Tout le monde a sans doute remarqué sans pouvoir intervenir cependant, que les clients dans les épiceries et dans les supérettes tâtent et touchent, au détriment de toutes les mesures d’hygiène, plusieurs baguettes de pain avant de choisir celles qu’ils vont mettre dans leurs sachets. Et tant pis pour les clients suivants qui, eux aussi, après avoir palpé plusieurs pains, jetteront leur dévolu sur ceux déjà sondés, froissés et boudés par les clients précédents. Les commerçants laissent faire parce que cela leur évite de se déplacer eux-mêmes jusqu’aux paniers de pains pour servir leurs clients. Normalement, tonne un client qui, visiblement, ne semble pas apprécier le fait que tout le monde touche à la marchandise, le pain doit être mis dans une armoire vitrée et c’est au commerçant de donner le pain aux clients. On ne sait pas si tous ceux qui ont touché aux pains ont les mains propres. Et on n’a pas à manger le pain palpé par les autres. Le pain, s’énerve-t-il, ce n’est pas une chose qui se lave. Ce que ce brave père de famille ignore sans soute aussi, c’est que les paniers de pains ont été dans certains cas livrés tôt le matin avant que le commerçant n’ouvre son magasin et laissés sur le trottoir à la bonne garde des chiens errants, qui n’ont sûrement pas manqué de s’assurer de la fraicheur de leur contenu. Ces cas de figure sont très rares heureusement, mais ils existent tout de même sur les grands boulevards de la ville. Pour s’en rendre compte par eux-mêmes, les services concernés n’ont qu’à se lever tôt et faire la tournée des commerces qui vendent le pain. Dans les boulangeries, le pain est propre, puisque seuls les vendeurs le touchent en servant les clients. Pain normal, pain amélioré et la chaîne avance. Malheureusement, entre midi et midi et quart, c’est-à-dire au moment où les gens sortent du travail pour acheter et rentrer chez eux pour déjeuner, souvent il n’y a plus de pain dans les boulangeries. Toutes les fournées sont déjà vendues ou livrées aux commerçants.
B. Mouhoub