«L’UMMTO n’est pas une salle des fêtes»

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La commission éducation et enseignement supérieur de l’assemblée populaire de la wilaya de Tizi-Ouzou poursuit son débat sur l’état des lieux qui prévaut à l’université Mouloud Mammeri et sur les perspectives envisagées pour sortir cette dernière de la situation conflictuelle, dans laquelle elle se noie depuis des années, et surtout prendre des décisions à même de redorer son blason et de lui faire retrouver son lustre d’antan et d’en faire un pôle de rayonnement du savoir, de la science, de la recherche et de l’intelligence.

À cet effet, la commission a invité le nouveau recteur de l’UMMTO, M. Derridj Arezki, nouvellement installé dans ses fonctions. Lors de leurs interventions, les membres de la commission ont mis le doigt sur la plaie et ont, à l’unanimité reconnu l’urgence de faire le nécessaire pour permettre à l’université de jouer pleinement son véritable rôle. Tous les aspects de l’université ont été passés en revue allant du côté infrastructurels, des équipements, du mobilier, de la saturation et surtout le volet pédagogique qui s’est taillé la part du lion. M. Derridj, le recteur, en fin connaisseur de l’historique et de la situation actuelle de l’UMMTO, puisqu’il a fait la quasi majorité de sa carrière dans cette université a indiqué d’emblée : «notre université est un nouveau né puisqu’elle n’a que 39 ans d’âge mais elle est très importante, car elle compte à présent 55 000 étudiants, 2 200 professeurs et 2 000 ouvriers. C’est une ville dans une ville. Nous avons une maga université avec 7 sites, mais un seul recteur et un seul secrétaire général, et en plus, les sites sont dispersés, c’est ce qui complique davantage sa gestion. Il aurait fallu la diviser et construire d’autres universités comme cela s’est fait dans d’autres wilayas mais nous ne l’avons pas fait. Maintenant, il n’est plus possible de le faire à cause de la conjoncture actuelle que traverse le pays. Mais, Il faut se préparer, en attendant l’amélioration de la santé financière de notre pays». E parlant de certaines facultés comme Tamda et Hasnaoua 2, le recteur a signalé : «La faculté de Tamda est isolée, elle se situe à 15 kilomètres de la ville de Tizi-Ouzou, une faculté implantée en zone rurale avec tout cela engendre comme contraintes, l’insécurité a sévi pendant longtemps avant l’implantation d’un commissariat. De loin, Tamda parait comme un joyau, mais à l’intérieur, il y a beaucoup de malfaçons. Ce qui rend sa gestion toujours difficile. Pour hasnaoua 2, c’est l’enclavement. Pour y accéder, déjà c’est difficile. Il faut prévoir un nouveau plan d’accès. Pour la faculté Biomédicale, il faut complètement la raser. Elle est construite en préfabriqué par des espagnoles pour une durée de 25 ans mais maintenant les délais sont dépassés. La faculté d’Oued Aissi était un ancien centre pour handicapés, Hasnaoua était un ancien lycée et Boukhalfa, un ancien centre de formation professionnelle. C’est comprendre que les facultés, du point de vue infrastructure, n’ont de faculté que de nom. Ailleurs, chaque faculté a toutes les commodités requises, tous les moyens et tout son personnel».Concernant les effectifs, le recteur a annoncé : «Nous comptons 53 000 étudiants en 1ère et 2ème cycle et 2 000 au 3e cycle. Pour la prochaine année universitaire, nous nous attendons à l’inscription de 12 000 nouveaux étudiants. Le nombre de diplômés qui sortiront est de 7 000, il faut aussi préciser que parmi ces diplômés beaucoup resteront pour poursuivre leur master. En tout, nous nous attendons à un effectif total de 60 000 étudiants. Nous aurons un manque d’au moins 4 000 places pédagogiques d’où l’importance de livrer les 7 000 places pédagogiques en cours de réalisation avant la prochaine rentrée, sinon ce sera le blocage». À sujet, des événements qui ont ébranlé l’UMMTO, ces dernières semaines, M. Derridj n’ira pas du dos de la cuillère.

«Il est inadmissible qu’on laisse des gens utiliser nos étudiants à des fins séparatistes»

Concernant toutes les mauvaises habitudes, le foisonnement des galas artistiques et toutes les luttes politiciennes qui dévient l’université de sa noble mission, le recteur a été catégorique : «La franchise universitaire ne doit pas servir les semeurs de troubles et ceux qui ont des plans et des objectifs douteux. Nos parents ont défendu l’unité et l’intégrité de la nation et nous ferons tout autant. Il est inadmissible qu’on laisse des gens utiliser nos étudiants à des fins séparatistes. Le morcèlement de l’Algérie est inadmissible et non viable. Un comité d’éthique et de déontologie est mis en place pour discuter de tout cela. S’il y a chaos, il est lié au manque de dialogue. Nous attelons justement à instaurer un dialogue avec tous les concernés et c’est, d’ailleurs, à ce titre que nous venons de solutionner plusieurs problèmes. Mais je ne prétends pas pouvoir faire tout et tout seul. Je compte déjà sur l’aide des élus, des administrateurs de la wilaya et sur tous les acteurs de la communauté universitaire. Il nous faut déjà 7 000 places pédagogiques pour la prochaine rentrée». Au sujet du recrutement des professeurs pour l’année prochaine, M. Derridj a préconisé : «Nous allons, dès à présent, lancer la campagne de recrutement pour avoir les meilleurs professeurs. Les critères de recrutement seront connus et les listes des professeurs recrutés seront affichées. Le seul critère qui sera pris en compte sera celui de la compétence. Plus jamais de magouille et de manigance. Ulach Khalik Di Tessirt. Nous allons aussi tracer une feuille de route concertée et il y’aura, comme au bon vieux temps, des lignes rouges à ne pas dépasser pour tout le monde». Le recteur s’attèlera aussi à expliquer le système classique et le LMD et à insister sur les formations professionnalisantes en adéquation avec la demande du marché économique pour éviter de former des cadres chômeurs : «Il faut former des masters professionnalisant dans différents domaines, comme l’apiculture, l’agriculture, la gestion et la valorisation des déchets, dans la filière lait et la radiologie en interface avec le monde économique». Pour terminer, M. Derridj a reconnu : «Les problèmes sont immenses. Toutes les facultés ont besoin d’argent et celui-ci vient à manquer. La conjoncture économique est ce qu’elle est. Ce n’est pas pour autant que nous allons rester les bras croisés et assister au déclin de notre université. Quand on aime les enfants des autres, on ne pourra jamais tricher. Il faut changer les mentalités. Mouloud Mammeri, s’il en revenait de l’au-delà il demandera sans doute d’y retourner immédiatement. L’université Mouloud Mammeri n’est pas une salle des fêtes. Basta au folklore. L’université doit revenir à ses lettres de noblesses de sciences et de savoir. Les fêtes et les meetings ont leurs propres espaces. Mon parti c’est l’Algérie et ma cellule c’est l’université Mouloud Mammeri».

Hocine T.

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