C’est vers dix-neuf heures que le rideau est tombé, samedi dernier sur le Festival du court-métrage de Béjaïa, avec un palmarès intéressant.
C’est en présence de la famille de Mohamed Hamlaoui, notamment sa femme, ses enfants et son frère, ainsi que du sénateur de Béjaïa, tout fraichement élu, Mohamed Bettache, que la cérémonie de clôture a été organisée. Des cadeaux ont été offerts à la famille, pour immortaliser cet événement, premier du genre. Le jury du festival a rappelé combien il était difficile de départager les concurrents. Cependant, les ces derniers se sont distingués par une certaine ouverture d’esprit et la richesse des thèmes abordés. Les prix ne sont distribués que de manière à encourager ces cinéastes. Plusieurs prix ont ainsi été créés à cette occasion. Il s’agit tout d’abord de la Mention spéciale du Jury qui a distingué Nassim Mecharfi de Béjaïa qui a réalisé «Black Hol in time», Lounis Yousri de Batna, avec son court-métrage ««I want my color» et Hamid Boudalia de Tiaret avec «Les rêves dans une valise». Le Prix du Jury a été décerné à Farid Noui de Sétif pour son «Séquence» et ex aequo avec Aissa Djouamaa de Souk Ahras. À noter que ce dernier, dans sa déclaration finale, a rappelé que son court-métrage a été refusé dans tous les festivals auxquels il avait proposé sa candidature. C’est dire qu’à Béjaïa, l’ouverture d’esprit n’est pas un vain mot. Concernant le Prix du Scénario, il faudrait attirer l’attention sur le fait que plusieurs des courts-métrages proposés étaient muets. L’absence de paroles n’implique pas forcément une absence de message, ni la légèreté de la mise en scène. Comme l’a d’ailleurs rappelé un des participants, le silence peut devenir un message en lui-même. Le jury a donc jugé que c’est le scénario d’Amine Khelfat de Msila qui méritait ce prix. Son court-métrage de dix minutes, intitulé «A Blind’s memory», relate l’histoire d’un non-voyant qui, une fois guéri de sa cécité était confronté à ses souvenirs d’aveugle. Une histoire très émouvante qui, avec un peu plus de moyens, aurait pu devenir un vrai long-métrage, tellement le thème était très intéressant et les capacités techniques du réalisateur, très prometteuses. Pour le Prix de la réalisation et de la mise en scène, Nassima Louail d’Alger a fait l’unanimité non seulement dans le jury lui-même, mais aussi parmi le public. Son court-métrage «Jusqu’au bout» relate l’histoire d’un jeune passionné de piano, et qui prend des cours à l’insu de son père qui lui interdisait d’approcher cet instrument. La persévérance du jeune homme le mènera jusqu’au bout de son rêve, et terminera dans un émouvant happy-end. Ce film aussi mériterait qu’un producteur s’y intéresse pour lui donner un avenir, car il a en lui le potentiel d’un grand film. Justement, les producteurs de cinéma ont brillé par leur absence, lors de ce festival. On dirait que ça ne les intéresse pas de découvrir de jeunes talents ou de connaître les potentialités que recèle la jeunesse de ce pays. Il n’y a aucun doute sur la réussite de ce festival. Hakim Abdelfettah, dans le cadre de la Maison de la culture, a réussi son pari d’organiser le premier festival du court-métrage amateur de Béjaïa. D’ailleurs, il n’y a qu’à regarder la provenance des concurrents qui sont venus de près d’une vingtaine de wilayas. Malgré le peu de moyens, la rencontre a été une grande réussite, de l’aveu même des participants. Cependant, il faudrait prendre le temps de la réflexion et de la critique. Malgré la richesse des thèmes abordés, il y en avait un qui était omniprésent. Il s’agit de la violence. Violence contre les enfants, violence contre les femmes, émeutes et violences du 5 Octobre 88 qui ont causé la mort d’un enfant, etc. Et il y a eu absence frappante d’un autre thème, l’amour. Comment, en effet, accepter le fait que les jeunes cinéastes, tous à l’âge du grand amour, aient évité d’aborder ce thème. Est-ce par tabou ? Ou bien est-ce simplement parce que les blessures ne sont pas encore guéries, et la page non encore tournée ? Page de violences et de douleurs, qui continue encore à faire souffrir le pays. Pourtant, cette génération n’a pas connu la décennie noire. C’est dire que l’on continue à trainer malgré soi, les séquelles d’un passé encore trop récent. Ce qui a aussi manqué à ce festival, ça a été comme l’a dit un des participants, l’absence d’ateliers, permettant aux uns et aux autres de parfaire leur technique, et de s’améliorer au contact des professionnels. Souhaitons à ce festival une longue vie, et espérons qu’à la prochaine édition, les moyens seront de la partie et les professionnels présents.
N. Si Yani

