Discours de Abdelaziz Bouteflika

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« Monsieur le Secrétaire Général de l’UGTA, Chers frères, chères soeurs travailleurs, Mesdames, Messieurs, C’est avec un plaisir particulier que je m’associe, au nom de la Nation, à la commémoration du 50ème anniversaire de la création de l’Union Générale des Travailleurs Algériens. C’est un réel motif de joie que de vous rencontrer en ce grand jour pour commémorer un évènement marquant dans le parcours de notre peuple, une date importante de l’Histoire de notre pays, qu’il s’agisse de notre combat contre le colonialisme pour le recouvrement de notre souveraineté nationale, ou de notre oeuvre d’édification d’un Etat moderne, fort et prospère. Je me dois de saisir cette heureuse occasion pour exprimer, une fois de plus, au valeureux peuple algérien, mes sincères remerciements et ma gratitude pour les nobles sentiments qu’il m’a témoignés au cours de la pénible épreuve que j’ai connue, et que j’ai pu surmonter par la grâce et la miséricorde du Tout-Puissant. Dans vos prières pour mon rétablissement et dans les sincères sentiments que vous m’aviez témoignés, j’ai trouvé un réconfort qui m’a grandement aidé à surmonter cette épreuve qui a révélé une nouvelle fois le degré de maturité et de conscience que manifeste le peuple algérien quand il s’agit d’affronter les coups du sort et les nobles témoignages de compassion et de solidarité qu’il prodigue en silence aux patriotes sincères lorsqu’ils se trouvent affligés par le destin. A vous tous, je tiens à réitérer mes sentiments de fraternité, de respect et de considération pour ces marques d’affection et de fraternité. La fondation de cette organisation nationale, en 1956, aura été un tournant dans l’épopée de notre lutte de libération à partir duquel les travailleurs algériens, déjà nombreux dans les rangs de l’armée de Libération, ont décidé d’investir le champ syndical au profit de la lutte pour l’indépendance. Comme cela sera également le cas avec d’autres composantes de notre société, notamment les étudiants et les commerçants, cette évolution stratégique mise en oeuvre à l’initiative du Front de Libération Nationale a réalisé ses objectifs. En effet, la création de l’Union Générale des Travailleurs Algériens a confirmé l’autonomie de décision et d’action de notre Révolution qui, riche de la généreuse solidarité de frères et d’amis à travers le Monde, entendait demeurer une Révolution conduite par les Algériens au service exclusif de l’Algérie. De même, l’Union Générale des Travailleurs Algériens a concouru pacifiquement certes, mais de manière efficiente, à montrer à l’opinion mondiale que la glorieuse Révolution du Premier Novembre 1954 était bien le sursaut d’une Nation tout entière, déterminée à conquérir son droit à la liberté. De fait, les grèves nationales se succéderont à l’image de celles du 5 Juillet et du 1er Novembre 1956, jalonnant la progression de notre lutte politico-militaire. L’historique grève des huit jours du début de l’année 1957 a, quant à elle, constitué une éminente contribution à la mise en débat de la question algérienne aux Nations Unies, tout comme elle aura été une nouvelle page du sacrifice et du martyre de notre peuple sous le joug colonial. Bien que pacifique, la mobilisation des travailleurs algériens a été confrontée au déchaînement de la répression coloniale. Pour le simple fait de grève, des dizaines de milliers de personnes ont connu les affres de l’emprisonnement, des tortures et des camps de concentration, et des milliers de nos compatriotes ont été lâchement assassinés durant leur détention. Le symbole de cet héroïsme et de ce martyre restera notre frère le Chahid Aissat Idir, premier Responsable de l’Union Générale des Travailleurs Algériens qui, en dépit de son acquittement judiciaire, a de nouveau été incarcéré puis assassiné en janvier 1959, un crime odieux que les tortionnaires ont tenté de camoufler en « décès » tout comme ils ont tenté de camoufler en « suicides » bien d’autres assassinats comme ceux du Chahid Larbi Ben Mhidi et du Chahid Ali Boumendjel. Ainsi, et jusqu’a la veille même de l’indépendance, nos vaillants travailleurs ont contribué au lourd tribut versé par notre peuple à la libération de la Patrie. L’un des derniers crimes massifs du colonialisme aura en effet été le massacre ignoble par l’OAS de centaines de dockers au port d’Alger, le 2 Mai 1962, au lendemain de la célébration de la fête des travailleurs à travers le monde. C’est à la mémoire de tous les glorieux martyrs de la grande Révolution du 1er Novembre 1954 que nous nous inclinons ici avec ferveur. C’est en souvenir de la précieuse contribution des travailleurs à cette lutte libératrice que nous nous associons aujourd’hui, en signe de reconnaissance de la Nation, à la commémoration du 50ème anniversaire de la création de leur organisation syndicale.

