«L’organisation est à mettre en place»

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Dans cet entretien, l’expert français dresse son constat après quelques visites sur le terrain. Il relève avant tout un manque d’organisation et de communication directe entre les acteurs du secteur.

La Dépêche de Kabylie : Peut-on connaître l’objet de votre visite à Tizi-Ouzou?

M. Jacques Huser : Notre visite s’inscrit dans le cadre de la coopération Algéro-Française. Les relations entre nos deux pays, notamment dans le secteur agricole, sont excellentes et nous tenons à poursuivre le chemin ensemble pour le bénéfice des deux nations. Nous avons répondu à l’invitation de l’APEM de Tizi-Ouzou pour voir comment conjuguer nos efforts et les actions à entreprendre pour développer les filières de l’apiculture et de l’oléiculture à bases de nos expériences communes dans un premier temps. Les similitudes entre Tizi-Ouzou et Marseille sont énormes, d’où l’intérêt que nous portons à ce partenariat.

Vous avez déjà visité quelques exploitations, quelles sont vos premières constatations ?

Nous avons effectivement relevé quelques remarques et constatations. À commencer par le manque de rencontre et de dialogue entre les agriculteurs d’une part, et entre les organismes concernés et les agriculteurs d’autre part. Les discussions que nous avons eues avec les professionnels,- ce qui leur a permis de s’exprimer, de parler de leurs problèmes et de proposer des solutions-, ont permis à tout le monde de découvrir ce que font les autres. C’est vous dire que pour avancer, le contact direct et le dialogue sont d’une importance capitale. Nous avons aussi constaté qu’il y a un manque d’information et de formation. Les contraintes administratives et celles relatives à la commercialisation et à la vente du produit ont été aussi abordées avec nos partenaires Algériens. Nous avons aussi rencontré la présidente par intérim de l’APW de Tizi-Ouzou, Mme Bouaziz Djamila, qui est disposée à œuvrer dans le sens de l’amélioration de l’économie de montagne et du développement local. Les services agricoles concernés sont également parties prenantes, ce qui augure un bon avenir.

Que faut-il faire pour justement rentabiliser ces deux filières ?

Pour avancer, il faut, à mon sens, beaucoup d’organisation. La création de coopératives spécialisées ou polyvalentes est tout indiquée. J’ai remarqué qu’il y a beaucoup d’engouement pour l’oléiculture en Kabylie, il faut sauter sur l’occasion et c’est le moment d’en profiter. Toutefois, il faut mettre les mécanismes efficients pour la labellisation du produit. Le produit actuel répond au goût des consommateurs locaux. Il faut l’améliorer et le stabiliser pour répondre aux normes internationales afin de le labelliser et pouvoir ainsi assurer son entrée sur le marché mondial. Il faut donc au préalable définir un cahier des charges incluant la qualité de l’huile qu’on veut avoir, en fixant la façon culturale, la cueillette, la transformation, le conditionnement, et inclure aussi la commercialisation. Ce cahier des charges, une fois élaboré pourra être réalisé par les instances régionales et nationales en collaboration avec les associations du secteur. Il faut aussi penser à l’introduction des moyens d’information, de sensibilisation et de vulgarisation et multiplier les conférences à travers les coopératives et les assemblées élues comme c’est le cas de l’assemblée populaire de la wilaya. Tout cela, bien sûr, ne sera performant que si un plan de formation par la voie de l’apprentissage, qui inclura aussi la formation des adultes, est mis en place. La formation devra aussi développer les sous produits du miel et de l’olive.

Concernant l’aspect social de ces deux activités…

J’ai été en effet, séduit par l’aspect social de ces deux activités. Nous avons rencontré un exploitant privé à Ouacif qui m’a vraiment impressionné. Il avait son potager, quelques bêtes d’élevage, un petit rucher et une oliveraie, un couple de vieux qui s’auto-satisfait. Je pense qu’en Kabylie, ce genre de paysans doit être encouragé et soutenu. Nous avons aussi vu de belles initiatives à Aït Boumahdi, Yattafen, Iboudrarène, Yakouren, Ifigha, Béni yenni et Zekkri, pour ne citer que ces localités. L’association des agriculteurs «asefru» fait aussi de belles choses dans le domaine agricole et artisanal. Franchement, je suis convaincu que Tizi-Ouzou a les potentialités et les moyens qu’il faut pour avancer.

Quelles sont les actions concrètes et immédiates retenues après cette mission ?

Nous avons déjà installé deux petites unités au niveau de la coopérative agricole polyvalente de la wilaya de Tizi-Ouzou. Il s’agit d’unités de conditionnement et de traitement de l’huile d’olive et de miel. Nous avons aussi prévu l’installation d’un rucher école de 250 unités à Oued Aissi, comme nous avons identifié quatre périmètres oléicoles afin d’améliorer les techniques culturales de l’olivier au bénéfice des adhérents. Dans le cadre toujours de la coopération entre nos deux pays, des professionnels français et algériens s’attèleront conjointement à assurer des stages de formation ici en Algérie et chez nous en France. Il est aussi question d’un programme de formation et de journées d’études pour l’ensemble des participants. Un réseau d’associations est identifié pour être formalisé en vue de toucher tout le territoire de la wilaya de Tizi-Ouzou.

Un dernier mot

Je reconnais que je ne me sens pas dépaysé en Algérie et spécialement à Tizi-Ouzou. Je me sens comme dans mon pays. La Kabylie est une région impeccable et dotée de potentialités appréciables. Nous devons tous travailler main dans la main pour aller de l’avant ici en Algérie comme chez nous en France. Je remercie la Kabylie et les kabyles pour leur accueil chaleureux et leur hospitalité légendaire. Merci également à votre quotidien la Dépêche de Kabylie qui nous a permis de nous exprimer.

Entretien réalisé par Hocine Taib.

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