Dimanche 20 août. Le village Tizi-Hibel, à Aït Mahmoud, dans la daïra de Béni-Douala. Le village de Fouroulou paré des couleurs nationales à l’occasion de la célébration de la Journée nationale du moudjahid. On est venu de toutes parts rappeler le sacrifice de 18 martyrs tombés tous le même jour à la fleur de l’âge.
Cette manifestation se veut un hommage au groupe des dix-huit vaillants moudjahidine tombés en martyrs le 5 février 1958, entre les villages Taourirt Moussa et Tagrara, dont les corps furent jetés pêle-mêle dans une fosse commune au cimetière Tiachache de Tizi-Hibel. Empreinte d’une grande solennité, cette cérémonie a été célébrée en présence de M. Slimane Allam, président de l’assemblée populaire communale d’Aït Mahmoud, de quelques anciens moudjahidine, des enfants de chouhada et d’anciens moudjahidine, ainsi que des représentants de la société civile. Une minute de silence fut observée à la mémoire de ces martyrs ainsi qu’à tous ceux qui sont tombés au champ d’honneur pour l’indépendance, suivie de la lecture du saint Coran, avant les prises de parole de quelques notables du village. «Ce groupe de jeunes, âgés pour la plupart, entre vingt et vingt cinq ans, étrangers à la région, faisaient partie d’une compagnie de maquisards de la zone 3, dont dépendait notre secteur les ‘Aït Aïssi’. Celle-ci prévoyait de dresser une embuscade à un convoi militaire sur la RN30. Dotée d’armes automatiques et de fusils mitrailleurs, cette compagnie, en transit donc dans notre région, avait été repérée par l’ennemi, qui fit aussitôt appel à des renforts militaires et procéda, dans la nuit du 4 au 5 février, à un maillage hermétique de toute la zone allant de ‘’Tala Khellil‘’ aux abords des Ouadhias en passant par ‘’Thakoukht’’. Aussi, Merbouche Mohamed Ouamer, le chef dudit secteur, fut chargé d’assurer le repli de ses frères, mais en vain, puisque lui-même et ses compagnons furent cernés entre les deux lieus dits ‘’Tazeka Bouada’’ et ‘’Tgued’yen’’, avant qu’ils ne tombent les armes à la main, non sans avoir farouchement résisté et fait subir de très lourdes pertes à l’ennemi», a tenu à rapporter M. Hamel Lekrim, inspecteur de l’enseignement à la retraite. L’orateur ajoutera que le capitaine Cheyroud, compère du sanguinaire et tristement célèbre Georges Oudinot, qui perdra d’ailleurs la vie quelques jours plus tard, soit le 28 février 1958 aux abords du Tizi-Hibel, a été abattu au milieu d’un convoi de plusieurs camions et engins blindés au cours d’une mission exécutée et bien réussie par un petit groupe de moudjahidine du même secteur, et ce en guise de représailles et de vengeance de leurs compagnons, tombés en cette fatidique journée du 5 février 1958. Au demeurant, M. Hamel Lekrim a rappelé que le 21 mai de la même année, les deux villages Agouni Arrouss et Tizi-Hibel ont vécu également une journée mémorable, où l’ennemi recevra une autre leçon de courage et d’héroïsme de la part de jeunes maquisards. Il citera, notamment, une opération ayant contraint le capitaine Oudinot et ses adjoints à solliciter l’intervention de l’aviation militaire basée à Oued Aïssi, constituée des fameux avions de combat «T6», surnommés par la population ‘’Thiwraghine (Les jaunes ndlr)’’, en référence à leur couleur jaune. Ces renforts bombardèrent autant les civils que les combattants de l’armée de libération nationale «ALN», tuant ainsi plusieurs villageois. Par ailleurs, ce jour mémorable du 21 mai 1958 aura, entre autres, permis de révéler des secrets de l’affaire dite de «La bleuite», une opération d’infiltration orchestrée d’Alger par le capitaine Alain Legier, avec qui Oudinot était en relation permanente. La trahison des dénommés Mouh Amirouche ainsi que celle de Moh Ouyidir, ayant éclaté au grand jour, ces derniers furent jugés avant d’être exécutés quelques jours plus tard par le colonel Amirouche, chef de la wilaya III.
Essaid Mouas