Chères soeurs, chers frères, En ce même jour de l’année 1971, l’Etat et le peuple algérien ont recouvré le droit de disposer de leurs richesses. En célébrant ce double anniversaire, le minimum que nous puissions faire pour exprimer notre gratitude envers l’Union Générale des Travailleurs Algériens (UGTA), c’est de donner libre cours à l’émotion que suscite en nous l’évocation de cet événement. Puisant ses racines dans le mouvement national, l’UGTA a eu également à accompagner l’édification de l’Etat national et la formation d’une société de partage et d’équité, une société qui répond aux aspirations qui étaient celles de notre peuple au moment où il se débarrassait de l’odieux colonialisme. La relation organique entre le mouvement syndical et le mouvement national d’une part, et avec l’oeuvre d’édification nationale d’autre part, s’est clairement manifestée à travers les positions fermes et courageuses adoptées par l’UGTA pour la sauvegarde de la République. Cette relation s’est aussi traduite à travers la pondération et le sens élevé des responsabilités dont l’organisation des travailleurs a fait montre en accompagnant le processus de réforme de l’économie nationale durant toutes les étapes cruciales et décisives de la vie du pays.

Chères soeurs, chers frères, C’est pour moi un honneur de rendre hommage aux travailleuses et travailleurs algériens, et de saluer le combat et les grands sacrifices qu’ils ont consentis durant l’époque coloniale, la guerre de Libération nationale et la phase d’édification de l’Etat algérien moderne, persuadé que je suis qu’ils placeront toujours les intérêts suprêmes de la patrie par dessus tout et qu’ils sont conscients qu’ils représentent au sein de la société une force agissante et utile et partagent avec les autres forces vives de la nation la responsabilité de préserver la stabilité de l’Etat et de garantir le développement du pays. C’est aussi ce passé lumineux qui, dans l’indépendance restaurée, a tout naturellement désigné votre Union comme cadre de mobilisation des travailleurs pour l’oeuvre d’édification nationale menée par notre pays, avec intensité, deux décennies durant. Par la suite, fidèle à son engagement patriotique, l’Union Générale des Travailleurs Algériens, s’est toujours mobilisée pour la sauvegarde du patrimoine productif national. Elle s’est particulièrement impliquée durant la douloureuse période de la tragédie nationale, dans la préservation de l’économie du pays malgré des difficultés multiples et en dépit de destructions criminelles et des ravages causés par le terrorisme. Cette nouvelle épreuve a coûté à l’Algérie de nombreux martyrs dans les rangs des travailleurs et des syndicalistes, dont notre frère le Chahid Abdelhak Benhamouda.

Chers frères, chères soeurs, Les occasions commémoratives sont des moments de recueillement à la mémoire de ceux des nôtres qui ont consenti le sacrifice suprême pour la libération du pays. Elles sont aussi des moments privilégiés pour nous ressourcer dans notre passé héroïque et nous mobiliser davantage dans l’édification de l’avenir du pays. Construire une Algérie digne, fière et prospère, garantir à notre peuple un avenir de bonheur et de paix, telle est la meilleure manière de rendre hommage à nos glorieux martyrs. Et c’est dans cet esprit que je saisis cette occasion pour m’adresser au monde du travail que je salue chaleureusement, et à travers lui, la Nation tout entière, pour mettre l’accent sur la nature et la portée des défis que nous avons le devoir de relever dans l’étape actuelle du redressement Grâce à Dieu, et grâce au courage autant qu’à la sagesse du peuple algérien, notre pays est en train de surmonter la tragédie nationale qui l’a endeuillé, et il s’attelle, désormais, à la consécration de la réconciliation nationale, à l’unification de nos rangs et à la libération totale de nos énergies. Au cours des dernières années, nous avons largement rétabli la sécurité à travers le territoire national, et nous avons rompu l’injuste embargo de fait imposé à notre pays au cours de la décennie 90. L’Algérie a retrouvé son statut d’acteur important dans les relations internationales et elle s’est engagée résolument dans la relance de son développement économique et social. De fait, depuis 1999, l’Algérie s’est transformée en un vaste chantier, avec la mobilisation de nos travailleurs qui en sont les bâtisseurs et de notre peuple qui en recueille les fruits au fil des années. Cependant, face à l’oubli, face aux impatiences entretenues par les déficits qui sont encore à combler, mais aussi face aux discours du défaitisme et du pessimisme, il est toujours utile de rappeler quelques étapes du chemin déjà parcouru sur la voie de la reconstruction nationale.

