«Je demande un plan ORSEC pour la commune»

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Instituteur à la retraite et syndicaliste, M. Smaïl Boukherroub, réélu pour un 3e mandat à la tête de l’APC de Boudjima, parle, dans cet entretien, de la situation dans la commune et de ses aspirations.

La Dépêche de Kabylie : Parlez-nous de la commune de Boudjima ?Smaïl Boukherroub : La commune a été créée en 1957, puis elle fut rattachée à Ouaguenoun après l’indépendance. Elle redevint autonome en 1984, après un nouveau découpage administratif. Elle a 34 km² de superficie et sa population est estimée, d’après la dernière estimation en 2017, à 19 000 habitants. La commune de Boudjima est composée de 14 villages et quelques hameaux.

Quelles sont les ressources dont dispose la commune ?Notre commune est principalement à vocation agricole, notamment dans l’arboriculture et plus spécifiquement l’oléiculture, avec une production très satisfaisante en huile d’olive qui fait vivre des centaines de famille, quand les saisons sont bonnes. Nous avons aussi l’élevage hors champ, de vaches et chèvres laitières, de poulets, de dindes et un peu d’apiculture. A partir de 1962, l’agriculture a connu un recul très important, notamment en céréaliculture et dans l’élevage ovin. Mais heureusement, nous assistons ces toutes dernières années à une reprise sérieuse dans la culture du blé. Les gens reviennent à la consommation de la semoule du blé et de l’orge. Grâce à la collecte de lait, l’élevage de vaches laitières a également repris de plus belle et beaucoup de ménages améliorent ainsi leurs revenus. La majorité des propriétaires d’oliviers reprennent peu à peu l’entretien de leurs oliveraies et greffent de plus en plus d’oléastres. La production du miel enregistre elle aussi un regain sensible.

Pour ce qui est de l’industrie, votre commune semble à la traîne…Je dirai même qu’elle est quasi inexistante, mise à part une unité de production d’engrais montée par un jeune ingénieur de la localité. Une zone d’activités a été créée en 1990, mais malheureusement elle n’a toujours pas été viabilisée, ce qui rend difficile d’attirer d’éventuels investisseurs. La SOGI, propriétaire des lieux, tarde à réaliser les aménagements nécessaires. Cette situation pénalise notre collectivité qui dépend toujours des subventions de l’Etat. Hormis l’abattoir communal et quelques locaux vétustes, notre commune ne dispose pas d’un patrimoine générateur de revenus. Nous avons un taux de chômage effarant au sein de notre jeunesse qui ne demande qu’à travailler. Je demande, en tant que maire, un plan ORSEC pour Boudjima et je plaiderai partout le sort de ma commune sinistrée économiquement, chiffres et preuves à l’appui. L’Etat doit sérieusement se pencher sur la commune de Boudjima.

Qu’en est-il du potentiel touristique de la commune ?Boudjima est une des régions les plus anciennement habitée en Afrique du nord, plusieurs sites historiques recèlent des gravures rupestres répertoriées à différents endroits, le plus connu étant Azru Imedyyazen. Ce site vient récemment d’être classé patrimoine national par l’Etat. Je profite donc de cette occasion pour interpeler les autorités concernées, afin qu’elles nous aident financièrement à promouvoir et protéger ce site, qui demain je l’espère fera l’objet d’un classement par l’UNESCO.

Quelle a été l’apport de Boudjima durant la guerre de libération ?Notre région a subi le pire. Pour exemple, le chahid Said Babouche, un chef de zone nommé par Krim Belkacem au déclenchement de la révolution, fut blessé, capturé, torturé, jugé et condamné à mort puis guillotiné le 8 avril 1957. Nous avons érigé une stèle à sa mémoire au carrefour de Boudjima, tout près du siège de la commune. Nous avons également des artistes célèbres, tels les chanteurs Arezki Oultache, Belkhir Mohand Akli, Amar Sersour et d’autres plus jeunes dont je ne peux citer tous les noms.

Votre bilan du mandat écoulé ?Nous avons substantiellement amélioré le taux de raccordement à l’AEP, l’électricité et le gaz naturel, qui a atteint 98% cette année. Nous nous félicitons du taux de raccordement au réseau d’assainissement de plus de 95% des habitations, ainsi que de la réalisation d’une bibliothèque, une crèche, de foyers de jeunes, des aires de jeux… Il y a aussi le raccordement des villages au réseau de la fibre optique pour Internet, l’ouverture de pistes agricoles partout où il n’y a pas d’opposition, la réhabilitation d’une retenue collinaire, l’ouverture de quatre cantines scolaires ainsi que des bibliothèques au niveau des écoles de la commune.

On a, par ailleurs, salué l’instauration du Salon du livre de Boudjima, qui concurrencerait même le Salon d’Alger. Comment l’idée vous en est-elle venue ?En fait, c’était en visitant un salon du livre organisé par plusieurs associations à Tigzirt. J’ai pris la décision de lancer le Salon du livre au niveau de notre toute nouvelle bibliothèque municipale en 2013. La première édition ayant connu un franc succès, nous avons pris l’engagement (le comité d’organisation s’entend) de tenir le rendez-vous chaque mois d’avril. Nous en sommes à la 5e édition qui a eu lieu les 19, 20 et 21 avril dernier. Ce qui est agréable à constater, c’est que notre salon a gagné en aura au point d’attirer des sponsors locaux et d’ailleurs. De simples citoyens, commerçants et entrepreneurs nous proposent des aides financières pour prendre en charge les frais d’organisation. Mais ce que nous déplorons, c’est de ne pas bénéficier de subventions au même titre que certaines Fêtes populaires. Pourquoi donc le Salon du livre de Boudjima, qui réunit des écrivains, poètes et artistes de différentes wilayas du pays, et même des écrivains de différentes nationalités, ne bénéficie-t-il pas d’une aide de l’Etat ? En tant que maire, j’en appelle à monsieur le ministre de la Culture. Nous avons des articles de la presse écrite, des reportages radiophonique et télévisuelle qui attestent de la formidable réussite et du taux de visiteurs impressionnant de notre salon du livre. Au demeurant, je tiens à cette occasion à remercier vivement nos partenaires, nos sponsors ainsi que les auteurs et éditeurs qui ont cru en notre salon de proximité. Quand je vois des familles remplir des sacs de livres, je me dis que finalement tout n’est pas perdu. Ce n’est pas rien de voir la commune sortir de l’anonymat grâce à ce salon du livre et ses belles nuits musicales. Deux événements culturels importants que j’essaye avec l’ensemble des élus municipaux d’encourager, mais l’Etat doit nous aider.

