le chef de daïra, les directions concernées et même le wali, pour réclamer la délocalisation de cette décharge. Mais nous n’avons rien vu venir. Pour toute réponse, on nous dit de trouver une autre assiette. Mais ce n’est pas à nous de le faire et puis à la limite ce ne sont même pas nos ordures. Donc, qu’ils se débrouillent, quoi en faire». A l’APC d’Iflissen, les élus rencontrés hier ne semblaient pas détenir une quelconque issue à cette crise. «Je ne dis pas qu’ils ont complètement tort, mais que pouvons nous faire mis à part tenter de les raisonner et les convaincre de nous accorder un autre délai. Ces déchets, il faut bien les jeter quelque part. C’est vrai que la solution c’est que le CET de Mizrana soit concrétisé pour soulager toute la région. Mais, en attendant, que faire ? C’est pour cela que nous nous sommes engagés, lors d’une récente réunion avec tous les comités de villages de la commune, à procéder à la réhabilitation de cette décharge en nettoyant les alentours, en la clôturant totalement en dur et en plaçant un portail. Il est même envisagé d’affecter ou recruter un agent qui veillera sur place pour assurer le contrôle sur place. Bien entendu, ce sont là des mesures temporaires et à côté nous espérons avoir tout le monde dans un même camp, pour faire bloc, pour la concrétisation du CET de Mizrana dans les meilleurs délais», explique M. Bentayeb, vice-président de l’APC. M. Bouaïcha, également vice-président, abonde dans le même sens : «La solution passe par la mise en marche du CET de Mizrana. Mais malheureusement, il y a certaines oppositions qui bloquent le projet. Nous devons faire front pour sa concrétisation. C’est dans l’intérêt de toute la région, pas seulement d’Iflissen ou de Tigzirt», tranche-t-il. En attendant, Iflissen assiste, depuis dimanche, à un entassement des ordures sur ses ruelles et voies publiques. Ce n’est pas beau à voir. La vie dans la région semble être empoisonnée par les ordures et les oppositions ! A l’image de toute la Kabylie du reste !

D. C.

Partager