Lumière sur la problématique des migrants

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Pour la 4ème journée des Rencontres Cinématographiques de Béjaïa, avant-hier jeudi, la Cinémathèque de la place Gueydon a accueilli un grand public.

Ce fut une journée consacrée à la problématique de l’émigration et au drame des migrants. En début d’après-midi, un film libanais a été projeté sur l’écran géant de la cinémathèque. Géographies, c’est son titre, raconte l’histoire d’une famille arménienne qui a passé sa vie, de génération en génération à se déplacer, à émigrer pour différentes raisons. Depuis le seizième siècle, cette famille n’a pu trouver le repos, occupée qu’elle était à chercher un ailleurs où elle se sentirait en sécurité. Ce fut particulièrement le cas au début du vingtième siècle où elle a dû fuir l’Arménie et où l’armée ottomane s’est mise à massacrer la population, commettant un génocide que le gouvernement turc se refuse, encore aujourd’hui, à reconnaitre. Un million et demi de morts, hommes femmes et enfants ont trouvé la mort, à quelques années à peine de la chute de l’empire et de sa dislocation. Cette famille a vadrouillé longtemps avant de s’établir au Liban, après avoir fait un séjour en Egypte. Le film est une suite d’images fixes ou animées. Très peu de visages et aucun dialogue. Seulement la voix off d’une femme qui raconte en arménien, avec sous-titrage, l’histoire de sa famille. Cela rappelle le livre d’Amin Maalouf, lui aussi Libanais, qui raconte l’histoire de sa famille : «Nous n’avons pas de racines… Nous avons juste des origines», y écrit-il. Sa famille n’a pas eu le temps de prendre racines nulle part. Lui-même qui a fini par s’installer en France. En soirée, deux films ont été programmés. Un court-métrage et un autre de plus d’une heure et demie. Le premier, Ennemis intérieurs, de Salem Azzazi, raconte l’histoire d’un émigré algérien en France qui demande sa naturalisation pour devenir citoyen français. Après enquête, la préfecture le convoque pour un entretien. Suit alors une confrontation entre l’Algérien et le chargé de l’enquête. Les choses dégénèrent vite, puisque ledit entretien se transforme en interrogatoire. Le candidat à la naturalisation est suspecté. Il avait, pendant un temps, fréquenté le milieu islamiste, avant de s’en retirer. L’officier de l’administration veut en savoir plus. Il lui exigea les noms des personnes qui participaient aux réunions plus ou moins clandestines du mouvement islamiste. L’émigré est indigné. Cédera-t-il aux pressions pour l’obtenir le sésame ? Par la suite, la Belge Bénedicte Lienard est venue en personne présenter son film intitulé Le chant des hommes. Un groupe de migrants prend d’assaut une église en Belgique, avec plus ou moins la complicité du prêtre catholique, et s’y installe. Vingt-deux nationalités sont représentées dans ce groupe. Des Tchétchènes, Irakiens, Iraniens, Marocains, Tunisiens… Ils entament une grève de la faim pour exiger du gouvernement belge une carte de séjour. Pendant quatre-vingt-quinze minutes, les spectateurs suivent la souffrance de ce groupe de migrants, ayant fui leurs pays pour des raisons différentes, mais souvent liées à la vie et la mort. L’actrice principale, une Iranienne, rappelle que dans son pays, on torture même les femmes enceintes. Tout autour de cette misère, se développe un trafic. Des gens qui vendent des papiers, des rêves… La réalisatrice rappelle que ce genre d’actions, les grèves de la faim, aboutissent trop souvent à la mort de ceux qui y recourent. Les gouvernements sont devenus insensibles à ce genre d’actions. La presse même n’y prête plus attention. Il y a de plus en plus de demandeurs d’asile et l’Europe n’a pas encore trouvé le bon moyen pour y répondre. «Il faudra trouver une réponse à ce drame», dira la réalisatrice. La question de l’émigration est des plus complexes et sa programmation à ces quatorzièmes Rencontres Cinématographiques de Béjaïa aura le mérite de l’avoir abordée pour engager une réflexion à ce sujet. N. Si Yani

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