La confidence égyptienne

Partager

La sixième journée du Festival International du Théâtre de Béjaïa a été particulièrement riche en émotions.

La journée s’est ouverte sur un spectacle spécialement dédié aux enfants, à la grande salle du Théâtre Régional de Béjaïa. Ils furent nombreux à venir regarder les performances de la troupe belge de Pierre Chemin, «Le jouet Musical». Il y eut environ deux cents enfants qui se sont régalés avec les morceaux et les animations qui leur ont été présentés. A la sortie du spectacle, ils étaient joyeux et souriants. En parallèle s’est déroulée une rencontre avec Lucia Falco et Marcello Serafino, sur l’utilisation du langage corporel dans le théâtre. L’actrice italienne a expliqué combien le travail est difficile et long, pour faire taire ses propres émotions et adopter la gestuelle nécessaire à l’expression artistique. Le corps exprime souvent des émotions, et l’acteur a besoin de le maîtriser afin de pouvoir exécuter les gestes devant accompagner une pièce de théâtre. La veille, elle avait interprété un rôle riche en émotions (Hamlet Motel), et cela l’avait affectée au point de troubler son sommeil. Ce que Marcello avait confirmé étant lui-même concerné. Après une rencontre avec des représentants de l’ambassade de la Belgique, invités d’honneur du Festival, dans laquelle les diplomates avaient exprimé sans langue de bois, leur satisfaction de voir tout le travail qui est fait à l’occasion de ce festival, et brossé un rapide tableau sur les projets de coopération qui sont envisagés entre les deux pays, une pièce de théâtre a été présentée au public par une troupe égyptienne. «Le chaos» est une pièce produite par la troupe El Madina pour les Arts de Représentation et de la Danse. Les égyptiens ont une grande expérience dans le domaine théâtral, et la salle était archi- comble. La pièce fut présentée en langue égyptienne pure. A la fin, le plus âgé des acteurs s’est mis à crier «Tahia El Gazaer», Vive l’Algérie, en surprenant l’assistance qui a fortement applaudi. Lors de la conférence de presse qui a réuni toute la troupe égyptienne, la même personne, à savoir Ibrahim El Mellah a tenu à expliquer quelque chose. Visiblement ému, et le visage couvert de larmes, il a expliqué à la vingtaine de journalistes présents comment ils ont été trompés sur la réalité de l’amitié qui lie les Algériens aux Egyptiens. «Nous avions peur de venir», a-t-il expliqué. «Nous pensions rencontrer des problèmes avec vous, mais c’est tout le contraire qui s’est passé. Depuis notre arrivée à l’aéroport d’Alger, les gens nous ont très bien accueillis, et beaucoup tenaient à nous saluer, dès qu’ils ont su que nous étions Egyptiens». Toujours sous le coup de l’émotion, le vieux monsieur a ajouté qu’il avait visité tous les pays dits arabes, mais que jamais il n’a été aussi bien accueilli. Ce que l’ensemble des membres de la délégation égyptienne ont confirmé. Après la conférence, et en aparté Ibrahim El Mellah nous a confié qu’il était un berbère d’Egypte, fier de ses origines. Nous avons ainsi appris qu’en dehors de la région de Siwa, au nord-ouest de l’Egypte, il existe également des villages entiers de berbères égyptiens dans le sud-ouest, non loin de la frontière avec la Libye.

Le regret français 

Pour terminer la journée, alors que la pièce Ibn Batuta se jouait à la Maison de la Culture, la troupe française «In Theatro Veritas» allait commencer sa représentation dans la grande salle du TRB. Mais avant de commencer, les trois acteurs français ont tenu à expliquer quelque chose d’important. La pièce qui devait être produite, Henri VIII ne pouvait plus être présentée. En effet, quatre des sept acteurs qui devaient jouer dans la pièce se sont désisté à la dernière minute, influencés par ce que les médias rapportaient sur le risque sécuritaire en Algérie, suite à l’assassinat d’Hervé Gourdel. Seuls trois des sept acteurs ont donc fait le déplacement. Donc, il était impossible de présenter la pièce prévue. Alors, ils ont décidé d’en monter une, spécialement pour ce Festival. Ils l’ont appelée «My Day in Béjaïa». Ils n’ont eu que quatre jours pour la préparer. Le public a été si sensible à ce geste qu’il les a applaudis longuement. Lors de la conférence de presse organisée à la fin du spectacle, la responsable de la troupe a expliqué qu’elle avait posté des photos de Béjaïa sur son site Facebook. Ses camarades restés en France ont beaucoup regretté leur décision de ne pas venir. Maintenant, ils espèrent qu’il y aura une «My day in Bejaïa 2», ce qui veut dire qu’ils souhaitent revenir jouer dans cette ville, mais qu’il y aurait très certainement d’autres My day, consacrées à d’autres villes. L’expérience de la ville de Bougie les a inspirés, et ils promettent de faire savoir aux français que ce que les médias racontent sur l’Algérie est tout simplement faux. Ils ont exprimé leur satisfaction et leur joie d’avoir fait le déplacement à Béjaïa, et dit combien ils étaient contents de l’accueil qui leur a été réservé.

N. Si Yani

Partager