Amizour perd sa vocation

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La vocation agricole de la commune d’Amizour est, on ne peut plus clairement, évidente avec une triple preuve à l’appui confirmant cette tendance qui reste paradoxalement le parent pauvre dans les orientations des projets de développement local de cette région.

Avec une superficie globale de 109.36 Km2 (7ème rang au niveau de la wilaya de Béjaïa), il faut d’abord dire que 78.58% de ce territoire communal représentent la surface agricole utile (SAU) avec au total de 8.594 hectares, une démonstration claire et limpide propulse, seule cette commune pour occuper le premier rang à l’échelle de wilaya.

«Ce chiffre à lui seul vaut mieux que mille discours et autant de démonstration qu’Amizour a une vocation agricole», peut-on lire dans une synthèse de contribution sur le chômage de l’association pour la promotion et l’insertion de la jeunesse d’Amizour en 2001. La commune d’Amizour avait en 2000 une part de 52,21% de la surface totale de la wilaya destinée à la viticulture, sans oublier l’olivier qui venait en tête avec une occupation du sol de 2 332 HA soit 36,91%, et les céréales pour 990HA soit 15,67%.

Cela étant la production de la vigne de table d’Amizour, à cette époque elle était presque de la moitié de celle de toute la wilaya (49,05%), un exemple fort prouvant la prépondérance de sa production agricole à l’échelle de Béjaïa, sans compter bien sûr sa situation géographique occupant une large partie de la bande de plaines de la vallée de la Soummam, un autre atout à l’effet de faciliter l’irrigation des terres agricoles.

L’autre facteur qui n’est pas des moindres est celui de la composante de sa population, qui est de 4/5ème pratiquement rurale et sociologiquement favorable aux activités agricoles, dont les cultures et l’élevage. Cette performance locale en matière de la production agricole qui propulse cette région au premier rang de la wilaya, comme par exemple dans la production céréalière et la production laitière (9 000 litres/j) garde sa stabilité en dépit de la réduction, qui va sans cesse de la surface agricole au profit du béton.

Pas moins de 50 hectares ont disparu durant les 3 dernières années de la SAU, et sans remettre en cause la nécessité de dégager des terrains pour des projets d’utilité publique, à savoir le pole universitaire, des établissements de santé ou du réseau routier, il n’en demeure pas moins que la vocation agricole imposée d’elle-même ne soit totalement ignoré.

«Cela étant, la déperdition en terrains agricoles dans notre région ne date pas d’aujourd’hui, pour ne pas incriminer seul l’extension, voire l’invasion du béton, puisque la protection de l’activité agricole est liée directement aux moyens et à la manière d’exploitation des terrains», explique un ingénieur agronome pour mettre en exergue la problématique des surfaces irriguées.

«C’est une situation paradoxale dans la mesure où une surface agricole irriguée SAI est très faible devant une quantité d’eau disponible mais non utilisée par absence de retenues collinaires relativement importantes, et le problème d’irrigation à Amizour demeure l’obstacle par excellence du secteur agricole», ajoute notre interlocuteur. Les contradictions sont nombreuses, cependant avec comme conséquence la faible surface irriguée qui est de l’ordre de 1 045 HA, soit 12,16% seulement alors que la commune occupe une bonne partie de la rive droite de l’Oued Soummam, lequel, par ses débordements présente quelques fois un danger aux berges par d’éventuelles inondations pouvant hypothéquer la production.

Des atouts non capitalisés, le travail agricole faiblement valorisé et la SAU en rétrécissement inexorable sont autant de facteurs qui mettent à l’ombre ce secteur important qui reflète la vocation naturelle de la région. Les agriculteurs appellent aujourd’hui à une utilisation rationnelle, bien étudiée des terres agricoles dans le choix des assiettes à bâtir. «Bien sûr que l’on doit construire des infrastructures et élargir et moderniser notre ville seulement qu’il fallait bien réfléchir avant de faire le choix de terrain à la hâte et tomber du premier coup sur une surface agricole fertile et facile à exploiter», pense un autre agriculteur qui se désole, en précisant que dans le passé des surfaces ont été prises au profit de quelques projets alors que l’on pourrait implanter les mêmes projets ailleurs et épargner ces terrains agricoles par excellence.

C’est à travers cet état des lieux que des agriculteurs et aussi des citoyens ayant le souci de l’environnement et de la vocation agricole de la région, interpellent les pouvoirs publics quant à l’utilisation du foncier par protéger néanmoins ce qui reste des terres agricoles, histoire aussi de protéger l’environnement et de stopper l’invasion du béton vers les plaines. Sachant surtout qu’un projet ambitieux en logements est prévu pour cette commune et qu’on ne doit régler un problème tout en créant un autre. Cela dit, il est impératif de songer à une extension vers l’arrière pays plus adaptés à ce type de projet car il s’agit là de zones hautes non inondables et plus exposer à l’air et au soleil afin d’éviter le phénomène de l’humidité à l’origine d’apparition des maladies respiratoires.

Même sur le plan architectural, cela donnera un panoramique qui s’ajoute à la beauté de cette ville, surtout avec ses plaines qui l’a séparent de l’Oued Soummam donnant lieu à une carte postale unique en son genre. De cette manière tout le monde sera gagnant, la ville grandit et se modernise, l’environnement sera protégé et les marchés de fruits et légumes seront inondés de produits local et de terroir qui faisaient la fierté d’Amizour jadis, il suffit juste de réhabiliter sa vraie vocation, la vocation agricole le vrai label de cette région nommée il ya si peu de temps la petite Mitidja.

Nadir Touati

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