Ainsi, sept années durant, la croissance économique a été au rendez-vous sans interruption, grâce à une politique intense d’investissement public qui n’a cessé de s’intensifier, totalisant plus de 3.000 milliards DA entre 1999 et 2004 et à l’encouragement de l’investissement privé national et étranger qui a, quant à lui, dépassé les 2.300 milliards DA. Sept années durant, les besoins sociaux de la population ont été progressivement satisfaits même si, à l’évidence, les réponses demeurent encore insuffisantes, compte tenu des retards accumulés et des besoins croissants. A titre d’illustration, dans le budget 2006, le montant global des transferts sociaux, qui a été arrêté à hauteur de 512 milliards de dinars, est en augmentation de 14 % par rapport à l’année 2005, représentant ainsi 20 % du budget général de l’Etat et près de 10 % de la richesse nationale, le PIB. Je précise que ces transferts sociaux ne comprennent pas les « subventions implicites » accordées par l’Etat pour soutenir notamment les prix de l’eau, de l’électricité, du gaz et des carburants, et qui s’élèvent, elles, à 233 milliards de dinars. La crise du logement a été contenue et commence à être surmontée grâce à la réalisation de plus de 950.000 logements depuis 1999, représentant 16 % du parc national de logements. L’école algérienne a été dotée de plus de 3.000 nouveaux établissements, soit 16 % de l’ensemble existant, dont 350 lycées, et plus de 800 écoles fondamentales. Les sept dernières années ont également été marquées par une amélioration des conditions de scolarité des enfants des familles démunies ou isolées, grâce à la réception de plus de 230 internats, soit le quart (1/4) de tout ce qui existait avant, ainsi que 850 cantines scolaires représentants près de la moitié de la capacité nationale en la matière. Pour sa part, l’université a réalisé un véritable bond en avant, avec la réception de 390.000 places pédagogiques, soit 58 % du parc national total, de 160.000 places d’hébergement, soit 53 % du total, ainsi que de 118 restaurants universitaires, soit 40 % de ce que notre pays possède dans ce domaine. L’approvisionnement de la population en eau a été érigé au rang de priorité nationale et a fait l’objet d’un effort exceptionnel qui n’a pas encore produit tous les effets escomptés. Je citerai, à ce titre, la livraison de 19 barrages, soit le tiers (1/3) du parc national total, ainsi que la programmation et le lancement de grands projets d’unités de dessalement de l’eau de mer sur toute la côte, et notamment à l’ouest du pays qui souffre encore d’un déficit pluviométrique chronique. Par ailleurs, 450.000 nouveaux foyers ont été raccordés à l’électricité durant les sept dernières années, notre pays affichant aujourd’hui un taux national d’électrification proche de 96 %. Pendant la même période, 670.000 foyers ont été raccordés au gaz de ville, soit 44 % de tout ce qui avait été réalisé depuis l’indépendance. Dans le domaine du sport, les deux tiers (2/3) de tous les stades et des salles omnisports du pays ont été réalisés durant les sept dernières années. En fait, la liste de nos réalisations, de vos réalisations, de ces sept dernières années est encore très longue. Je me limiterai cependant à ces quelques exemples illustratifs des efforts que notre pays a déjà fournis pour rattraper ses retards, relancer son développement économique et améliorer les conditions de vie de la population.

