Les Eléphants tiennent leur revanche ! Après deux finales perdues aux tirs au but (2006 et 2012), la Côte d'Ivoire a remporté sa deuxième Coupe d'Afrique des nations en battant le Ghana dans ce cruel exercice (0-0 a.p, 9-8 t.a.b.) en finale de l'édition 2015, dimanche à Bata.
Ironie du sort, c’est sans leur légende Drogba, absente d’une CAN pour la première fois depuis des lustres, que les Eléphants ont enfin décroché le titre continental, leur second seulement après celui de 1992 glané déjà aux tirs au but face au… Ghana. Leur sélectionneur Hervé Renard, premier Français à signer cet exploit, entre dans l’histoire en gagnant sa deuxième Coupe d’Afrique, après 2012 avec la Zambie, et déjà aux tirs au but. Son homologue Avram Grant, novice en CAN, peut en revanche maudire les tirs au but après son échec en finale de la Ligue des champions avec Chelsea en 2008. Et c’est cruel pour les Black Stars, monstrueux de régularité en étant présents dans le dernier carré des cinq dernières éditions, et qui repartent donc encore une fois sans leur cinquième trophée convoité (après 1963, 1965, 1978 et 1982). Andre Ayew, sans doute le meilleur Ghanéen du tournoi, ne pouvait réprimer ses pleurs au terme de la séance fatidique, inconsolable. Si le match a été terne, la séance de penalties finaux (la 5e sur les 9 dernières CAN) fut spectaculaire: les deux premiers tireurs ivoiriens ont échoué (Bony et Tallo), le Ghana menait 2-0 grâce à Wakaso et Jordan Ayew, puis les Eléphants ont égalisé par Aurier et Doumbia alors que les Ghanéens Acquah et Acheampong rataient !
Puis, bluff ou pas, le gardien ivoirien Barry se disait victime de crampes avant le 5e tir ! Les capitaines Andre Ayew et Yaya Touré marquaient et on allait à la mort subite. Et c’est le duel entre gardiens qui a tranché quand l’Ivoirien Barry a arrêté le tir de son homologue Razak Braimah, et réussissait le sien. Une belle revanche, un clin d’oeil du destin pour le portier des Eléphants qui avait dû s’incliner en 2006 et 2012, et qui n’a joué la finale dominicale que parce que le titulaire habituel Gbohouo s’est blessé ! Il fallait cette séance pour donner du piment à une finale qui en fut singulièrement dépourvue. La peur de se livrer: sous une pluie fine ininterrompue, le match a patiné avec des joueurs manifestement crispés par l’enjeu. Les défenseurs ont pris le pas sur les attaquants, à tacler proprement, à tout intercepter et dégager, plus saignants. Cet attentisme offensif a du coup débouché sur un nombre minimal d’occasions. Il y eut les poteaux trouvés par la frappe puissante d’Atsu (26e) et le centre-tir d’Andre Ayew (36e), et c’est tout! Les attaquants ivoiriens étaient méconnaissables: Gradel inexistant, et remplacé par Doumbia (67e), Gervinho auteur d’une poignée de chevauchées rapidement avortées, et rarement bien servi; Bony remiseur, dos au but, jamais en face, jamais dangereux. Côté ghanéen, pas mieux. Andre Ayew, s’il a beaucoup défendu, n’a pas apporté offensivement, et Gyan ne s’est illustré que par deux ratés (53e, 72e). Un seul joueur au-dessus, Atsu: par ses débordements et ses bons centres, le rapide ailier a semé quelques frissons dans la morne plaine du rectangle vert. Yaya Touré était loin de son niveau habituel, discret, et même imprécis. Le préposé aux tâches obscures à ses côtés, Serey Die, a été bien plus précieux, malgré sonavertissement précoce. Les Black Stars ont tenté leur chance de loin en seconde période, sans attraper le cadre, et les Ivoiriens auraient pu faire le coup parfait si Doumbia avait été plus prompt que Mensah sur un renvoi du gardien ghanéen (90e). Les tirs au but allaient décider du sort. Et les Eléphants y auront été meilleurs.
Nuit de folie à Abidjan
Klaxons, cris, danses… la Côte d’Ivoire a vécu une nuit de folie après la victoire dimanche de ses Eléphants en finale de la Coupe d’Afrique des Nations, 23 ans après leur dernier sacre continental. A Abidjan, des grappes de supporteurs, ivres de joie hurlaient à chaque coin de rue au passage des voitures, dont beaucoup étaient ornées du drapeau national. « La malédiction est enfin terminée ! Les rois de l’Afrique, ce soir, ce sont les Ivoiriens », s’enthousiasmait Alexandre, un étudiant venu comme plus d’un millier d’Abidjanais suivre le match sur les écrans géants du campus de l’université de Cocody (nord). « L’histoire s’est répétée. Comme en 1992, nous avons battu le Ghana aux tirs au but. Maintenant nous avons une deuxième étoile sur le maillot. C’est l’un des plus beaux jours de ma vie », se réjouissait Moussa, aux joues peintes en orange, vert et blanc, les couleurs ivoiriennes. Embrassades, courses furieuses, danses frénétiques : l’ambiance a viré à l’hystérie quand Coppa Barry, le gardien des Eléphants, a marqué au terme d’une séance de tirs au but interminable, offrant le sacre à la Côte d’Ivoire (0-0, 9 à 8 aux tirs au but). « Coppa ! Coppa ! », scandait la foule quelques minutes plus tard, pendant que le gardien soulevait le trophée, rendant hommage à son héros. « On a gagné la Coupe du monde », observait mystérieusement la petite Adi, 11 ans, sourires jusqu’aux oreilles et pieds nus devant un maquis (bar extérieur) de la capitale économique ivoirienne. « On a pleuré pendant des années mais on mérite cette Coupe. Aujourd’hui on est tous derrière cette équipe : c’est l’union nationale », souriait Ahmed.

