En marge du congrès de wilaya de l’union générale des travailleurs Algériens,(UGTA), tenu aujourd’hui, samedi, au niveau de l’hôtel des Hammadites, nous nous sommes rapprochés du secrétaire général de l’UGTA, Mr Aziz Hamlaoui en l’occurrence, qui nous a accordé cet entretien dans lequel il a dressé un bilan- diagnostic exhaustif sur la lutte syndicale, la situation socioéconomique de la masse ouvrière. Il plaide tout bonnement après l’abrogation de l’article 87 bis, objet à une critique incessante, pour la révision des statuts des corps communs de la fonction publique ou la révision du point indiciaire.
La Dépêche de Kabylie : A l’ombre de la prolifération des organisations syndicales autonomes, quelle lecture pouvez-vous faire sur le syndicalisme en général ?
Aziz Hamlaoui : Permettez-moi de rappeler que le mouvement syndical authentique représente l’avant-garde de la masse ouvrière dans sa lutte pour la justice, et doit être en mesure de renouer avec un discours faisant autorité sur le travail à côté de son engagement institutionnel ou défensif. Sur ce, il faut parler de la finalité et du sens du travail, libérer la parole des salariés, les chartes éthiques, les codes de bonne conduite, l’affichage de valeurs et d’engagements tels que le respect des personnes et de l’environnement qui constituent les outils de cadrage des pratiques managériales. Le sens du travail et son organisation doivent être guidés par la recherche d’une efficacité économique et sociale durable en opposition à une rentabilité financière de court terme en exigeant, dans chaque contexte de travail, une analyse précise de ce qu’implique le principe, de quels moyens et marges de manœuvre on dispose pour le mettre réellement en œuvre. Le rôle contributif des cadres syndicaux est de faire en sorte que le travail soit, non pas facteur de souffrance et d’aliénation ou un outil de défense pour quelques uns, mais un moyen d’humaniser, un épanouissement des hommes et des femmes où chacun éprouve sa liberté par la création individuelle et collective. Il est urgent d’amorcer un véritable débat sur les objectifs et sur les organisations de travail. Ces questions doivent être discutées et faire l’objet de propositions alternatives, d’interventions et de mobilisation des salariés. Quant au pullulement des syndicats, c’est le résultat de la démocratie dont nous en sommes entièrement satisfaits, pourvu que la concurrence rajoute un plus à la masse ouvrière.
Avez-vous justement un plan de travail propre pour conquérir le terrain…perdu?
Notre feuille de route consiste à se pencher sur une formation syndicale solide qui permet aux militants de disposer des outils nécessaires pour pouvoir se prendre en charge. L’UGTA considère que ce qui lui donne du poids dans sa lutte pour la défense des travailleurs et de leurs droits naturels, c’est la sincérité de l’allégeance et la clarté de la délégation que donne la masse ouvrière à ses représentants, à travers des élections honnêtes qui ouvrent le vote aux gens sincères pour qu’ils prennent position librement et honnêtement, conformément aux lois en vigueur. C’est ce qui s’explique par l’adhésion massive que nous enregistrons d’année en année avec un chiffre avoisinant les trente trois mille (33 000) adhérents au jour d’aujourd’hui.
Rentrée sociale sereine et calme précaire à Béjaïa, un commentaire ?
La réponse est que seul le juste est correct. En dépit de l’arsenal de lois promulguées, le principe éternel en jugerait, car l’écume s’évanouit, tandis que demeure ce qui est solidement bâti, et il ne fait aucun doute que toute agitation et discours non fondés sont une écume éphémère. Je persiste et je signe que les bonnes volontés des responsables contribuent énormément bien au règlement des conflits. comme est le cas au niveau de notre wilaya où nous avons pu régler près de 98% des problèmes des travailleurs grâce à la compréhension des responsables et le travail indéfectible des section syndicales de bases que je salue de passage, à l’exception du conflit de l’ETR qui a vu le bout du tunnel juste après le départ de l’ex-directeur en retraite, où les fonctionnaires réclament, aujourd’hui, les onze mois de salaires (grève 2012-2013), lequel est pris en charge par le président de la SGP (société de gestion participative). Je dirai que le dialogue reste le socle des solutions durables aux conflits.
Et si on revient à la situation socioéconomique en général, quel diagnostic pouvez-vous en faire ?
Vous savez, l’année 2015 s’est ouverte avec une crise économique qui peut vraiment faire tache d’huile que nous devons affronter avec beaucoup de sagesse et de maîtrise suite au crash financier dû à la chute du prix du pétrole avec ses conséquences. Ces différents aspects du contexte difficile font peser sur les finances publiques qui présentent de lourdes menaces pour les années à venir qui se traduisent trop souvent par des plans d’austérité que nous devons aussi supporter. La conjoncture impose un véritable outil d’analyses concrètes avec la mise en place d’une stratégie performante pour l’emploi, le financement des projets d’envergure, les pensions et les retraites, le dialogue social, l’inclusion sociale,…
Justement, l’abrogation de l’article 87 bis n’a rien changé et l’espoir des malheureux ouvriers est resté une éternelle chimère…
Le mouvement syndical doit se rappeler ces leçons et affirmer en permanence sa véritable identité et sa détermination indéfectible pour défendre les travailleurs. Pour nous, les résultats de l’abrogation de l’article 87 bis n’ont pas entraîné l’écho escompté et nous réitérons notre appel à l’intention de la centrale syndicale pour bien vouloir revoir les statuts des fonctionnaires du secteur de la fonction publique, intégrer l’ensemble des corps communs et ouvriers professionnels dans leur statut ou à défaut revoir la valeur du point indiciaire. Dans ce même contexte, je tiens à rappeler la série de propositions présentées lors de la dernière tripartite visant à asseoir une politique économique nationale efficace, créatrice de richesses et permettant de rompre avec la dépendance à la rente pétrolière. Sur ce, il faut envisager la mise en place de mécanismes énergiques pour encourager la relance des petites et moyennes entreprises, productives et créatrices de postes d’emploi. Notre syndicat insiste sur l’impératif de réhabiliter les entreprises nationales publiques afin de préserver les postes d’emploi, promouvoir le produit national et réduire la facture des importations. La conjoncture actuelle exige la diversification de la base économique nationale à travers la promotion des investissements dans l’industrie manufacturière, l’agriculture et le tourisme. Il faut identifier les lacunes et les dysfonctionnements qui entravent l’opération de promotion et de réhabilitation des entreprises productives et de débattre le nouveau projet de loi sur l’investissement et autres questions liées au foncier et aux crédits bancaires.
Entretien réalisé par Rabah Zerrouk