Chers frères, chères soeurs, Mes chers compatriotes, Je n’entends point ici présenter un bilan exhaustif de notre action d’autant que l’effort se poursuit toujours dans le cadre des engagements que j’ai pris envers la Nation. En rappelant quelques réalisations de ces dernières années, mon but est de renforcer chez nos concitoyens la conviction que les années qui viennent connaîtront des résultats encore plus importants. En effet, le choix de la paix et de la réconciliation nationale massivement consacré par le peuple souverain le 29 septembre dernier, et dont les mesures de mise en oeuvre seront promulguées avant la fin de ce mois, renforcera, à coup sûr, la sécurité et la cohésion de notre société, instaurant ainsi une atmosphère plus appropriée à la cicatrisation des blessures de la tragédie nationale et à la dynamisation de nos efforts de développement. Nos partenaires étrangers se libèrent, eux aussi, de plus en plus de leurs hésitations et se rendent compte, enfin, des opportunités que leur offre l’investissement productif en Algérie. Mais, c’est encore une fois, sur notre volonté, nos moyens et nos efforts que nous comptons d’abord pour conforter et accélérer le développement de notre pays et lui assurer ainsi sa juste place sur la scène internationale. Dans cette perspective, l’Etat, en ce qui le concerne, a affiché clairement ses choix stratégiques et sa détermination. De fait, sur la période allant de 2005 à 2009, l’Etat engagera près de 6.000 milliards DA, équivalent à plus de 80 milliards de dollars de dépenses publiques d’investissement, soit le double de ce qui a déjà été réalisé durant les sept années écoulées. Ce montant recouvre d’abord l’enveloppe de 4.200 milliards DA du programme quinquennal de consolidation de la croissance économique décidé l’année dernière, ensuite celle de plus de 1.000 milliards DA pour le financement du programme en cours à la fin de l’année 2004, et enfin, celle de 800 milliards DA destinés aux programmes complémentaires pour les wilayas du Sud et des hauts plateaux. Je vous épargnerai ici la longue liste des réalisations que recouvre ce montant, mais je tiens à préciser que cet effort national sera exclusivement financé par notre pays, car depuis le début de l’année dernière, nous avons non seulement décidé de cesser d’emprunter à l’étranger mais aussi de procéder au remboursement soutenu de la dette extérieure. La crise de l’endettement, qui a caractérisé la dernière décennie, a révélé, en effet, l’extrême fragilité de notre économie. Du fait de sa grande dépendance vis-à-vis des hydrocarbures, l’économie a subi de plein fouet l’effondrement du marché pétrolier dès 1986. La crise de liquidités l’a amenée à recourir massivement à l’emprunt extérieur, pour importer les biens de consommation de base, contribuant ainsi à déstructurer durablement ses équilibres fondamentaux. Le poids excessif de l’endettement extérieur a non seulement compromis la croissance -celle-ci a été négative sur presque toute la période 1986-1994- mais il a aussi considérablement limité la liberté de choix de l’Algérie, ce qui a conduit, à partir de 1994, au réechelonnement de la dette extérieure et à son corollaire, la mise en oeuvre d’un programme d’ajustement structurel, dont les stigmates sont encore sensibles, notamment en ce qui concerne la réduction drastique dans les dépenses sociales et les pertes d’emplois. L’Algérie s’est attelée à restaurer la stabilité macroéconomique, condition essentielle pour amorcer le redressement économique du pays. Une fois les équilibres fondamentaux rétablis, les pouvoirs publics ont opéré, dès 2000-2001, deux choix stratégiques : Le premier choix a été de maîtriser l’endettement extérieur pour éloigner le risque de retomber dans la situation de vulnérabilité que nous venions de vivre. Ce qui implique d’abord de limiter au maximum le recours à l’endettement extérieur et de financer toutes les dépenses sur nos ressources propres. Puis à réduire le poids de la dette, en procédant, autant que faire se peut, à son remboursement anticipé. C’est ainsi que l’encours de la dette extérieure est tombé de 28,1 milliards de dollars en 1999 à 15,7 à la fin janvier 2006 et atteindra 13,9 milliards de dollars fin mars 2006. Cette politique de désendettement a permis d’alléger les charges de la dette qui auraient injustement pesé sur les générations futures. Le deuxième choix stratégique a consisté à consacrer l’essentiel des ressources supplémentaires, procurées par la conjoncture pétrolière favorable au financement des projets d’équipement public et au renforcement de la croissance en attendant qu’elle soit générée par l’investissement productif, public ou privé. C’est ainsi que l’Etat a lancé en 2001, le programme de soutien à la relance économique, d’un montant de 7 milliards de dollars, puis, compte tenu de ses résultats encourageants, à le compléter par un programme plus ambitieux de 60 milliards de dollars pour la période 2005-2009.

