Le conteur s’en est allé sans finir ces superbes contes qui nous rappellent le froid de l’hiver, où toute la famille entourai el Kanoun pour entendre les histoires racontées par grand-mère.
En cette triste journée du 30 octobre 1988, disparaissait à jamais un artiste qui a chanté les contes et les traditions kabyles avec un amour viscéral. Vous l’auriez reconnu, il s’agit de Meksa. Même si sa mort demeure énigmatique, mais ses proches sont persuadés «qu’il a été assassiné dans des conditions obscures!». En tout cas, la Kabylie a perdu un véritable chantre, et un militant infatigable de la cause Amazighe. Meksa a quitté la vie à un âge prématuré où il pouvait donner encore plus. Il n’avait que 34 ans quand la fâcheuse l’a rappelé au ciel, pour y rester au firmament de la chanson Amazighe. Son dernier album «Amghar azemni» (le vieux sage), sorti quelques mois seulement avant sa mort tragique en 1988, était le dernier travail musical superbement entrepris par ses soins, et ce, après une absence de près de 8 ans pour des motifs inconnus. Pour retracer un peu son itinéraire artistique, Meksa Abdelkader, né le 4 juin 1954 à Mira, dans la commune de Timizart, relevant de la wilaya de Tizi Ouzou, a commencé à s’intéresser à la musique dès son jeune âge, ce qui lui a valu de devenir un artiste de renom dès l’âge de 21 ans seulement, avec, à la clé la sortie de son premier album en 1975 «Loundja », ou la fille de l’ogresse, lequel opus a connu un succès fulgurant, préludant d’une carrière exceptionnelle de l’enfant de Mira. Dans cet album, il chante également ce trésor culturel qui nous vient de l’Ahaggar, avec ce titre «Atsaya tajeddit ». Meksa chante, aussi, les traditions ancestrales, auxquelles il est demeuré attaché lui qui était ingénieur en informatique et qui a su concilier la tradition et la modernité. Ainsi, notre grand artiste chantait l’entraide dans « Timechret », et l’imploration du Dieu Amazigh de la pluie dans la chanson «Anzar » pour qu’il lâche l’eau du ciel, afin d’abreuver les humains, les plantes et les animaux. En 1979, Meksa signe un autre album qui le consacrera comme l’un des monstres sacrés de la chanson Algérienne moderne, aux côtés des légendes comme Idir, Djamel Allam, Mennad, Brahim Izri, Abranis et tant d’autres. L’opus s’intitule Tafunest igujilen (la vache des orphelins), un superbe conte que Meksa a voulu faire connaître surtout dans le milieu de l’émigration, puisqu’il y était depuis 1976 en France. Cet album était une réussite totale, où il rend, également, un vibrant hommage à notre roi Massinissa. Une année après, en 1980, le conteur revient avec un autre album qu’il titrait « Amnekcham » (Le colonisateur). Ensuite, c’est le silence radio, après avoir animé quelques galas, notamment à Alger, où il a laissé une très bonne impression. Ce n’est qu’en 1988 que Meksa décide de reprendre le chemin du studio pour enregistrer son dernier album «Amghar azemni (Le vieux sage), où le chanteur interrogeait ce vieux sage de Taddart, emmitouflé dans son légendaire burnous, sur la vie et ses vicissitudes. Quelques mois plus tard, Meksa meurt dans des circonstances obscures à Créteil en France. Ainsi, s’est achevée l’une des vies artistiques les plus chargées en émotion. Le conteur s’en est allé mais ses chansons sont restées là témoins de son génie peu commun!
Syphax.Y