Mohand Ou’chaavane, un passionné de la terre

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Grâce à une bonne pluviométrie durant les mois d’avril et mai, les agriculteurs des villages de haute montagne ont démarré la campagne des labours d’entretiens «amegal» dans leurs champs. C’est le cas de Mohand Ou’chaavane du village Tadert Lejdid dans la commune de Saharidj auquel nous avions rendu visite, mercredi dernier en début de matinée, au moment où il s’apprêtait à atteler une paire de bœufs dénommés «Iharathen» que l’on dresse pour les labours. Aussi les deux bêtes de trait cornues, d’une imposante ossature et dont la robe vire au marron foncé s’alignèrent d’elles-mêmes à la vue de la charrue pour recevoir le joug «Azaglu» que Mohand Ou’Chaavane ajusta soigneusement sur leurs épaules et qu’il fixa sur leurs poitrails à l’aide d’une ficelle «Tisedhmert». Il attela ensuite la charrue au joug à l’aide d’un gros et solide ruban en cuir «l’mejvedh». Cette charrue traditionnelle est composée en plus du joug d’un long pied droit appelé «Athemu», une main «Thisilett» qui porte le socle «taggersa». Notre brave cultivateur, une fois la charrue attelée, et après avoir tout vérifié, s’équipa d’un long bâton «Anzel» et donna de la voix et du geste le signal de départ. Les deux bœufs bien dressés s’exécutent et commencent à avancer d’un pas lent et mesuré pour ainsi dire mécanique d’un commun accord en tirant sur la charrue. Le socle s’enfonça dans la terre bien ramollie par les dernières pluies à environ 30 cm. Il traça le premier sillon «Adhref» long de quelques 25 mètres soit de part en part dans la parcelle du terrain plantée de toute une variété d’arbres fruitiers avec une prédominance de figuiers et d’oliviers. Il y a aussi des cerisiers, des vignes, des pommiers à coté d’une dizaine d’espèces d’arbres fruitiers. Une partie de cette parcelle est semée de fèves et poix qui arriveront à maturité dans dix jours au plus. Notre cultivateur nous expliquera que cette période des labours d’entretiens du printemps  » Amegal Tefsut » est doublement bénéfique. D’abord, l’herbe verte retournée se transformera en engrais riche en azote et protéines. Ensuite c’est une technique qui permet de retenir l’eau de pluie qui arrivera jusqu’aux souches et racines des arbres par infiltration. Cela en plus d’éliminer les risques d’incendies lorsque cette herbe serait sèche. C’est aussi un moyen de réduire l’effet de l’érosion qui emporte la bonne terre dans ces régions de haute montagne fort inclinées. Le laboureur mettra deux journées bien pleines pour terminer les labours de cette parcelle d’environ quatre hectares. Notons enfin que les nombreux cultivateurs des villages de montagne des communes de Saharidj et Aghbalou ont repris les labours notamment ceux d’entretiens à l’aide de paires de bœufs  » Tayugga » depuis ces cinq dernières années. Pour ceux de propriétaires de terrains agricoles qui font appel aux laboureurs professionnels, les honoraires sont de 5 000 dinars la journée. Rappelons qu’il y a deux sortes de labours : les labours-semailles dont la période s’étend de la fin octobre au début décembre et ceux d’entretiens qui débutent à partir de la première semaine de mars jusqu’à la mi-mai. Notons enfin qu’une paire de bœufs dressée aux labours coûte une bagatelle de 50 millions de centimes. L’activité a connu un sensible recul ces dernières années dans les régions de montagne et en Kabylie d’une manière générale. Pire encore, elle tend carrément à disparaitre. Ceci s’explique en partie par l’abandon du travail de la terre par les jeunes et la difficulté d’un travail esquintant.

O. S.

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