Les figues à 350 dinars

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De l’avis de tous, «la saison des figues est très en retard cette année». Habituellement, les paysans trouvent les premiers fruits dès mi-juillet.

Pour le moment, hormis les figues fleurs, les gens attendent toujours de se délecter de «lekhrif». On les a vues, pour la première fois, lundi dernier, non pas sur les arbres mais dans des cagettes alignées aux côtés des nectarines et du raisin. En effet, revenant du marché de gros, un vendeur de fruits et légumes a étalé quatre caisses de figues d’un type qu’on appelle communément chez nous «avousekour». Réticents au départ, les gourmands s’approchent par la suite pour en demander le prix, avant d’en acheter. Ils sont bientôt imités par d’autres que le prix est loin de rebuter.

A 350 dinars le kilo, le stock est vite écoulé. «Je ne pensais pas que les clients allaient être intéressés à ce point par les figues au prix fort», nous dit le commerçant qui regrette de ne pas en avoir ramené beaucoup plus. Peu habitués à voir ces fruits sur le marché les présents ne manquent pas de rappeler que «du temps où les gens travaillaient la terre, on ne manquait de rien. Tous les champs entourant la ville étaient des figueraies prospères. Les champs sont maintenant abandonnés, recouverts de ronces. Ils ne peuvent donner que des mures (thizoual)».

Ce n’est pas tant le prix qui fait réagir les vieux paysans de la région mais plutôt le fait d’introduire des figues venues d’ailleurs (de Blida actuellement), sur le marché local. «Personne n’eût pensé de mon temps que les villageois achèteraient un jour des figues fraîches au marché. Ceux qui en avaient, à cette époque, en donnaient aux démunis qu’on invitait même à pénétrer dans nos champs pour les cueillir de leurs propres mains», rappelle un vieil homme. Les temps changent, les mœurs aussi. Nous n’avons de cesse de rappeler la menace qui pèse sur les symboles de la Kabylie. Le cerisier, anéanti par le CAPNOD, et le figuier peu travaillé ou peut-être atteint lui aussi d’un mal qu’on ignore, dépérissent sans aucune réaction des pouvoirs publics alors que la régénération intensive du fruitier de montagne s’impose.

A.O.T.

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