«De nouveaux mécanismes pour augmenter la production agricole»

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Le directeur des services agricoles de Tizi-Ouzou, M. Laib Makhlouf, parle, dans cet entretien, des mécanismes mis et à mettre en place pour augmenter la production agricole de la wilaya. Il aborde aussi la production actuelle et les activités de sa direction pour améliorer l’état du secteur de l’agriculture à Tizi-Ouzou.

La Dépêche de Kabylie: Le cap est mis sur le développement de l’agriculture au niveau de la wilaya de Tizi-Ouzou. Quels sont les mécanismes prévus et ceux mis en place pour atteindre cet objectif ?

Makhlouf Laib : La baisse du prix du baril de pétrole sur le marché international nous contraint à trouver d’autres ressources pour assurer le développement de notre pays. Il se trouve que l’Algérien est paysan depuis la nuit des temps, alors, le secteur de l’agriculture est l’option la plus indiquée pour assurer le développement. Nous sommes donc tenus de changer de comportement, d’introduire de nouvelles techniques et de nous rapprocher davantage des agriculteurs pour booster l’activité agricole. Nous avons pris la ferme décision d’organiser une foire agricole dans chaque daïra et cela ne sera pas du folklore. Nous allons mettre en avant et en exergue nos différents produits agricoles. Sur les 21 foires que nous allons tenir, nous aurons des chances de capter des investisseurs qui pourraient être intéressés par l’activité agricole, la commercialisation, la transformation et le conditionnement. C’est de cette manière qu’on produira plus et mieux, et qu’on créera de l’emploi et de la richesse. Nous allons aussi faire appel à nos universitaires pour des travaux de recherche, chose qui aidera à mieux produire, à mieux transformer, conditionner et commercialiser. Nous avons déjà organisé neuf foires agricoles et la 10ème aura lieu à Bouzeguène. Nous allons aussi organiser des rencontres qui regrouperont les paysans et les institutions financières, pour donner l’opportunité de l’investissement agricole au niveau des daïras, des communes et des villages.

Les oléiculteurs ont fait une bonne récolte, mais ils n’arrivent pas à vendre leur production. Qu’est-ce qui est envisagé pour leur permettre de le faire ?

Notre wilaya a produit cette année près de 13 500 000 litres d’huile d’olive. Il est vrai que les producteurs n’arrivent pas à commercialiser leur production, mais nous réfléchissons à la création de coopératives non seulement dans l’oléiculture mais aussi dans toutes les filières pour pouvoir justement arriver à commercialiser toute la production. S’agissant de l’exportation, nous sommes en train de mettre les mécanismes efficients, en collaboration avec l’université et les institutions spécialisées, pour arriver à un produit de qualité. Des campagnes de sensibilisation et de formation sont dispensées aux paysans et aux agriculteurs, pour l’apprentissage des opérations de débroussaillement, de taille, de ramassage des olives et de leur entreposage en ce qui concerne la production oléicole. Un cahier des charges sera ficelé entre les paysans et les transformateurs pour produire une huile de qualité exportable. Des gens sont déjà identifiés pour exporter notre huile qui est déjà une huile bio. La filière sera structurée avant la prochaine saison oléicole. On procédera de la même manière avec l’ensemble des filières.

Le prix de la viande rouge a sensiblement augmenté. S’agit-il d’une baisse de la production ?

Écoutez, notre pays possède un cheptel de 25 millions de bovins, 25 millions d’ovins et 2 millions de caprins. Avec un cheptel aussi important, il est clair que nous n’allons pas recourir à l’importation. Certes, nous devons produire davantage car le marché obéit à la loi de l’offre et de la demande, mais nous allons mettre le cap sur la création de marchés de gros et de grands abattoirs pour augmenter l’offre et ainsi, les prix baisseront automatiquement. A présent, la hausse des prix est due, essentiellement à la spéculation. Pour ce qui est de la viande blanche, notre wilaya produit 50 000 quintaux par an, et nous avons les moyens de produire davantage. Nous allons incessamment ouvrir cinq nouveaux abattoirs, ce qui permettra d’augmenter la production pour justement baisser les prix.

Les agrumes, malgré une bonne production, sont toujours inabordables. Pourquoi ?

Notre wilaya produit la quantité de 450 000 quintaux annuellement. Nous avons une surface de 1 500 hectares qui produit 300 quintaux à l’hectare. A Draâ Ben Khedda, à titre d’exemple, la production d’orange à l’hectare est de 700 quintaux. Les techniques mises en place dans ces orangeraies seront appliquées dans toute la région, pour augmenter la production. Donc, notre production est déjà importante, mais les prix ne baissent pas, et c’est toujours la spéculation. La chaine entre le producteur et le consommateur est de sept, voire plus dans certains cas. Le prix est donc augmenté sept fois avant d’arriver au consommateur. Nous allons intervenir pour diminuer cette chaine de manière à ce que l’agriculteur vende mieux et le consommateur achète à des prix raisonnables. Des coopératives s’imposent, elles joueront un grand rôle, non seulement dans la baisse des prix, mais aussi dans l’amélioration de la production.

La rareté du lait en sachet se fait de plus en plus criante. A-t-elle une relation avec la baisse de production et la diminution du quota de poudre de lait attribué à la wilaya ?

Ce matin (avant-hier ndlr), j’ai trouvé dans un café maure une énorme quantité de lait en sachet, ce qui est bien sûr interdit par la réglementation. Nous devons, dans un premier temps, faire respecter la loi. Si on arrive à interdire la commercialisation du lait ordinaire chez les cafetiers, les crémiers, les hôtels et les transformateurs, on ne parlera plus de rareté du lait. Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas faire le nécessaire pour améliorer notre production. L’importation de poudre de lait ne peut pas constituer une solution. Nous produisons actuellement 94 millions de litres de lait dans notre wilaya, nous pouvons produire davantage par la formation des producteurs. Nos éleveurs ne maîtrisent pas encore le rationnement de l’alimentation des vaches productrices de lait. Nous avons dès lors invité des spécialistes du domaine, de l’institut technique d’élevage, pour former nos éleveurs. Une formation de cinq jours a été dispensée aux éleveurs d’Imaloussen, et il y aura d’autres à Larbaâ Nath Irathen et dans d’autres localités. Nous allons aussi renforcer le nombre de collecteurs de lait et solliciter l’aide de nos vétérinaires pour assurer des formations et des apprentissages à nos paysans. Il sera aussi question de l’interdiction de l’abatage de nos génisses pour préserver notre patrimoine producteur de lait.

Qu’en est-il des produits du terroir ?

Justement, un salon agricole national des produits du terroir sera organisé du 25 avril au 2 mai prochain. Il y aura une soixantaine de produits du terroir agricole et 380 exposants qui viendront de toutes les wilayas du pays. Tous les artisans et les producteurs seront réunis dans un même espace pour favoriser les échanges et la commercialisation. Par ce salon, nous entendons créer une nouvelle dynamique pour booster la production et la commercialisation. D’ores et déjà l’huile d’olive d’Ath Ghobri et de Mâatkas sera labélisée, et on pourra aller vers l’exportation. J’aimerai aussi signaler que l’État fait des efforts indéniables pour améliorer le secteur de l’agriculture. Un montant de 41,5 milliards de centimes nous a été alloué pour l’ouverture de 150 kilomètres de pistes, l’implantation de 2 700 hectares d’oliveraies et 700 hectares de greffage, en plus des modules apicole et cunicole. Cela sans parler des indemnisations des victimes des feux de forêts et l’ouverture de 47 kilomètres de pistes.

Entretien réalisé par Hocine Taib

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