Chers frères, chères soeurs, Mes chers compatriotes,

Les bons résultats économiques et financiers obtenus au cours de la période 2000 – 2005, grâce au plan de relance économique et à la hausse des prix du pétrole, apparaissent à travers la maîtrise de l’inflation à un niveau très bas, la reprise soutenue de la croissance économique, la forte consolidation de la position financière extérieure, et l’amélioration des finances publiques. La maîtrise de l’inflation s’est bien confirmée en 2005 avec un rythme de seulement 1,6 % en moyenne annuelle, contre 3,6 % en 2004 et très en deçà du taux d’inflation enregistré en 1995, qui était de l’ordre de 30 %. La reprise de la croissance économique a été significative et régulière au cours des quatre dernières années pendant lesquelles le taux de croissance a dépassé les 5 %, grâce à une forte expansion du secteur des hydrocarbures mais aussi à celles du secteur du BTP, des services et de l’agriculture. L’augmentation des prix des hydrocarbures et, corrélativement, la hausse de la fiscalité pétrolière, expliquent la performance particulière des finances publiques qui s’est traduite par un excédent budgétaire appréciable en 2005. La consolidation de la position financière extérieure du pays apparaît clairement dans la poursuite soutenue de l’accumulation des réserves officielles de change et la réduction substantielle de la dette extérieure à moyen et long terme. En effet, les réserves d’un montant de 4,4 milliards de dollars à fin 1999 ont décuplé en cinq ans malgré l’importance des remboursements par anticipation qui relèvent d’un choix volontaire pour renforcer l’autonomie de décision du pays et sa crédibilité dans les relations économiques et commerciales internationales. En définitive, la position financière extérieure nette de l’Algérie, largement positive à fin 2005, s’améliorera encore en 2006, ce qui favorise la stabilité du taux de change effectif réel du dinar et réduit la vulnérabilité de l’économie algérienne aux « chocs » externes toujours possibles.

Mesdames, Messieurs, Une politique active et généreuse de transferts sociaux couplée à l’augmentation soutenue du taux de croissance a permis une progression notable des principaux indicateurs du développement humain. En matière d’emploi, nous sommes arrivés à inverser totalement la tendance à l’aggravation du chômage. En effet, la population au chômage a baissé de un million de personnes, passant de 2,5 millions en 1999 à 1,5 million en 2005. Le taux de chômage a donc considérablement reculé au cours des cinq dernières années, pour atteindre 15,3 % en 2005 selon la dernière enquête de l’Office National des Statistiques de septembre 2005, alors qu’il était de près de 30 % en 1999. En matière de santé, le taux de mortalité infantile, indicateur de la santé de la mère et de l’enfant, a baissé depuis l’année 2000 passant de 36,9 pour mille à 29,4 en 2005. L’espérance de vie à la naissance, quant à elle, a gagné 3,6 ans, passant de 71,7 ans en 1998 à 75,3 ans en 2005. Dans le domaine de l’éducation, la scolarisation des enfants de 6 ans a été quasiment totale en 2005, pendant que la population analphabète ne représente plus que 26,5 % de la population totale, contre plus de 30 % en 1999. Après avoir connu une baisse tendancielle significative au cours de la décennie 90, le revenu annuel par habitant a plus que doublé sur la période 1999 – 2005, passant de 108.066 dinars en 1999 à 228.500 dinars en 2005.

