La problématique de l’emploi en Algérie a fait l’objet, hier, d’une journée d’études organisée par la faculté des sciences économiques de l’université Akli Mohand Oulhadj de Bouira.
Les participants, des chercheurs universitaires et des spécialistes de la question économique, ont, tout au long de leurs interventions, appelé à «revoir» la politique gouvernementale en matière de création d’emploi et par conséquent le renforcement de la lutte contre le chômage. Comme chacun le sait le problème de l’emploi et la dégradation du marché du travail figure parmi les problèmes les plus délicats que connaît actuellement notre pays. Le taux de chômage a atteint 10% en fin 2012, selon les statistiques officielles. Les participants, à l’instar du Dr Toumi Abderrahmane, enseignant et chercheur à l’université de Boumerdès, ont axé leurs interventions sur les causes du chômage en Algérie. Selon ce spécialiste, « en Algérie, nous distinguons des causes structurelles et conjoncturelles. Ces dernières se matérialisent par l’absence d’une industrie de base capable de dynamiser l’économie nationale; une agriculture accusant un retard et un chômage quasi chronique, touchant une grande partie de la population de ce pays mais aussi le poids relatif du secteur public dans l’économie en terme d’investissement, de production et d’emploi, qui rend l’action de changement envisagée difficile et pleine de risques». Toujours d’après le même orateur, la politique énergétique du pays, dominée essentiellement par les hydrocarbures serait l’une des causes de la «faillite» de la politique de l’emploi. «La stabilité de l’économie et son niveau de croissance sont tributaires de l’évolution des prix des hydrocarbures déterminés sur le marché international. Le moindre choc sur ce marché produirait des effets déstabilisants sur l’économie nationale. Ce fut le cas au milieu des années 80, lorsque l’Algérie est sévèrement atteinte par le contre-choc pétrolier qui a ramené le prix du brut d’environ 30$ en 1985, et à 14 $ en1986. Au moment où je vous parle, le prix du baril de pétrole continue sa dégringolade», a-t-il souligné. Avant d’ajouter : «Cette situation est aggravée par la dépréciation du dollar par rapport aux autres devises, car si les exportations algériennes sont facturées en dollars, les importations sont réalisées à hauteur de 60% avec des pays européens ». D’autres intervenants ont expliqué que notre pays a considérablement «évolué» en matière de niveau de formation. Ainsi, l’utilisation des machines entraîne le recours toujours moins important à la main d’œuvre. Cette évolution a mis l’accent sur le déficit existant entre les compétences demandées par les entreprises et le niveau de formation moyen de la population active. Alors que les exigences professionnelles, techniques et intellectuelles de ceux qui proposent un emploi sont élevées, par rapport à ceux qui sont à la recherche d’un travail. Cette inadéquation entre qualifications proposées et demandées joue comme un facteur aggravant sur le marché de l’emploi. Elle explique pour une large part le chômage des jeunes qui quittent le système scolaire en n’étant pas ou peu qualifiés. Ces «carences» créent inévitablement de la décroissance et par ricochet du chômage de masse. Le second intervenant, M. Boutaleb Kouider, enseignant à l’université de Tlemcen, notera le fait que « face à l’aggravation du chômage, des programmes de lutte contre le chômage ont été mis en œuvre». Selon lui, les solutions préconisées par les pouvoirs publics sont classées dans deux catégories : des solutions passives ou traitement social du chômage et des solutions actives ou création réelle d’emploi. Dans sa communication, l’universitaire s’est intéressé aux mesures actives. «En Algérie, les mesures actives sont apparues sous trois formes : l’aide à la création d’entreprise ou à l’auto-emploi, l’insertion à travers des contrats à durée déterminée (CDD) ou des emplois d’attente et l’amélioration de l’employabilité des chômeurs à travers la formation reconversion et l’aide à la recherche d’un emploi», expliquera-t-il. Parmi ces dispositions, le conférencier citera : Les dispositifs d’insertion professionnelle des jeunes (DIPJ), le programme d’emploi des jeunes (PEJ), les dispositifs gérés par l’agence de développement social (ADS), le dispositif de soutien et d’insertion professionnelle des jeunes (ANSEJ), etc. Par la suite, les participants ont fait un point de synthèse sur la question, en tirant les conclusions que le chômage est un problème sérieux dont les conséquences affectent l’individu et l’économie et il est à l’origine des tensions sociales. La lutte contre le chômage a mobilisé divers dispositifs et plusieurs institutions, mais tous les efforts déployés n’ont pas été couronnés de succès. Contrairement à ce que laisse croire les données officielles, la stratégie de lutte contre le chômage n’a pas empêché le sous-emploi de se développer aussi bien ouvertement que sous des formes dissimulées. En effet, il ne suffit pas de savoir que tant d’emplois ont été créés ou que tant de personnes ont bénéficié d’une insertion sur le marché du travail, il convient de s’intéresser également à la durée des contrats de travail proposés, aux secteurs d’activité qui ont le plus contribué à l’embauche, au niveau de rémunération payée aux bénéficiaires, etc. Le traitement du chômage ne peut se réduire aux seules mesures palliatives nonobstant leur nécessité mais doit s’inscrire dans une stratégie de relance économique impliquant « une vision unitaire et globale de mise en mouvement de politique à long terme»
Ramdane B.