… Et dans la joie et la communion à Ighil Ali !

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Comme il est de coutume, les habitants du village d’Ighil Ali, à l’instar de toutes les localités de la Kabylie, n’ont pas raté l’occasion de fêter le premier jour du printemps, même si c’était avec 5 jours de retard, à cause des dernières intempéries et cette « mauvaise » coïncidence du premier jour du printemps avec le dimanche 28 février 2016, premier jour de semaine. Appelée communément Amezwaru n tafsut, cette fête du calendrier agraire amazigh coïncide toujours avec le 28 février du calendrier grégorien. Eh bien, cette année, la fête du printemps est tombée le dimanche 28 février, premier jour de semaine, ce qui a obligé les ménages à reporter la célébration de cette fête pour vendredi dernier, qui a coïncidé avec la journée du 4 mars. Ainsi, en cette journée de vendredi passé le soleil et la joie étaient au rendez-vous! C’était les conditions idéales pour fêter Mager n tafsut (la rencontre du printemps). C’est ce qui a été fait, d’ailleurs, par les habitants de ce beau village qui tient encore fièrement à ses vieilles maisons traditionnelles, qui rajoutent une beauté mystique à ce village de Taos et Jean Amrouche. Rendez-vous donc a été donné à Akheyar, un lieu habituel pour la célébration de ce genre de festivité lequel est situé en contrebas du village, et qui est en fait, un petit promontoire d’où l’on pourrait dominer des tas de reliefs et de villages que l’on aperçoit de loin, comme Zina, Takorabt et bien d’autres. Les familles affluaient en grappes à Akheyar, et au fur et à mesure le lieu se remplissait pour ne contenir que difficilement un monde fou et surtout en liesse. C’est une tradition exceptionnelle, où les gens qui ne se sont pas vus depuis longtemps se revoient le temps de manger le fameux plat préparé à l’occasion que l’on appelle, ici, à Ighil Ali, tchiw-tchiw (ailleurs Ameqful). C’est en fait du couscous mélangé aux légumes et le tout est cuit à la vapeur, avec des œufs durs. Ce plat ne se fait pas sans le fameux Aderyis, une plante sauvage à qui l’on attribue mille et une vertus. Ce sont ses racines qui sont mises dans l’eau bouillante de la marmite pour « imprégner » de sa saveur le couscous mélangé avec les légumes. Tchiw-tchiw est ainsi servi dans la nature, à Akheyar, avec des œufs durs et de la viande séchée, Achedlouh, dans une ambiance indescriptible! Après s’être empiffrées de ce succulent plat millénaire, à qui nos valeureuses femmes tiennent avec jalousie et abnégation, les femmes comme à l’accoutumée ont organisé l’imparable Urar n laxla (chant dans la nature) avec le bendir comme au bon vieux temps. Les tambourinaires étaient aussi de la partie, puisqu’ils ont agrémenté les présents avec les airs au rythme de Lghidha et des tambours. C’était une fête merveilleuse, où il n’y avait de la place qu’à la joie, la danse et les youyous. Pour leur part, les enfants se délectaient des friandises et des gâteaux qu’ils ont apportés dans leurs petites corbeilles (Tiqecwalin). C’était en quelque sorte leur fête à eux. Ils attendaient impatiemment cette journée pour aller à la rencontre du printemps, car il symbolise la renaissance et la jouvence. Certes, il y a beaucoup de rites accompagnant cette fête agraire qui ont disparu, mais le fait de la célébrer encore donne déjà la chair de poule, en particulier, à ces défenseurs des traditions ancestrales kabyles! Sacré Amezwaru n tafsut !

Syphax Y.

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