Luigi Pirandello : un géant de la dramaturgie

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Il est inutile de sous-estimer la littérature italienne, qui, bien qu’elle ne soit pas largement médiatisée, contribue fièrement au renforcement de l’édifice littéraire universel sans un complexe aucun. Parmi les plus en vue, le néoréaliste Rossellini, le moderniste Umberto Eco le classiciste Vicenzo Monti et le 1er Prix Nobel italien, Giossué Carducci en 1906. Nous consacrerons cet article à Luigi Pirandello.Luigi Pirandello a été, par ailleurs, rendu célèbre auprès du lecteur algérien par feu Mohya, par le biais de l’adaptation de l’une de ses œuvres théâtrales, tout comme l’Irlandais Samuel Beckett, entre autres auteurs adaptés. Pirandello, est ainsi connu en Algérie en général et en Kabylie en particulier, grâce à sa pièce “la Jarre”.Luigi Pirandello est l’un des plus célèbres grands écrivains et dramaturges italiens. Né en1867 en Sicile, il fait ses études à l’université de Palerme, Rome et Bonn, avant de devenir enseignant de littérature italienne à Rome entre 1897 et 1922. Il est un opposant de la stagnation de la technique et le jeu au théatre, rejetant ainsi les règles et les conventions imposées par le Vérisme. Il rejoint par là même le théatre, et vole de ses propres ailes, comme le veut le pessimisme existentialiste de Sartre, l’absurde d’Ionesco et Beckett, ou encore Eliot entre autres modernistes du quatrième art.Dans la plupart de ses oeuvres littéraires, Pirandello met en scène la perte de repères des individus de son époque. Ses personnages issus de la petite bourgeoisie, mènent une existence avec des contradictions insurmontables, refusant ainsi d’accorder crédit à toute théorie, soit-elle éthique, religieuse ou politique, et encore moins à une pensée dualiste, prétendant juger les actions en termes de bien ou de mal. Ce relativisme généralisé renvoie les personnages de ses œuvres, à ce qu’ils sont, et contraints de débusquer par eux-mêmes leur réalité, pour qu’ils comprennent enfin qu’ils sont voués à l’instable et l’inexplicable.Grâce à sa théorie de «L’humorisme» à travers ses écrits, Pirandello se fait «praticien», qui parvient à communiquer et le pessimisme profond et la compassion qu’il ressent pour le genre humain, sont en butte à beaucoup de confusion et de souffrance. Même si Pirandello a consacré sa vie à tous les genres littéraires, il est beaucoup plus connu pour le genre dramatique qui reste son champ et son genre de prédilection, et ses pièces de théatre sont jouées sans cesse sur toutes les scènes du monde entier.Ses balbutiements littéraires furent trois recueils de poésie “Mal content” en 1889, “Pâques de Gea”, en 1891 et “Elegie Rhénanes”, – en1895, entrecoupés par un recueil de nouvelles intitulé : “Amours sans amours” en 1894. L’écriture romanesque vient ensuite confirmer le talent de Pirandello avec une palette de cinq romans. C’est “L’Exclue”, qui ouvre le bal du genre-phare de la littérature moderne, en 1901 ; “Chacun son tour” en 1902 ; “Feu Mathias Pascal” en 1904 ; En 1913, il publie “Les Vieux et les Jeunes”, un roman historique, et “On tourne”, publié en 1915.En 1922, L’auteur de “la Jarre” se lance dans les nouvelles et publie “Nouvelles pour une année”, 15 recueils de nouvelles, entre 1922 et 1937, dont le dernier est publié à titre posthume. Pirandello est également auteur de quelques essais critiques dont “L’Humorisme”, publié en 1908. Néanmoins, le genre de prédilection de ce Sicilien est incontestablement le théatre, auquel il a su donner ses lettres de noblesse. Le nom de Pirandello ne peut être dissocié du théatre universel, aux côtés de Beckett, Corneille, Gogol, Brecht et Ionesco, entre autres. Citer dans un article toutes ses pièces, relèverait du domaine de l’utopie.On se contenterait par contre de nommer certaines des plus importantes. “Cédrats de Sicile” qui ouvre le bal de l’écriture dramatique de Pirandello en 1910. Suivent ensuite une série de comédies “Le Diplôme”, “Mais c’est pour rire”, “Le Jeu des rôles”, en 1917 ; “L’homme, la bête et la vertu” en 1919, La Vie que je t’ai donnée en 1923.“La Giarra” (La Jarre), révélée au public kabyle en particulier et algérien en général par Mohya, est écrite pour sa part en 1917. Mais les icônes de son écriture théâtrale, restent six personnes en quête de théatre d’auteur, et Les géants de la montagne, dont il reconnaît lui-même qu’elles sont ses meilleures pièces. Dans la première, il parle des arcanes, de la création littéraire. Il dit à ce sujet : «Quel auteur pourra jamais dire comment et pourquoi tel ou tel personnage a surgi dans son imagination ? Le mystère de la création artistique est le mystère même de la naissance naturelle. Il ajoute, «Pourquoi donc, me dis-je — je ne représente pas ce cas tout nouveau d’un auteur qui se refuse à faire vivre certains de ces personnages, nés vivants dans son imagination, et oui, ayant désormais la vie infuse en eux, ne se résignent pas à rester hors du monde de l’art ? Ils ne sont déjà pas détachés de moi ; ils vivent pour leur compte — ils ont la parole et le mouvement…»On comprend vite que la plupart des thèmes, des personnages sont également tirés de son vécu, sa maladie, la folie de sa femme, la participation de son fils à la guerre, et tant d’autres raisons qui lui inspirent des sujets abondants.En 1934, il reçoit le prix Nobel de littérature. Il meurt le 10 décembre 1936 à Cinecitta à la suite d’une pneumonie. C’est la grandeur de l’œuvre de Pirandello et la simplicité de sa personne qui ont fait dire à James Joyce, un autre géant de la littérature universelle de lui : «Il y a quelque chose de nouveau et de vital dans cet écrivain».

Salem Amrane

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