Chers frères, chères soeurs, Mes chers compatriotes, Les données que je viens de vous présenter montrent que l’Etat s’est engagé de manière rigoureuse et méthodique à promouvoir une croissance économique forte et durable, à même d’assurer une amélioration continue des conditions de vie de nos concitoyens. Mais l’émergence d’une économie compétitive et d’une société prospère sont des défis considérables qui nécessitent la contribution de la Nation tout entière. Gardons-nous, en cette période d’aisance financière toute relative, de céder une nouvelle fois aux sirènes de la démagogie, du laxisme et de l’affairisme débridé, alors que la conjoncture actuelle du marché des hydrocarbures risque de se renverser, à tout moment. Notre pays a déjà connu des périodes favorables en matière de prix des hydrocarbures, mais il a aussi déjà payé un lourd tribut à l’absence d’anticipation lucide qui a été à l’origine de ses graves difficultés financières, de ses tourmentes et, pour partie, de la tragédie nationale. Il est donc de notre devoir d’envisager l’avenir en tenant compte de toutes nos réalités, celles heureuses que je vous ai déjà exposées, mais aussi celles plus préoccupantes que je dois également rappeler ici devant vous et devant la Nation. En premier lieu, alors que nos importations ont plus que doublé au cours des sept dernières années, passant de 9,5 milliards de dollars en 1999 à plus de 20 milliards de dollars en 2005, nos exportations hors hydrocarbures ont stagné, n’atteignant pas un milliard de dollars en 2005. En second lieu, et jusqu’à ce jour, la totalité de la fiscalité ordinaire en dehors des hydrocarbures, permet seulement de faire face à la dépense publique destinée aux salaires des fonctionnaires, aux versements des pensions et allocations familiales, ainsi qu’à la gestion des hôpitaux, soit en définitive, de couvrir à peine 40 % du budget de fonctionnement de l’Etat. En troisième lieu, la dette interne de l’Etat qui est déjà de 1.000 milliards DA dont l’essentiel a été générée par l’assainissement financier des entreprises publiques, s’alourdira inéluctablement de près de 200 milliards DA pour effacer les découverts financiers accumulés de nouveau par ces mêmes entreprises publiques. Ce montant qui figure actuellement dans les bilans des banques, contrarie les capacités nationales de financement de l’investissement productif, au moment même ou de nombreuses entreprises publiques sont en grave difficulté au point d’être incapables de verser les salaires de leurs travailleurs. En quatrième lieu enfin, notre adhésion à l’Organisation Mondiale du Commerce ne saurait tarder alors que l’accord d’Association avec l’Union Européenne est déjà en vigueur, ce qui nous conduira inéluctablement dans une dizaine d’années seulement, à l’établissement généralisé d’une zone de libre-échange, sans protection tarifaire pour la grande partie de notre production. Cette situation interpelle toutes nos entreprises qui doivent se préparer à livrer et à gagner la bataille de la compétitivité. Ces défis vitaux découlent de la persistance de notre inquiétante dépendance envers les hydrocarbures, et c’est aux Algériens eux-mêmes de se résoudre à les relever. Ces défis ne sont pas ceux d’un pouvoir ou même d’un régime, mais bien ceux de la Nation tout entière à qu’il revient de choisir son avenir et de se mobiliser pour le concrétiser.

Mesdames, Messieurs, Mes chers compatriotes, Grâce à la réactivation de la croissance et une politique active de redistribution, le revenu par habitant à progressé, en moyenne, de 13,3% par an entre 1999 et 2005. Des augmentations de salaires et de régimes indemnitaires sont intervenues, particulièrement dans le secteur public, la dernière hausse du SNMG ayant eu lieu en janvier 2004. Ces augmentations ont alourdi les charges de l’Etat et des entreprises publiques dont certaines ont, dans le même temps, été contraintes de procéder à des compressions d’effectifs. Il faut reconnaître que nombre d’entreprises publiques ont consommé de la croissance plus qu’elles n’y ont contribué. Outre l’amélioration du pouvoir d’achat des salaires dans un contexte d’inflation écrasée, il importe de souligner la forte poussée des transferts sociaux dans la formation des revenus des ménages. Les transferts, qui représentent près du quart des revenus des ménages, absorbent une part de plus en plus importante du PIB, soit près de 10 % en 2005. Il faut bien se convaincre qu’une augmentation générale des revenus du travail, sans contrepartie d’une amélioration du niveau réel de productivité, menacerait la stabilité macroéconomique rétablie au prix de longues années d’efforts et de souffrance ainsi que la viabilité de nombreuses entreprises, avec tous les effets que l’on peut imaginer sur le niveau de l’emploi. Le niveau et la qualité de la croissance sont déterminés, pour l’essentiel, par la productivité du travail. La relation salaire-productivité doit désormais s’imposer à tous, y compris et surtout au secteur industriel public, manufacturier en particulier qui est en régression régulière depuis plusieurs années, au rythme de 1,3 % par an en moyenne. D’une manière générale, force est de constater qu’en matière de productivité du travail, l’économie algérienne est même au-dessous des standards régionaux. Dans ces conditions, et pour articuler positivement les contraintes économiques et les attentes sociales, le bon sens voudrait que les partenaires sociaux adoptent une position réfléchie, pondérée et nuancée qui privilégie l’intérêt collectif du monde du travail et celui de la Nation sur les intérêts catégoriels. Tout en poursuivant sa politique active de protection sociale, l’Etat privilégie la relance d’une croissance durable dans un cadre macroéconomique stabilisé, à l’effet de créer des postes de travail, notamment en direction des jeunes. Et ce, d’autant que la dette interne, de 1.000 milliards de dinars, qui est un prélèvement sur le patrimoine des générations futures, est pour l’essentiel constituée des dettes des entreprises publiques défaillantes, que l’Etat a prises en charge régulièrement pour préserver l’emploi et manifester sa solidarité avec les travailleurs. Enfin, il est peut-être temps de dissiper une illusion sur les capacités financières de notre pays. Certes, le revenu nominal par habitant a doublé en six ans, passant de 1.621$ en 1999 à 3.114 $ en 2005. Mais l’Algérie n’est pas un pays riche car, sans les revenus pétroliers, le PIB (hors hydrocarbures) par habitant, de 1.150 $ en moyenne jusqu’en 2002, et de 1.700 $ en 2005, place notre pays dans la tranche inférieure des pays à revenu intermédiaire. L’Algérie doit apprendre à ne plus compter sur la « rente pétrolière », d’autant que cette source de revenus, unique, est limitée dans le temps. Aussi, cette rente devra être consacrée à nous prémunir de retournements éventuels du marché pétrolier, en alimentant le volet incompressible des dépenses publiques, et enfin à ménager un minimum de solidarité entre les générations et entre les différentes catégories sociales. La croissance qui a longtemps été extensive, résultant d’une accumulation de capital, doit désormais être générée par un accroissement de la productivité du travail. Aussi, l’accroissement réel des revenus du travail sera-t-il désormais lié à l’amélioration de sa productivité. L’objectif est de maintenir durablement la solidité des fondamentaux de l’économie, dont la stabilité permet de soutenir le développement des opportunités de croissance économique et sociale et la constitution d’épargnes pour les générations futures. Il est tout à fait clair que cette chance exceptionnelle, pour notre pays, d’avoir entre les mains, les possibilités de régler les problèmes fondamentaux, ne saurait être gaspillée au profit d’une politique de facilité. Les deux choix stratégiques que j’ai rappelés ne sauraient être remis en cause par des impatiences sans doute légitimes aux yeux des intéressés eux-mêmes, mais qui détruisent la possibilité réelle d’éradiquer le chômage et oblitèrent l’avenir des générations futures.

