Aujourd’hui âgé de 57 ans, du signe zodiacal du poisson, Hamid est dans son environnement en cette « douce France » chère à Charles Trenet et Rachid Taha.A Paris depuis l’Année de l’Algérie en France en 2003, il a d’abord donné plusieurs représentations de la pièce « le Journal d’une femme”, une adaptation libre du metteur en scène français Antoine Caubet, tiré du roman de Rachid Boudjedra intitulé « La pluie », qui met en scène la difficulté de vie d’une femme médecin, devenue insomniaque par la force des choses. Une intellectuelle qui vit son quotidien dans la banalité, et qui, un jour prend conscience de sa situation, décide de se remettre en cause, prend en main sa recherche pour aller à la rencontre de sa liberté individuelle et spirituelle, dans un monde de préjugés masculins. Rôle intense qui normalement devait être confié à une comédienne, mais le pari d’ Antoine Caubet est de choisir Remas, le retraité du T.N.A, qui s’en est tiré à merveille, dans le rôle de ce personnage ambigu, qui au fond peut s’adapter à tout un chacun ou chacune, dans ce genre de condition humaine.Affichée avec succès à l’Institut du Monde Arabe de Paris, puis en tournée à travers les planches des théâtres français, le « feeling » fut trouvé et assumé entre le metteur en scène et le comédien algérien, pour le remettre en course dans une nouvelle production de la compagnie « Cazaril », avec « Les fusils de la mère Carrar » de Bertolt Brecht où Remas interprète deux rôles : le blessé et le Padre. Après un rodage sur les scènes des Centres dramatiques, qui peuplent toutes les régions de France, cette fresque théâtrale écrite en 1937 traite des soi-disant démocraties européennes qui refusaient d’aider la République espagnole attaquée par le soulèvement franquiste,au nom de leur sacro-saint principe politique, termine en beauté la saison 2005 au théâtre Gèrard Philippe de Saint-Denis où elle est restée à l’affiche durant un mois. »C’est une pièce datée, que Brecht a écrite dans un contexte historique bien précis(…), j’ai eu la surprise de trouver dans ce texte bien plus qu’une leçon politique. C’est le torrent de l’histoire qui entraîne tout sur son passage(…) », dit le réalisateur français.Hamid Remas est à sa troisième oeuvre, toujours avec Antoine Caubet ; feeling ou coup de foudre,on ne sait que dire. « Chantier Naval » est le titre d’une nouvelle création, due à Jean-Paul Quéinnec, un jeune auteur contemporain, dont les répétitions sont toujours en cours. La première de « Chantier Naval » est prévue pour le 28 février au théâtre de Dijon, et après cette ville, ce sera au tour du théâtre « des Bernardines » de Marseille d’accueillir la troupe de Caubet. Mais notre comédien ne s’est pas limité seulement à jouer les oeuvres de ces auteurs renommés. Avec Ali Salmi, chorégraphe danseur et directeur artistique, ils ont mis en scène « kelb, unis par le lien de sang et du mensonge », un huis clos chorégraphique et dramatique pour deux corps, dont le titre original est « La chose aux yeux mouillés » puisé du recueil « De bonnes nouvelles d’Algérie » de Chawki Amari dont les lecteurs du journal El-Watan apprécient la causticité de la satire et de l’ironie.Cette pièce chorégraphique met face à face deux Algériens de sang -Hamid Remas et Ali Salmi- qui voulaient « renouer avec un pays ou plutôt avec une ville: Alger la blanche, Alger la bien gardée, Alger l’historique de « La Bataille d’Alger » (…). Dans ce huis clos, Kelb, le bâtard, le chien…, nous accompagne, nous habite. Notre gardien, notre bourreau, notre frère (…) ». Fin de citation de la tirade présentée par les deux interprètes.Ecrire sur nos artistes établis en France – ils sont nombreux – n’est pas chose aisée, parce que trop de questions, trop de demandes nous envahissent et le doute s’empare autant de l’interviewé que de l’interviewer.Peut-on se permettre de marginaliser ces artistes par des mises à la retraite ou par des faux-fuyants analogues et dire ensuite, dans des discours mielleux, que l’Algérie a besoin de tous ses enfants… Est-ce un euphémisme… ou une réalité tangible ? Ou bien faudrait-il se contenter de ce vieux proverbe qui enseigne à qui veut y croire que « nul n’est prophète dans son pays » ou bien de cet autre qui affirme : « Ubi bene, ibi patria » : Où l’on est bien, là est la patrie » ?.
Correspondance particulière de Ferradi Bahieddine
