Voyage au cœur de l’horreur

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Il a suffi que Lynda Touni, une femme algérienne, qui a grandi à Antony, dans la banlieue parisienne, tombe amoureuse de l’Indochine pour qu’aussitôt, les héros de sa fresque soient pris dans un tourbillon de poussière et d’épices, de défis et de coups d’éclats…Commencée dans la grisaille de l’occupation, cette saga s’achève sous le soleil radieux de l’indépendance retrouvée. Par la grâce de l’écrivain, on entend à nouveau la musique de la langue vietnamienne, avec ses mots à demi modulés, aigus, hachés de brefs soupirs. On revoit l’habit blanc des femmes de Saigon et de Hanoï, et leur pas énigmatique et fier, à l’érotisme impalpable, qui faisait battre le cœur des hommes. On retrouve dans l’amour des hommes, la violence des sentiments qui accompagnent le voisinage de la mort. Quand tout peut s’arrêter à chaque instant, l’amour, la trahison et la fraternité ne sont plus seulement des mots. Ils pénètrent dans la chair.“Ultime obstacle” est un livre engagé au sens où chacun des héros va jusqu’au bout de ses choix. L’écrivain affronte sans ciller les horreurs de la guerre. Elle n’en distribue pas la paternité de la même façon que dans le souvenir de certains acteurs et témoins.Camarades ou adversaires, la guerre d’Indochine n’a fait que des rescapés, blessés par la démesure de ce pays. Ce livre donne le vertige à force de brusques retournements.Au bout de sa lecture, on reste étourdi par tant de forces contraires. Le dernier mot revient à l’amour, la seule chose, avec la beauté qui survivent aux naufrages. Quand tombe l’“ultime obstacle”, il ne reste plus que les âmes errantes, les amoureux et les écrivains pour parler du passé.

Nacer Maouche

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