Chers frères, chères soeurs, Mes chers compatriotes, Certains pays qui étaient au même niveau de développement que le nôtre il y a à trois décennies seulement sont, aujourd’hui, devenus de véritables pays émergents. L’Algérie peut, elle aussi, prétendre à ce statut pour autant que cet objectif nous rassemble tous, sans exclusive. La démarche susceptible d’y mener a été énoncée dans mon programme que le peuple algérien a approuvé massivement. Elle a été explicitée dans le programme du Gouvernement que le Parlement a adopté à une forte majorité. L’Etat continuera à oeuvrer de manière déterminée pour satisfaire nos besoins sociaux fondamentaux, notamment en matière d’enseignement, de santé et de logement. L’Etat contribuera fortement à éradiquer le chômage qui recule déjà grâce à la croissance économique mais surtout grâce aux importants programme nationaux de soutien à la création d’emploi. La solidarité nationale est et sera toujours garantie par l’Etat, notamment au bénéfice de ceux qui sont réellement démunis et sans aucune possibilité d’accéder par eux-mêmes à un revenu. L’Etat, qui concourt déjà à la croissance économique par la dépense publique, veillera également à faire aboutir les réformes en cours, celle des banques, celle du foncier, tout comme celles de la Justice et de l’Administration. Mais ces efforts demeureront insuffisants et même éphémères si la Nation dans sa totalité n’y apporte pas son concours actif ou si elle venait à s’installer dans le confort illusoire de la mentalité rentière, oubliant ainsi les leçons du passé récent et cruel et ignorant les défis du monde d’aujourd’hui. Voilà pourquoi, j’appelle d’abord les entreprises publiques et privées à tirer profit sainement de la conjoncture favorable actuelle, à augmenter leurs plans de charge grâce aux réalisations financées par l’Etat, à moderniser leur outil de production et à améliorer la qualité de leurs produits pour faire face à la concurrence mondiale.L’Etat continue de prendre des mesures incitatives pour l’investissement et il le fera encore au profit des régions intérieures du pays qui doivent elles aussi accéder au développement. Il assure également les opérateurs locaux de sa protection dans tout ce qu’ils entreprendront en respectant les lois du pays. Mais en retour, nous attendons d’eux qu’ils s’acquittent de leurs devoirs financiers définis par la loi, qu’ils prennent part activement à la lutte contre toutes les formes d’infractions qui saignent l’économie nationale, qu’ils augmentent leur contribution à la création d’emplois et qu’ils développent leur capacité d’exportation. J’appelle également les travailleurs à se mobiliser pour améliorer la productivité de notre économie et pour soutenir les évolutions nécessaires, car il y va de l’avenir de leurs emplois et de l’avenir de toute la Nation. J’en appelle aussi à nos cadres formés aux prix des sacrifices consentis par le pays pendant des décennies et desquels le pays attend légitimement beaucoup. L’Algérie souffre de former ses enfants au profit de pays étrangers. Elle attend de ses cadres, dans tous les secteurs, une pleine mobilisation car ils doivent prendre conscience des enjeux auxquels le pays doit faire face. La Nation attend d’eux qu’ils contribuent aux efforts de tous à travers toutes les régions du pays. J’appelle tous les citoyens à faire constamment preuve de civisme et à participer à la lutte contre des fléaux nés durant les années de tourmente, tels le banditisme et la corruption. Je m’adresse enfin aux partis politiques et à toutes les associations gouvernementales et non gouvernementales pour les inviter à s’impliquer pleinement dans la bataille du développement. La crise politique est derrière nous et les institutions du pays sont maintenant bien assises. La tragédie nationale sera surmontée et ses plaies cicatrisées. Nos valeurs nationales qui constituent l’âme de notre peuple seront promues et protégées par l’Etat, conformément à la constitution. L’heure n’est donc plus aux anathèmes des uns contre les autres, ni aux attitudes populistes et démagogiques. Elle est au pluralisme fécond pour le pays, à la compétition autour de démarches concrètes à même de faire progresser plus vite et mieux l’Algérie.

