C’est un engouement sans précédant qui a été constaté depuis le début de l’année autour des plantes et herbes comestibles sauvages, lesquelles constituent un palliatif pour remplacer les fruits et légumes. Le prix de ces derniers a, faut-il le souligner, entamé une ascension effrénée depuis le dernier trimestre de l’année écoulée, pour atteindre des sommets inaccessibles à la majorité des ménages à moyen et faible revenus. Ainsi, des légumes, comme la pomme de terre, l’oignon, le piment, la tomate, pour ne citer que les plus névralgiques présents quotidiennement et à tous les repas, voient leur prix osciller entre 90 et 150DA/kg. Les légumes secs et les pâtes ne sont pas en reste. Ces produits, très prisés durant l’hiver du fait d’être utilisés pour obtenir des repas chauds, ont aussi enregistré une hausse vertigineuse, se négociant entre 150 à 250 DA le kg. Une flambée des produits alimentaires que la majorité des bourses ne peuvent plus suivre, d’où le recours des citoyens aux plantes et herbes comestibles que Dame nature offre généreusement et gracieusement aux pauvres chefs de familles qui ne savent plus à quel… étal se vouer et qui se font charcuter par des intermédiaires sans foi ni loi intervenant dans l’informel. Après la carde sauvage (Taghediwth) précocement apparue en surface avec une spectaculaire croissance grâce à une bonne pluviométrie et autour de laquelle s’est produit un engouement non moins spectaculaire des mères de familles dans ces régions du pays, y compris autour et en périphérie des grandes villes, c’est une autre ruée qui est constatée vers les champs. En effet, des citoyens partent à la recherche des champignons et des asperges sauvages arrivés à maturité et en abondance. La cueillette de ces deux plantes très prisées est réservée exclusivement aux hommes, et ce, du fait que, contrairement à la carde sauvage qui pousse dans les champs agricoles et en terrains nus proches des agglomérations, donc accessibles aux femmes, les champignons et les asperges poussent en pleine, là où ne peuvent pas s’aventurer les femmes pour des raisons de sécurité en plus de la difficulté d’accéder aux endroits fort accidentés où poussent ces plantes. Pour les asperges, on les retrouve aussi en abondance à proximité des lits d’oued. C’est le cas notamment des berges d’Assif N’sahel qui sont prises d’assaut par des jeunes et moins jeunes à partir d’assif oumarigh, à mi-chemin entre les communes d’El Asnam et Bechloul jusqu’aux limites entre la wilaya de Bouira et celle de Béjaïa. Des dizaines de citoyens des communes d’El Adjiba, Ahnif, M’Chedallah, Ath Mansour et enfin Chorfa sillonnent ces lieux en groupe à longueurs de journée, sachets en main, à la recherche d’isskimen. Les asperges se préparent en friture mélangée à de l’ail et des œufs, constituant un plat succulent au goût exceptionnel. La plante se trouve aussi à proximité des nombreux ruisseaux qui traversent le territoire des deux communes de haute montagne, Saharidj et Aghbalou, qui enregistrent la même ruée des citoyens. Dans ces deux communes de montagne, le champignon (Iverchetcha) ravit la vedette au reste des plantes comestibles. En plus de pousser en abondance dans des zones fraîches et humides, son goût ressemble beaucoup à celui de la viande rouge ; d’où le dicton kabyle « Aknetch ayaverchetchou ferriha n’chichou » (on mange le champignon pour son goût de viande). Seulement, pour le champignon, sa consommation est limitée dans le temps du fait qu’à partir de la mi-avril, qui marque le début du déclenchement du processus du réchauffement climatique, qui est aussi la période de l’éclosion des œufs des insectes et des vers, les champignons qui servent à la nidification de plusieurs espèces de vers se retrouvent infestés de larves répugnantes et deviennent impropres, voire même dangereux à la consommation. En attendant, et tant que ces plantes restent consommables, sachant que les asperges aussi deviennent durs en été les mères de familles ont moins de soucis quant au menu à présenter à leur progéniture. Bien mieux, en plus d’être 100% bio, l’ensemble de ces herbes et plantes comestibles ont de nombreuses vertus thérapeutiques, manière de joindre l’utile à l’agréable.
Oulaid Soualah
