Sur les sentiers de l’exode

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La campagne se désertifie implacablement dans la région de Tamokra, une circonscription rurale située sur la rive droite de la Soummam. Par processions successives, les villageois abandonnent leurs patelins, pour venir s’installer dans les agglomérations urbaines. Le village Tizi Aidel illustre de manière désarmante cet inexorable exode. « C’est, en grande partie, la conséquence directe de l’insuffisance des programmes de développements successifs réservés aux villages, lesquels pèchent par l’absence d’une vision d’équilibre entre la campagne et la ville », analyse un citoyen de Tamokra, résidant à hauteur du chef-lieu communal. Le village Tizi Aidel, éloigné de quelque 7 Kms du chef-lieu, ne compte plus qu’une poignée d’irréductibles. L’esprit de clocher solidement chevillé au corps, ils continuent de s’agripper désespérément à leur crête, en faisant, contre mauvaise fortune, bon cœur. « La plupart des gens qui sont restés au village n’ont pas de point de chute ailleurs. Les autres sont des retraités qui vivent de leur rente viagère », dira Ahcène, un habitant de Tizi Aidel, établi depuis plusieurs décennies à Akbou. « Certes, concède-t-il, l’exode vers les villes a toujours fait partie de notre vécu, mais, depuis environ 20 ans, le mouvement s’est considérablement accentué ». « Le comble, déplore-t-il, c’est que les gens s’en vont en famille, pour ne plus y remettre les pieds, sauf pour assister à des funérailles ». D’autres, nous signale-t-on, rentrent au bercail pendant l’olivaison. « Il y a des familles qui mettent à profit les vacances scolaires pour venir ramasser leurs olives, mais une fois la campagne bouclée, ils reprennent le chemin de la ville », souligne un autre citoyen du village. La désagrégation de l’économie traditionnelle de ce village, à vocation agropastorale, a exposé ses habitants à un douloureux dilemme : végéter dans le dénuement ou déguerpir vers des cieux, pas forcement, plus cléments. Un septuagénaire, installé avec sa famille à Seddouk, atteste que le barrage Tichi Haf a porté le coup de grâce en faisant voler en éclat toute perspective de renouveau. En effet, témoigne-t-il, l’eau de ce lac a englouti bien des vergers, noyant, du même coup, le zeste d’espoir qui subsistait encore chez les villageois. « Des propriétaires terriens ont été réduits à la misère en leur consentant des indemnités dérisoires », soutient-il.

N. Maouche

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