Chers frères, chères soeurs, Mes chers compatriotes, Notre pays a retrouvé la paix civile et la sécurité ouvrant ainsi la voie à la reprise du développement. Il se doit à présent de veiller jalousement à la préservation de la paix sociale indispensable à tout progrès dans quelque domaine que ce soit. Nous avons la chance de disposer d’un cadre tripartite qui a fait ses preuves au fil des années. J’encourage ses partenaires à en faire le meilleur usage. S’ils sont francs et sincères, le dialogue et la concertation permettront aux travailleurs de récolter les fruits de leurs attentes en matières d’amélioration de l’environnement et de la législation du travail de même qu’en matière d’évolution des salaires, en tenant compte de la croissance, de la productivité et de l’inflation. Dans ce même forum, les opérateurs économiques continueront d’apporter leur contribution à l’amélioration du cadre requis pour un investissement productif plus intense et libéré des pratiques parasitaires. J’invite donc l’Union Générale des Travailleurs Algériens, les associations patronales et le Gouvernement à poursuivre leur concertation tripartite en leur rappelant aussi que nous attendons d’eux la finalisation du Pacte National Economique et Social qui constituera une nouvelle avancée pour notre pays en lui offrant un cadre de référence pour l’avenir du développement national.

Chers frères, chères soeurs, Mes chers compatriotes, Le message que j’ai tenu à vous adresser aujourd’hui s’inspire de nos réalités, toutes nos réalités, et tient compte aussi du Monde d’aujourd’hui, auquel nous devons nous adapter de manière dynamique, résolue et, autant que faire se peut, offensive et créative. Ce monde ne laisse aucune place aux peuples faibles qui ne savent pas définir leurs objectifs et mobiliser leurs énergies. Il remet en cause leurs droits les plus fondamentaux, y compris leur liberté et leur souveraineté. Ce monde montre, à l’évidence, que tout affaiblissement de la volonté populaire et de la cohésion sociale ouvre la porte à de nouvelles atteintes, comme celle récemment portée à notre religion, une atteinte que nous condamnons avec la plus grande énergie. L’avenir des peuples dont nous partageons le destin, et au premier titre ceux du monde arabe et de la Oumma islamique, réside plus que jamais dans la solidarité active que nous continuerons à pratiquer avec opiniâtreté. Nos glorieux martyrs nous ont légué l’exemple suprême du patriotisme et le fruit sacré de leur lutte : l’indépendance et la liberté. Nos sacrifices plus récents nous ont donné une preuve supplémentaire que, face à l’adversité, notre peuple est toujours capable de grandes réalisations. La réconciliation nationale vient nous libérer aujourd’hui des pesanteurs et des divisions. Sachons en faire ensemble une réconciliation avec nous-mêmes, avec notre Patrie et avec notre avenir en tant que Nation. Sachons donc nous mettre tous pleinement au travail pour construire l’Algérie digne, forte et fière dont ont rêvé nos martyrs.

Gloire à nos martyrs, Vive l’Algérie, Je vous remercie de votre attention ».

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