Peinture thérapeutique à Béjaïa

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C’est dans un atelier qui ressemble à tous les ateliers situé dans le dédale de l’administration de l’hôpital Khellel Amrane (Béjaïa) que nous l’avons surprise, les mains peinturlurées concentrée sur sa dernière œuvre, une reproduction géante de personnage de Walt Disney destinée au service pédiatrie, à laquelle méticuleusement, elle apporte la touche finale. Déboussolée un court instant par notre intrusion, un tantinet gênée par l’ambiance capharnaüm et le désordre de son lieu de travail, Naïma Meziani, les yeux qu’elle a énorme, et que l’on devine candescendants, et pleins d’amour tant le regard emprunte beaucoup à la douceur, celle des justes, affiche une mine réjouie. Ce sourire de madone semble la transfigurer et l’élever vers des cimes que seule une félicité exempte de toute souillure et pollution morale permet d’atteindre.Naïma Meziani, bientôt 40 ans a eu une enfance sans histoires, balisée par une éducation irréprochable à l’ancienne et un premier coup de cœur pour le crayon, l’encre de Chine et la peinture. Cette passion précoce pour les beaux-arts, et qui l’anime plus que jamais rien ne peut l’en distraire. C’est à croire que les fées se sont penchées sur son berceau ! Pas même son accident survenu alors qu’elle avait 12 ans, une méchante chute qui pour funeste qu’elle est puisque c’est à sa suite qu’elle est devenue paraplégique n’a en rien pu tempérer son enthousiasme ni son désir profond de croquer la vie à belles dents. Quant aux béquilles elle en use comme de “simples machins qui viennent en appoint à ses jambes défaillantes”.Le plus extraordinaire chez cette femme-courage, c’est qu’elle n’évoque à aucun moment son handicap. Si elle en souffre encore, ce qui est probable, elle n’en laisse rien transparaître.Et son rejet de la chaise roulante est symptomatique de son refus de susciter pitié et condescendance, sentiments qu’elle abhorre comme elle se refuse à admettre toute forme d’aide physique.Fonctionnaire à temps plein, donc peu soucieuse des contingences matériels, Naïma est chargée de la partie décoration de l’hôpital. Et tous les tableaux qui ornent les couloirs et vestibules, de même que les fresques enfantins sont le fruit de ses doigts de fée. Notre artiste avoue aimer particulièrement l’art, qu’elle pratique avec un bonheur et une réussite évidente, en ce qu’il apporte de joie et de gaieté aux malades. “Cet univers, qui est le sien, est dit-elle, un rendez-vous sans cesse renouvelé d’échanges, un cadre idéal pour que “le donner et le recevoir”, s’expriment dans leur forme la plus dépouillée, la plus innocente”, exit donc toute tendance mercantile ! Tout est dans le regard, la main tendue les doigts qui serrent très fort, la joie des retrouvailles” ajoute-t-elle.Convaincante à souhait. L’altruisme le plus pur, le don de soi, Nadia, les cultive de manière peu banale.Ce qui anime en fait cette artiste admirable tiens un peu de l’esprit qui a guidée l’œuvre d’une autre femme grande, géante, sœur Thérésa, la mère des pauvres de Calcutta et magnifique exemple de ce que devrait être l’humanité.Un passage à la télé, quelques rares expositions à l’occasion de la journée de la femme et de celles des handicapés, et c’est tout ! Naïma confesse n’avoir aucun penchant particulier pour les feux de la rampe.Ses problèmes personnels, où ceux qui freinent quelque peu son parcours c’est à peine si elle les effleure. En fait son souhait le plus ardent est d’avoir un atelier hors hôpital et hors domicile parental.Cela participe d’un besoin irrépressible de laisser libre cours à son imagination que l’on sait fertile et de s’échapper d’un carcan qui bride un peu, un tout petit peu sa créativité.Naïma, un exemple à méditer et à sauver.Le rayon de soleil, la banane en plus ce qui ne gâte rien, éclaire au quotidien un univers où s’entrecroisent souffrance espoir et courage. Quand le courage s’allie à une pêche contagieuse et à une volonté que rien ne peut entamer, alors l’espoir est permis.L’espoir en une vie meilleure, en un monde plus juste et en des lendemains qui scintillent.

Mustapha Ramdani

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