Le fait marquant de ce mois de juin au niveau de la wilaya de Bouira, est incontestablement la propagation de la bactérie de brucellose et sa transmission vers l’homme. Depuis le 30 juillet dernier, pas moins de 18 cas d’infection umaine (le dernier en date a été dépisté avant-hier), ont été diagnostiqués par les services hospitaliers de Bouira. Mais peut-on vraiment parler d’épidémie ? Dans cet entretien, le docteur Gourari, médecin infectiologue au niveau de l’EPH de Bouira est catégorique, « on peut parler effectivement d’épidémie », a-t-il déclaré. Le mot est lâché et c’est une première ! Car ni les services de la DSP ni ceux de la DSA ne voulaient évoquer ce terme « épidémie », du fait qu’il sous entende que la situation est grave. Notre interlocuteur, en sa qualité d’infectiologue, a pour mission de soigner tous les malades atteints de brucellose, depuis la déclaration du premier cas de cette maladie. Il a bien voulu répondre à nos questions sur la situation générée par cette maladie, qui sème une certaine panique parmi la population.
La Dépêche de Kabylie : Le service de médecine interne femme a accueilli ce matin (lundi) un nouveau cas de brucellose. C’est une femme de 44 ans. Elle est originaire de Taghzout, dans la daïra de Haïzer. A combien se portent le total de cas depuis la déclaration de cette maladie ?
Dr Ahmed Gourari : à 18. Le premier cas date du 30 juillet. Le malade a quitté la consultation au moment où vous êtes entrés. Comme vous avez pu voir, il se porte très bien. Il vient pour un contrôle et pour son traitement qu’il n’a pas encore terminé. Je l’envoie faire une radio chez un rhumatologue pour voir si les douleurs lombaires, dont il se plaint un peu quelque fois, ne sont pas une complication due à la brucellose. Le dernier malade a quitté mon service hier (dimanche).
DDK : Il ne reste plus à l’hôpital que ce nouveau cas. Peut-on parler d’épidémie, puisque, d’après nos informations, au moins quatre localités sont touchées : Taghzout d’où la maladie est partie, Oued El Bardi, Saïd Abid et El Hachimia ?
Dr Gourari : Certes. Au-delà de 4 à 5 cas, on peut parler effectivement d’épidémie. Avec 18 cas déclarés, la question ne se pose plus. Mais la maladie n’a touché que deux localités et non quatre. Tous les cas ont été enregistrés à Taghzout et Oued El Bardi, avec deux cas seulement pour cette localité au Sud de la wilaya.
DDK : Est-ce une maladie mortelle ? Et le traitement qu’on donne à cet effet est-il efficace à cent pour cent ?
Dr Gourari : Elle n’est pas grave, lorsqu’elle est détectée à temps et prise en charge convenablement. Mais les complications auxquelles elle expose, peuvent être parfois mortelles en cas de dépistage tardif ou de prise en charge incorrecte. Le traitement est généralement administré par voie orale et dure 6 semaines. C’est de la Doxycilline et de la Rifamycine.
DDK : Quelles sont ces complications auxquelles vous faites allusions et qui, selon vous, sont plus graves encore si la maladie n’est pas traitée de façon radicale ?
Dr Gourari : La maladie se manifeste comme vous savez, par trois signes cliniques: forte fièvre, douleurs articulaires aigües et une grande faiblesse. Elle peut toucher les os et les articulations dans une proportion comprise entre 65% et 80%, comme elle peut atteindre 10% les organes gynéco-urinaires et provoquer la stérilité chez les patients. Chez les neuro-méningés, on observe le même taux de complication, alors qu’il est de 2 à 3% chez les cardiopathes et tout aussi faible chez les hépatospléniques.
DDK : Quels conseils donnerez-vous au consommateur de lait cru et autres dérivés ?
Dr Gourari : Mes conseils s’adressent à deux catégories de gens : d’abord ne consommer de lait que bien bouilli et de la viande que bien cuite. Pour les seconds, qui sont en contact direct avec les animaux, je leur recommande de se servir toujours de gants et d’utiliser de l’eau de Javel pour désinfecter les lieux susceptibles d’être contaminés. Et bien sûr abattre les bêtes atteintes de cette maladie.
Aziz Bey