L’exercice de la politique par correspondance a impliqué un exercice langagier digne d’être mis sous les lorgnettes de Roman Jakobson. Dans cet exercice, l’Instrument à Percussion, que ses rivaux qualifient d’analphabète, passe pour un champion. D’ailleurs, c’est son génie langagier qui, d’un revers de main, balaie l’affirmation, selon laquelle l’appareil phonatoire du FLN n’a pas été à l’école.
On ne peut pas passer du langage de basse-cour à une diatribe romantico-maritime en y associant un grand classique de Abdelhalim Hafedh, sans avoir une maîtrise parfaite de la langue, un faible pour la chanson orientale et un contrôle du contexte et de la stratégie de communication. Le bonhomme est, donc, forcément instruit et cultivé. C’est en gros, ce sentiment qui est partagé par Kaci l’Angoisse, Da Militant et le vieux Dezdeg.
Sadiya n l’Euro, elle, ne pense rien. Elle ne sort pratiquement plus de chez elle, depuis la demande d’audience des 19 plus ou moins 4. Elle était occupée, avec son neveu, à rédiger une lettre. Elle a songé l’adresser, dans un premier temps, au président de la République. Mais craignant la défection du facteur, elle s’était dit qu’elle l’adresserait à Dieu. Mais comme à taddart il n’y a pas de mur de lamentation, cette boite postale ne reconnaissant aucun intermédiaire entre le créateur et sa créature, elle a décidé de la déchirer, avant que son petit fils ne lui suggère :
– Et si on l’adresser au petit papa Noël de la télévision ? C’est en décembre qu’on lui envoie les lettres.
– Mais le père Noël n’existe pas Briruc !
– Qu’est-ce que tu en sais ? Tu ne l’as pas vérifié comme tu as fait avec Dieu et le président de la République !
– Fais comme tu veux. Écris-là lui si ça t’amuse.
Briruc prend un stylo et se met à écrire :
«Cher petit vava Noël, Ne descend pas tout de suite du ciel. En bas, il fait froid, surtout le matin. Mais si tu descends quand même, n’oublie pas mes vœux. Alors je vais te les dire. Mais, je t’avertis tout de suite : mes souliers sont très petits pour tout ce que je vais te demander. Démerde-toi pour trouver une solution.
Voici donc cher père Noël mes vœux : ma part du pétrole même s’il atteint 10 dollars, une maison de 200 m2 pour chacun de mes cousins, la liberté de ne pas aboyer (ça nous l’avons) mais de dire et d’agir, une voiture pour mes 18 ans et accessoirement une blonde aux yeux verts pour la romance, des professeurs sans barbes dans nos classes, des instruments de musiques sans couacs pour nos cours de musique, des livres d’histoire sans qassam lerzaq, plus de vacances, un fauteuil roulant pour mon copain Ghilas, un poêle à mazout pour nanna Sekkura, des médicaments pour soigner le diabète de son mari et… beaucoup d’autres choses que tu devines, parce que le père Noël c’est comme Dieu, il sait tout.
Cher papa Noël, je ne suis pas vraiment un enfant. Nous, nous naissons adultes dans mon pays. Ce n’est pas comme en Finlande ou en Suède. Dans mon pays, nous naissons adultes et nous finissons enfants comme qui vous savez. Je doute que vous existez papa Noël. Moi qui ai presque tout perdu avant même d’avoir commencer quoi que ce soit, je n’ai rien à perdre à croire en vous. Alors si vous existez vraiment, exaucez mes vœux. Si vous trouvez que c’est beaucoup vous demandez, vous pouvez les oublier mais exaucez au moins celui-là : mettez des nez de clowns à nos politiques.
T.O.A