“Le cinéma coule dans mes veines”

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Rien ne le prédestinait à devenir un jour acteur dans des films kabyles.

Mais avec la multiplication de boîtes cinématographiques après l’ouverture de l’audiovisuel, Moudjari Mohamed, né dans les années 40 dans un village de quelques dizaines d’habitants à Aït Yahia Moussa, et après que son père tombât au champ d’honneur en 1958, fut contraint de subvenir aux besoins de sa famille. Tout jeune, il exerça différents petits métiers. Au début des années 70, Dda Moh devint couturier à Oran et c’est dans cette ville que le désir de jouer un jour dans un film naquit en lui. Dans cet entretien, ce sexagénaire nous confie son souhait d’aller plus loin dans sa passion pour le cinéma comme il en rêve depuis sa tendre jeunesse.

La Dépêche de Kabylie : Dda Moh, comment a commencé votre aventure dans le domaine cinématographique ?

Moudjari Mohamed : Avant de vous raconter mon histoire avec le cinéma, je tiens à remercier M. Rabah Dichou qui m’a donné mon premier rôle. Je suis fils unique et fils de chahid. Et tout le monde sait combien les veuves de chahid, comme ma mère, ont souffert. Ma mère s’est retrouvée seule à un très jeune âge. Dès que j’ai pu, j’ai dû travailler pour l’aider. Après différents petits métiers, je devins marchand ambulant. Dès l’âge de la majorité je quittai mon village pour Oran où j’exerçai comme couturier.

Et c’est dans cette grande ville que vous avez commencé à aimer le cinéma ?

Tout d’abord, je découvris cet art dans les salles de cinéma. Mais, ce qui me fit penser à devenir acteur, c’est lorsque j’ai assisté au tournage d’une séquence des «Vacances de l’inspecteur Tahar». C’était pour moi un déclic. Cependant, faute de moyens et de connaissances, je ne pus réaliser ce rêve que quarante ans après.

Ensuite…

Il a fallu attendre 2007 pour qu’enfin M. Rabah Dichou me contacte pour un rôle dans le film «Tidets itseqrahen», (La vérité amère). J’étais vraiment au comble du bonheur. Ensuite, il me confia un rôle plus important dans «Tasaruts n’ Tuderth» (La clé de la vie). Peu à peu, je découvrais que cet univers était le mien. Le cinéma coule dans mes veines. Et je ne le fais pas pour l’argent, mais parce que c’est ma passion et j’aime le public qui me le rend bien.

Et vous avez atteint le summum avec «talufth» (C’est un problème), n’est-ce pas ?

A vrai dire, ce film est comme les autres. Seulement, le surnom de Deguedagui m’a propulsé au devant de la scène. D’ailleurs, l’histoire de ce film relate exactement ma vie : mes espoirs et mes échecs. Je peux dire que c’est un film autobiographique. Et le nom du personnage que j’y ai interprété me colle depuis à la peau. Même en dehors des plateaux, tout le monde m’appelle Deguedagui. J’en suis très fier et cela m’amuse beaucoup. Et je dois reconnaître que ce n’est pas seulement un rôle dans un film, c’est vraiment moi.

Vous avez joué aux côtés de grandes figures du cinéma algérien…

Effectivement. Dans «Ouatastamir El Hayet» (Et la vie continue) par exemple, j’ai joué aux côtés de Bahia Rachedi. Et dans beaucoup d’autres productions. Je citerai «Anghigh ourezrigh( j’ai tué sans le savoir), «tamaghra» ( la fête) , «tayri thufirth» ( l’amour caché), «macci d’nek» (ce n’est pas moi)

Y a-t-il un autre projet dans lequel Deguedagui sera présent ?

Evidemment, si l’artiste ne joue pas, c’est une étoile qui meurt. Cette fois-ci, mon réalisateur m’a proposé un rôle plus important dans «Assirem de Deguedagui» (L’espoir de Deguedagui). C’est mon scénario. Et j’espère qu’à la sortie de ce film, le public sera très satisfait parce que ce merveilleux public a besoin de rire. Basta la peur, le deuil et autres malheurs. Je souhaite juste que notre réalisateur et producteur Rabah Dichou, qui est en difficulté recevra l’aide dont sa boite a besoin. Tiregwa Film, c’est son nom, participe beaucoup à la promotion du cinéma amazigh, elle a besoin du soutien de l’Etat.

Un mot pour conclure ?

En dépit des années qui passent, je rajeunis de jour en jour, parce que la passion que j’ai pour le cinéma me donne la force. Je veux aller loin dans cette aventure. Le public veut qu’on lui propose de nouveaux produits puisés de notre terroir et de notre société. Tout cela, c’est pour la sauvegarde de notre culture surtout que les menaces sont nombreuses et la concurrence est rude. Je tiens également à vous remercier pour m’avoir ouvert les colonnes de votre journal pour me présenter au public algérien.

Entretien réalisé par

Amar Ouramdane

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