Face à l’accumulation de la neige, pour des villageois des bourgs environnants, il faut désormais marcher dans la poudreuse pour se rendre à l’ex-Michelet, ce chef-lieu où tout le monde s’approvisionne en denrées alimentaires. Certains parcourent plus de quinze kilomètres en aller-retour.
L’ambiance est conviviale. On se dépasse, on se salue dans la bonne humeur. Arrivés en ville, on se rue vers les magasins pour de petits achats. La plupart des villageois ont pris leurs précautions. Attendue depuis que les services de la météo l’avaient annoncée, il y a près d’une semaine, la neige est enfin arrivée. «Elle est arrivée au bon moment », disent les agriculteurs qui n’en demandaient pas tant pour leurs terres desséchées par un été sans fin. Tous les villageois, malgré les contraintes, se réjouissent des flocons qui tombent enfin : «Qu’est-ce qu’un hiver sans neige ?», disent-ils. Samedi matin, la région s’est réveillée sous un manteau blanc. Le silence complet de la nuit, entrecoupé de coups de tonnerre, le laissait présager. Personne n’était surpris, on s’y était préparé. On a sorti les bottes en caoutchouc et les imperméables, un accoutrement indispensable pour marcher jusqu’en ville. La difficulté de circuler sur la poudreuse a contraint les propriétaires de véhicules légers à les laisser au garage. Quant aux véhicules tous terrains, chargés de villageois, ils foncent vers les hauteurs pour rejoindre la ville. Ce n’est pas sans mal que les célèbres côtes d’Akkar ou de Chemakh sont franchies. Mais certains finissent par abdiquer et laisser leurs engins au niveau de l’agglomération d’Ahechad, en bas de la colline. Vers dix heures l’accès à la ville est réservé à quelques 4×4, alors que les autres rentrent rapidement pour éviter d’être bloqués. La veille, les superettes n’ont pas désempli. Les étagères de riz, de pâtes alimentaires et autres légumes secs ont été les plus sollicitées. Les commerçants de fruits et légumes ont augmenté les prix de leurs produits, déjà peu abordables depuis un certain temps. Le lait en sachet quant à lui se fait plus que jamais rare. «Déjà qu’on ne le trouvait pas en temps normal, il est inutile de l’espérer par ce temps de neige» disent, résignés, les consommateurs qui se rabattent sur le lait en poudre. C’est dans les cafés bondés que l’on s’informe le mieux. On cherche à savoir si tout va bien dans le village voisin et on demande des nouvelles des amis. Les bulletins météorologiques annonçant de nouvelles perturbations sont également commentés : «Lorsque la neige craque sous nos pas, c’est qu’il neigera encore», dit un villageois. On parle aussi du froid et des moyens de chauffage : «Cette année, Dieu merci, nous avons le gaz», dit un autre. Cependant, il reste encore beaucoup de foyers qui ne profitent toujours pas des bienfaits du gaz naturel. De nouvelles habitations ou encore des familles aux moyens financiers limités, demeurent toujours en marge du développement. Le mazout pour certains et le bois de chauffage, peu onéreux, pour d’autres, on se chauffe comme on peut la maison. Le traditionnel kanoun avec cheminée, qu’on a pris soin de construire dans un coin de la pièce à vivre, a encore de beaux jours devant lui.
A.O.T.

