Plaidoyer pour développer l’inter-culturalité

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L’association mémoire de la terre (ATM) est une association basée sur l’Ile de Djerba en Tunisie, sans appartenance politique.

Mais elle se réclame des préceptes universels de dignité de liberté de démocratie et de justice. En plus de son travail en Tunisie, elle œuvre pour développer l’inter culturalité et instaurer une paix juste et durable entre les peuples de la planète. Le bassin méditerranéen reste son champ de prédilection pour organiser des échanges et de la coopération. Nous avons rencontré le président de cette association, en visite à Béjaïa, dans le cadre d’une coopération avec une association locale, l’Office de Tourisme de Béjaïa, qui œuvre au développement touristique de la région, et qui a engagé des projets avec de nombreux partenaires, dont l’association que préside Messaoud Ben Youssef Yamoun. Au fil de la discussion, le Djerbien nous a raconté : «J’ai passé l’essentiel de ma vie à sillonner les pays du Maghreb. J’y ai découvert des liens qui existent depuis belle lurette entre ses différentes régions, même depuis l’époque phénicienne. Ces derniers ont été parmi les premiers occupants qui ont atterri sur l’Ile de Djerba, avant même la fondation de Carthage. Ils se sont ensuite établis sur le littoral méditerranéen ».  Messaoud Yamoun évoque aussi le lien particulier qui existe entre l’Ile de Djerba et la région de Béjaïa. « Au large de Béjaïa, sur la côte ouest, il existe des ilots appelés Djerba, en lien directe avec la Djerba tunisienne. C’est un témoignage de l’existence de liens séculaires qui existaient dans notre patrimoine commun. La ressemblance entre l’architecture du village de Djebla (Béni K’sila, ndlr) et celui de Djerba est frappante. Moi-même, j’ai découvert des liens familiaux dans la région. Je suis venu à Béjaïa à l’occasion de la fête de Yennayer parce que dans notre calendrier agricole commun, nous fêtons cette date modestement dans certaines familles tunisiennes. Mais elle est très célébrée en Algérie. Yennayer doit constituer une occasion de nous rassembler et demander à Dieu de nous accorder une belle année agricole. C’est pour ça que nous faisons la fête. Elle est joyeuse et très riche. Ça devrait être comme ça tout le temps. Les échanges entre nous peuvent se faire toute l’année. Notre poterie est un des plus anciens foyers de poterie au monde, et je l’ai aussi découvert dans le village de Djebla ici à Béjaïa, et en Albanie ». Il est vrai que la culture méditerranéenne se ressemble d’endroit à endroit. A moins que Messaoud Yamoun n’insinue que des berbères se soient aussi installés en Albanie. Ce qui ne serait guère étonnant, vu la nature nomade de ce peuple qui aime les voyages et les découvertes. « Les Djerbiens ont voyagé à travers la méditerranée. Nous avons découvert çà et là des poteries anciennes originaires de Djerba, avec des motifs particuliers. Nous sommes en train d’aménager des espaces à Djerba même, où nous allons exposer tout cela. A travers cette poterie, nous retrouvons les liens ancestraux qui nous unissent et qui nous rassemblent plus que cette politique qui nous divise plutôt. C’est à chacun de nous de construire l’histoire. Il faut la renforcer par les échanges. Sinon, ça reste de la rêverie, et de l’utopie ». Sur ce, il nous convie à lui rendre visite, là où des espaces d’accueil ont été aménagés pour recevoir des visiteurs de toutes les régions et de construire ensemble un avenir qui pourrait être prometteur. Rappelant un pan de notre histoire commune, Messaoud Yamoun n’oublie pas qu’Ibn Khaldoun a vécu ici à Bougie. Il n’avait aucun moyen de locomotion. Il a pris sa monture et a voyagé pendant un mois, à raison d’une moyenne de trente-trois kilomètres par jour. « Je connais l’Algérie depuis toujours. Je l’ai connue avant l’indépendance et après. J’y ai aussi connu l’indépendance. La veille du coup d’Etat de juin soixante-cinq, j’étais encore dans ce pays. J’ai émigré tout jeune, de Lyon vers Alger pour y faire mes études.  Nous recevons à Djerba des délégations de jeunes qui nous rendent visite, de toute cette région. Il faut multiplier et approfondir les échanges entre nous. Ne comptons pas sur les pouvoirs publics pour tout faire pour nous ou à notre place. Nous devons s’enrichir mutuellement. » Sur ce, nous avons eu une agréable discussion sur notre histoire commune, celle du peuple amazigh qui aimait se déplacer de région en région, sans être freiné par des frontières politiques. Seule la générosité des cœurs leur permettait de se sentir chez eux quel que soit l’endroit où ils étaient dans cette grande Tamezgha. L’Association Mémoire de la Terre compte développer ses relations avec les gens de la région. Elle a été accueillie par les jeunes de l’Office de Tourisme de Béjaïa, qui trouve ainsi un partenaire de choix, pour s’ouvrir et élargir ses horizons. Espérons qu’ils sauront en tirer avantage, ne serait-ce que pour le développement touristique entre la Perle de l’Afrique du Nord et l’Ile merveilleuse qu’est Djerba.

N. Si Yani

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