Amizour perd une légende

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Amizour est en deuil. Elle vient de perdre l’un des ceux qui ont marqué l’histoire de cette région. Homann Kurt Herman, d’origine allemande, a tiré sa révérence à 88 ans, dans l’après-midi de vendredi dernier, dans son domicile au quartier populaire Bombara, après un long combat contre la maladie.

Une foule de citoyens lui a rendu un dernier hommage, samedi, en l’accompagnant à sa dernière demeure. Homann était un infirmier parachutiste quand il mit les pieds sur le sol algérien, en 1948, alors qu’il avait à peine 19 ans. Il a commencé à travailler comme soignant à la SAS d’Ighil Ialouanen, sur les hauteurs d’Amizour, pendant plusieurs années, durant lesquelles il a porté aide et secours aux couches défavorisées de la région. On l’appelait «le médecin des pauvres». Au péril de sa vie, l’Allemand, qui s’est attaché à la région et à ses habitants, s’est rallié à la révolution du peuple, en procurant des médicaments aux maquisards et en soignant leurs blessés. Après l’indépendance, refusant même qu’on lui offre une attestation communale, Homann épousera une femme kabyle de la montagne après s’être converti à la religion musulmane. Il sillonna tous les villages des montagnes de la Soummam pour assister des femmes lors des accouchements, soigner ou donner des conseils. Tout le monde le connaissait et on préférait l’appeler carrément docteur, tant ses soins étaient précieux en cette période-là de la postindépendance. Atmane Ourabah, directeur à la retraite, dit se rappeler, comme si cela datait d’hier, comment cet infirmier avait soigné jusqu’à la guérison totale la gangrène dont souffrait sa tante. Des dizaines de témoignages parviennent de partout, sur les compétences, la générosité, l’abnégation et l’efficacité du défunt et sur sa disponibilité de tous les instants. Par ailleurs l’infirmier allemand a offert ses services à l’ancien hôpital de la ville de Béjaïa, jusqu’à son départ à la retraite en 1995. Il travailla également pendant quelques années dans une officine pharmaceutique. Salah Bouzidi, pharmacien très connu à Amizour, raconte qu’Herman était doué d’une instruction et d’une culture générale hors pairs, ne tarissant pas d’éloges sur sa ponctualité et son travail bien fait. Ses voisins soulignent l’homme respectueux et bienveillant et le merveilleux père de famille qu’il était. Il a servi la population durant 46 ans, sans relâche. Il menait une vie paisible auprès des siens, mais sa santé a commencé à se détériorer et l’avait contraint à rester au lit, l’isolant de la vie publique. Après s’être acharné à améliorer la santé des autres, il combattit courageusement plusieurs maladies, avant de leur succomber à 88 ans. Un mois avant sa mort, un hommage lui avait été rendu par la société algérienne des auxiliaires médicaux (SAMA) lors de la célébration de la Journée mondiale de l’infirmier. L’histoire retiendra ce nom de Homann Kurt Herman, modeste citoyen, un infirmier dévoué au service des pauvres. Un homme qui mérite une juste reconnaissance, «comme de donner son nom à une salle de soins, celle d’Ighil Ialouanen par exemple», appellent de leurs vœux les habitants de la région qui l’a adopté et où il repose pour l’éternité.

Nadir Touati.

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