Les grévistes mis en demeure !

Partager

La semaine dernière, à la demande du conseil de direction de l’université de Béjaïa, le ministère de l’Enseignement supérieur a dépêché une délégation afin de s’enquérir sur l’état de crise dans lequel se trouve la faculté des sciences exactes, et par là même, tenter une mission de conciliation entre les grévistes-contestataires et le rectorat. Pour trancher dans ce conflit, et éviter qu’il ne s’éternise et continuer à nuire aux étudiants, le conseil de direction de l’université a donc décidé de faire appel au ministère de l’Enseignement supérieur, afin d’aider à mettre toute la lumière sur les éléments qui l’alimentent.

Par mesure conservatoire, il a été demandé à l’université de Béjaïa de sursoir momentanément au transfert total de la faculté à Amizour, le temps que durerait la mission de la commission ministérielle. À l’ordre du jour de la délégation, étaient inscrit trois points. Le premier a consisté à visiter le campus d’Amizour, afin de constater de visu l’état des lieux, et voir s’il était ou non apte à recevoir des étudiants et que des cours puissent y être dispensés. Après avoir visité les amphithéâtres, les salles de TD et l’ensemble des autres infrastructures, la commission a été invitée à une rencontre avec le conseil de direction qui a exposé son point de vue. En résumé les besoins actuels de la faculté des sciences exactes, au vu de l’effectif de ses étudiants, est estimé à sept amphithéâtres et une cinquantaine de salles de classe. Or, à Targa Ouzemmour, seuls deux amphis sont disponibles à plein temps, et un troisième à temps partiel, puisqu’il faudra le partager avec une autre faculté. De plus, concernant les salles de TD, seule une dizaine est disponible. À moins de prolonger les heures de cours jusqu’à vingt heures, voire même au-delà il est impossible de caser ces étudiants dans ces espaces. Pourquoi donc se mettre à l’étroit, alors qu’un grand espace est disponible à quelques kilomètres de là offrant toutes les commodités.

D’ailleurs, la commission présidée par Saïd Mansour, qui est inspecteur au MERS, a déclaré que «toutes les commodités de travail sont réunies au campus d’Amizour. Il reste toutefois à finaliser quelques travaux de voirie, et de récupérer l’important retard pris dans la réalisation de la bibliothèque». Suite à quoi l’université a pris la décision d’offrir une solution alternative, consistant en l’ouverture d’une grande salle de prêt et de deux grandes salles de lecture au sein du campus. Le troisième point pour la délégation ministérielle a consisté en la rencontre avec les enseignants grévistes. Lors des débats, les membres de ladite délégation ont constaté que ces derniers n’avaient même pas visité le nouveau campus, affaiblissant ainsi leur revendication. Il leur a donc été proposé de faire le déplacement ensemble pour visiter les lieux et découvrir le nouveau campus au-delà des rumeurs et fausses informations qui seraient parvenues aux contestataires. Alors qu’une partie des enseignants s’est laissée gagner par cet argument, une autre a avancé qu’elle ne voulait pas le faire, et que c’est une question de principe. Le dialogue semble donc avoir échoué à ce niveau. Depuis le départ de la mission ministérielle qui a séjourné à Béjaïa du 12 au 14 de ce mois, le conflit semble changer de nature. De différend à caractère pédagogique, il s’est transformé en revendication socioprofessionnelle. En effet, le rectorat a envoyé des mises en demeures aux grévistes, les enjoignant de reprendre leurs postes de travail, leur action étant rentrée dans l’illégalité. Du coup, nombre d’entre eux se sont mis sous la couverture du CNES pour déposer un préavis de grève, conformément à la loi.

Ce qui de fait, transforme le conflit à caractère pédagogique à un conflit socioprofessionnel, tellement loin des préoccupations et des intérêts des étudiants. Pour rappel, un groupe d’enseignants s’est mis en grève depuis la rentrée, il y a un mois, pour contester la décision du conseil de direction de l’université de transférer la faculté des sciences exactes au nouveau campus d’Amizour. Une de ses premières actions fut de boycotter l’organisation des examens de rattrapages, allant même jusqu’à la fermeture pure et simple des accès du campus de Targa Ouzemmour. Malgré les tentatives de dialogue, les enseignants grévistes ont maintenu leurs positions et essayé d’entraîner les étudiants dans leur mouvement. Pendant ce temps, l’administration et les services techniques de la faculté ont déménagé et se sont installés dans les nouveaux locaux d’Amizour, et la rentrée universitaire pour les nouveaux étudiants a pu se faire. Les deux parties en conflit ont donc décidé chacune en ce qui la concerne de maintenir sa position. Pour le rectorat, s’appuyant sur les données fournies par le conseil scientifique, il est devenu impossible pour le campus de Targa Ouzemmour de contenir l’ensemble des étudiants de la faculté des sciences exactes, et qu’il était devenu temps que celle-ci devienne autonome et bénéficie de ses propres infrastructures. Ce que le nouveau campus d’Amizour leur offre largement.

Mais pour les contestataires, ce campus a été dès l’origine destiné à accueillir la faculté des sciences juridiques, et qu’il ne conviendrait pas aux sciences exactes. N’aurait-il pas été plus judicieux de poser ces problèmes dès le départ et éviter cette perte de temps pour les étudiants dont les intérêts doivent être mis au-dessus de toutes autres considérations ?

Pour le moment, le processus de grève suit son cours, et les procédures prévues par la loi doivent être respectées. Mais à la fin du parcours, si une solution n’est pas trouvée, ce sera à la justice de trancher. Dommage qu’à l’université on en arrive à des situations aussi fâcheuses. D’un autre côté il serait judicieux de connaître les conclusions définitives de la délégation, vu qu’elle aura sans doute à présenter un rapport au ministre de l’Enseignement supérieur.

N. Si Yani

Partager