Fraîchement installé Recteur de l'université de Tizi-Ouzou, en proie ces derniers temps à des perturbations, en remplacement du Pr. Hanachi, le Pr Ouardane, médecin chef du service de médecine interne à l’hôpital Nédir, ambitionne de relancer la machine grippée malgré la difficulté de la tâche, concède-t-il, après un premier bilan des insuffisances.
La Dépêche de Kabylie: Vous venez d’être installé au poste de Recteur de l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou. Quel état des lieux en faites-vous ?
Pr Ouardane : Il serait prétentieux de faire un diagnostic précis en quelques jours, mais la situation paraît plus complexe que ce que je voyais en qualité d’enseignant chercheur hospitalier. Je me rends compte que j’avais une visibilité tronquée à partir de la faculté de médecine, qui elle-même d’ailleurs a connu beaucoup de problèmes. Les soucis de l’université sont multiples et la priorité est donnée à ceux d’ordre pédagogique qui relèvent des missions principales de l’université et que je suis prêt à affronter pour assurer les meilleures conditions d’accueil et de prise en charge aux 51 000 étudiants que compte l’université de Tizi-Ouzou. Mais il y en a d’autres qui risquent de se greffer et freiner l’élan de l’université. Il y a beaucoup de problèmes secondaires qui consomment beaucoup d’énergie au détriment des missions nobles. Il faudra donc gérer cela par le dialogue serein, constructif et responsable pour se libérer de ces freins et se consacrer à l’essentiel.
La rentrée universitaire c’est demain, il y a nécessité de la préparer. L’université de Tizi-Ouzou attend quelque 13 000 nouveaux bacheliers, sans oublier les étudiants en cours de formation. Cette échéance mobilise toute l’université Mouloud Mammeri.
En termes de disponibilité des places pédagogiques, pensez-vous qu’il sera facile de faire face à la demande exprimée ?
Nous sommes contraints de trouver des solutions alternatives. En attendant la finalisation du pôle de Tamda qui connaît quelques retards, différents scenarii sont prévus pour faire face au flux d’étudiants. La finalisation du projet de Tamda réglera le problème des places pédagogiques, et en attendant il y aura une phase de transition qu’il nous faudra gérer de manière rationnelle.
Penseriez-vous à recourir à des structures hors des périmètres universitaires pour combler le déficit en places pédagogiques, comme cela a été fait par le passé ?
Non, le principe retenu est d’optimiser l’utilisation des structures déjà disponibles. Il n’est pas question de surcharger les classes mais il y a beaucoup de propositions comme par exemple celle d’assurer des cours les samedis. Ceci dit, je rassure les plus soucieux que des plans sont déjà mis en place pour assurer les meilleures conditions aux étudiants et aux enseignants ainsi qu’à l’ensemble des travailleurs pour aborder la prochaine année universitaire sous de bons auspices.
L’année universitaire a quasiment toujours été lancée en décalage, pour ne pas dire en retard, à Tizi-Ouzou. Est-ce à dire donc que ce sera encore le cas cette année ?
Il y a tout de même des facultés qui vont démarrer assez tôt, début septembre. Notre challenge est justement de mettre toutes les conditions d’accueil en place pour que chaque faculté commence dès qu’elle aura apuré l’année pédagogique précédente. Normalement, il ne devrait pas y avoir de retard important. Et si j’ai un message à passer aux étudiants c’est qu’ils sachent qu’il y a beaucoup d’efforts qui sont consentis pour leur assurer la meilleure rentrée possible.
Sur le plan administratif, on croit savoir que vous vous apprêtez à procéder à des changements à la tête de certaines facultés, notamment en ce qui concerne la faculté de médecine qui a été le théâtre de plusieurs remous et contestations ces dernières années…
Effectivement. Mais sans me focaliser sur telle ou telle faculté on devra nécessairement procéder à certains remplacements de doyens démissionnaires. Il est clair que les doyens ont un rôle important à jouer avec leur casquette d’autorité scientifique et de gestionnaire. Toutes les conditions leur seront créées pour qu’ils puissent exercer en toute sérénité.
C’est là la mission que vous vous fixez : relancer l’université de Tizi-Ouzou ?
Absolument. Ceci dit, il y a problèmes prioritaires qu’il faudra prendre en charge rapidement et ensuite faire un travail de fond dans le cadre d’un projet d’établissement qui va commencer par un diagnostic précis de chaque faculté.
Et la place de la recherche dans tout ça ?
Elle ne peut être qu’importante. La recherche constitue la motivation première de chaque enseignant soucieux de progresser. L’université de Tizi-Ouzou recèle beaucoup de compétences qu’il faudra accompagner. C’est l’un de nos objectifs, et il faut préciser que la formation au sens large sera encouragée.
L’institut de langue amazighe ?
Effectivement, à ce sujet aussi il y a la volonté d’en faire un pôle d’excellence dans le cadre du projet d’établissement.
Une spécificité peut-être perdue, de l’université de Tizi-Ouzou: Jadis, elle était une référence reconnue au niveau national. Et paradoxalement, c’est à la décennie où la wilaya se vante d’être à chaque fois sur le podium des résultats au bac que cette université a, de l’avis des initiés, beaucoup perdu de sa verve…
Pour une wilaya qui a les meilleurs taux de réussite au baccalauréat, il est légitime d’être exigeant vis-à-vis de l’université. Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain et sous-estimer le travail accompli par des enseignants et des cadres consciencieux. Les turbulences qu’a connues l’université ont certainement impacté les résultats.
Et vous pensez relever le défi ?
A vaincre sans péril, triomphe sans gloire. Les difficultés font partie du cycle de vie de toute organisation, le challenge est justement de remonter la pente. Ceci ne pourra se faire que s’il y a conscience des vrais enjeux et convergence sur les missions.
Entretien réalisé par Djaffar Chilab.