C’était autour de la chanson kabyle d’être portée, mercredi dernier, sur la place publique, par la grâce du programme spécial Ramadhan. Même si la chanson sétifienne et chaouie étaient également au menu pour satisfaire l’éclectisme des goûts des spectateurs. Les organisateurs ont fait appel à trois chanteurs de talent, en l’occurrence Brahim Amirouche, Mustapha Hamdi et Ouahmed. Et cela a swingué en kabyle, grâce à ce trio de quintessence, et en ‘’staïfi’’ et chaoui, grâce à Rachid Kebabi. La soirée a démarré vers 23h30. Ainsi que nous l’a expliqué le directeur de la culture, cet horaire a été choisi pour éviter tout interférence avec l’heure de la prière. Malgré l’exigüité de l’espace aménagé à cet effet (nous avons déjà signalé l’occupation de la place par des jeux pour enfants), une grande foule attendait avec impatience l’ouverture du spectacle. Lorsque les premières paroles de ‘’Avridh’’ se sont répandues dans l’air à un rythme étourdissant, le public s’est laissé doucement transporté vers cette région magique connue des seuls artistes. Libéré de la pesanteur d’une vie sans relief ni saveur, les jeunes se sont laissés à danser. Brahim Amirouche, ce fils de Bouira qui a rendu un tendre hommage à la ville dans son album sorti en 2012, cet artiste qui a commencé sa carrière en 93 et qui doit ses premiers pas dans la chanson à d’illustres maîtres comme Matoub Lounès, Chérif Khadam et cheikh El Hasnaoui, a terminé sa prestation avec ‘’Akedenigh’’. A partir de 2000, il n’a connu pratiquement pas de repos, sillonnant, sa guitare sur le dos, le pays en tous sens pour se faire connaître d’un public de plus en plus large. Avec le même talent, Mustapha Hamdi, qui a lui aussi deux albums et a commencé dans la chanson vers la même année, doit sa formation artistique à Slimane Haniche, Rabah Flici et Amokrane qui représentent à ses yeux le folklore kabyle qu’il explore depuis 92 guitare à la main. Interrogé peu avant qu’il ne monte sur scène sur la thématique qu’il développe à travers son œuvre, il nous répondit par cette pirouette : «80% des chansons kabyles sont sentimentales». Ce chanteur, que le succès ne semble plus lâcher, a chanté ce soir entre autres ‘’Aaïgh Seguem’’ (Je suis las) et ‘’Avridh’’ (la route). Puis vint le tour de la chanson sétifienne et chaouie, interprétée par Rachid Kebabi, qui modifia le rythme de la soirée, ce que le public a bien apprécié en applaudissant très fort. ‘’Chouiet’’, ‘’El mel yakhali’’ (l’argent, ô mon oncle) ou ‘’Essaha adouet moulaha’’ ont rencontré le même succès. Le chanteur est plein de talent et gagnerait à faire son propre album, se contentant jusqu’à maintenant de reprises. Le retour au folklore kabyle se fit avec Ouahmed. Ce natif de Bounouh établi à Bouira, et que tout le monde connait sous le nom de Ouahmed, a déjà à son actif 15 albums. Le succès a croisé son chemin dès 2001. Il écrit lui-même et ses textes et ses musiques. Il a son public au sud et à l’ouest du pays. En France, où il compte retourner en septembre, à l’occasion de la sortie de son prochain album, il s’est produit dans la salle de la République en 2006. Ce soir il a chanté entre autres ‘’Nek dhazaouali’’. Dans les coulisses, nous avons croisé le Amazigh qui nous apprendra : «Je suis là à la demande du public pour lequel je chanterai samedi». Il nous dira avoir fait spécialement le voyage de France.
Aziz Bey