La figue, ce fruit du terroir, est mûr à point. Les figueraies grouillent de monde pour sa cueillette. Malheureusement, à l’inverse des figues de barbarie bien protégées par une épaisse peau épineuse de surcroît, la figue fraîche est très sensible n’étant protégée que par une peau fine enduite d’une substance sucrée et collante qui attire toutes sortes d’insectes qui meurent en se posant sur le fruit qui est un véritable piège pour les mouches et autres moustiques. Il accroche également toutes sortes d’impuretés et de poussières qui flottent dans l’air, d’où le danger de le consommer directement après la cueillette. Il est conseillé en effet de passer la figue sous un filet d’eau et de la rincer soigneusement, sinon la peler carrément, une opération qui se fait à main nue sans utilisation de couteau. Les premiers cas d’intoxication ont été enregistrés cette année dans le village Aggach dans la commune de Saharidj. Plusieurs personnes ont été prises de vomissements, de diarrhées et de vertiges après avoir mangé des figues fraîches. Le fruit est cueilli à la main, sans utilisation de perche, avant d’atteindre sa pleine maturité. Il produit une sève qui contient une substance active qui provoque de fortes démangeaisons et des boursouflures sur la peau. Aussi, la meilleure façon d’éviter toutes ces contraintes est de s’équiper d’un seau d’eau et d’y plonger les fruits immédiatement après la cueillette pour les débarrasser tant des impuretés et des insectes que de leur sève. A l’inverse de la figue de barbarie qui provoque des constipations quand il y a consommation exagérée, la figue fraîche, elle, provoque des diarrhées notamment quand elle est consommée chaude, d’où la raison pour laquelle nos aïeuls se rendaient très tôt le matin dans les figueraies, avant le lever du soleil, pour cueillir le fruit encore frais.
Le conditionnement des figues se fait de façon naturelle
Dès la deuxième semaine de l’arrivée à maturité des figues, des fruits commencent à s’assécher. Une bonne partie tombe par terre et l’autre reste accrochée aux branche jusqu’à déshydratation complète. La tâche du ramassage des figues est traditionnellement confiée aux femmes qui partent de bonheur dans les figueraies en groupes pour profiter de la fraîcheur du matin. Elles sont équipées de grandes corbeilles, confectionnées avec des roseaux, qu’elles portent sur le dos, et d’une gaule ou perche pour faire tomber les figues sèches encore sur les branches. Une fois cette opération terminée, les femmes en remplissent les corbeilles et reviennent lourdement chargées, la grande corbeille sur le dos, ou en équilibre sur la tête, et une autre, plus petite, dans chaque main. Pour l’assèchement complet des figues, les agriculteurs aménagent un endroit à proximité de la maison où ils déposent des claies (idhenyen, idhni au singulier). Ces claies sont aussi fabriquées avec des roseaux fendus dans le sens de la longueur. Leurs supports ou leurs cadres sont des branches de laurier rose. Les femmes étalent alors la récolte du jour sur ces claies, en forme de nattes bien exposées au soleil. Cela doit durer de trois à quatre jours pour un assèchement complet du fruit. Une fois cette opération terminée, elles procèdent à la sélection des fruits en trois séries : le premier choix est destiné aux invités ou aux diverses fêtes, le deuxième choix à la consommation quotidienne et enfin le troisième choix, de moindre qualité est lui destiné aux animaux domestiques, toutes espèces confondues. Pour le conditionnement, la récolte des figues est entreposée dans de grandes jarres en terre battue, Akouffi, lequel est fabriqué par les femmes qui s’entraident pour lui donner un volume maximum qui peut contenir jusqu’à 2 quintaux du fruit. L’akouffi, qui est posé dans un coin de la pièce commune, est doté d’un petit trou à sa base, appelé asenfou, par lequel on prend les figues en y introduisant une seul main et qu’on rebouche à l’aide d’un chiffon. L’Akouffi est aussi doté d’un couvercle confectionné avec la même matière en terre battue, un couvercle lourd et hermétique, sachant que les figues ne doivent pas être exposées au courant d’air ou à l’humidité qui causeraient des moisissures et rendraient le fruit trop dur. Dans l’akouffi, la figue sèche peut garder sa mollesse toute une année, à condition bien sûr que les règles de stockage soient bien respectées.
Oulaid Soualah