La commune souffre du problème des déchets ménagers. Que comptez-vous faire pour y remédier ? Le problème des déchets ménagers est commun à la quasi-totalité des communes riveraines de Boudjima. Nous souffrons de grandes difficultés dans le ramassage des ordures. Des oppositions ont freiné la réalisation de décharges contrôlées, ce qui a compliqué notre tâche. Nous espérons également que les citoyens se mettent au tri en amont, surtout que des récupérateurs de déchets, en tous genres, sillonnent nos villages chaque jour pour les ramasser. Maintenant que les déchets deviennent un enjeu économique, nous ne verrons bientôt plus d’emballages aux abords de nos routes.

Vos projets pour ce nouveau mandat ?D’abord encourager et accompagner le mouvement associatif local pour qu’il puisse encadrer les jeunes et réaliser des activités culturels et sportives pérennes, améliorer l’aménagement urbain du chef-lieu et des villages, aménager les pistes agricoles pour permettre l’accès motorisé aux champs, tout faire pour attirer des investissements créateurs de richesse, continuer à organiser des événements culturels et encourager toute initiative locale.

Pour conclure, que diriez-vous de la fonction de maire, après toutes ces années ?Je vous répondrai par un proverbe «La politique est le premier des arts et le dernier des métiers !». Le premier des arts, puisque à chaque élection mes concitoyens sont convaincus par mon programme et ma façon de gérer leur quotidien au point de voter pour moi, et le dernier des métiers, puisque c’est très dur d’assurer la tâche de maire dans une commune sans ressources, comme la mienne, tout en promettant à mes concitoyens de faire de mon mieux pour honorer mes engagements.Entretien réalisé par Ferhat Tizguine.

La Dépêche de Kabylie : Parlez-nous de lacommune de Boudjima ?Smaïl Boukherroub : La commune a été créée en 1957, puis elle fut rattachée à Ouaguenoun après l’indépendance. Elle redevint autonome en 1984, après un nouveau découpage administratif. Elle a 34 km² de superficie et sa population est estimée, d’après la dernière estimation en 2017, à 19 000 habitants. La commune de Boudjima est composée de 14 villages et quelques hameaux.

Quelles sont les ressources dont dispose la commune ?Notre commune est principalement à vocation agricole, notamment dans l’arboriculture et plus spécifiquement l’oléiculture, avec une production très satisfaisante en huile d’olive qui fait vivre des centaines de famille, quand les saisons sont bonnes. Nous avons aussi l’élevage hors champ, de vaches et chèvres laitières, de poulets, de dindes et un peu d’apiculture. A partir de 1962, l’agriculture a connu un recul très important, notamment en céréaliculture et dans l’élevage ovin. Mais heureusement, nous assistons ces toutes dernières années à une reprise sérieuse dans la culture du blé. Les gens reviennent à la consommation de la semoule du blé et de l’orge. Grâce à la collecte de lait, l’élevage de vaches laitières a également repris de plus belle et beaucoup de ménages améliorent ainsi leurs revenus. La majorité des propriétaires d’oliviers reprennent peu à peu l’entretien de leurs oliveraies et greffent de plus en plus d’oléastres. La production du miel enregistre elle aussi un regain sensible.

Pour ce qui estde l’industrie, votrecommune semble à la traîne…Je dirai même qu’elle est quasi inexistante, mise à part une unité de production d’engrais montée par un jeune ingénieur de la localité. Une zone d’activités a été créée en 1990, mais malheureusement elle n’a toujours pas été viabilisée, ce qui rend difficile d’attirer d’éventuels investisseurs. La SOGI, propriétaire des lieux, tarde à réaliser les aménagements nécessaires. Cette situation pénalise notre collectivité qui dépend toujours des subventions de l’Etat. Hormis l’abattoir communal et quelques locaux vétustes, notre commune ne dispose pas d’un patrimoine générateur de revenus. Nous avons un taux de chômage effarant au sein de notre jeunesse qui ne demande qu’à travailler. Je demande, en tant que maire, un plan ORSEC pour Boudjima et je plaiderai partout le sort de ma commune sinistrée économiquement, chiffres et preuves à l’appui. L’Etat doit sérieusement se pencher sur la commune de Boudjima.

Qu’en est-il du potentiel touristique de la commune ?Boudjima est une des régions les plus anciennement habitée en Afrique du nord, plusieurs sites historiques recèlent des gravures rupestres répertoriées à différents endroits, le plus connu étant Azru Imedyyazen. Ce site vient récemment d’être classé patrimoine national par l’Etat. Je profite donc de cette occasion pour interpeler les autorités concernées, afin qu’elles nous aident financièrement à promouvoir et protéger ce site, qui demain je l’espère fera l’objet d’un classement par l’UNESCO.

Quelle a été l’apportde Boudjima durantla guerre de libération ?Notre région a subi le pire. Pour exemple, le chahid Said Babouche, un chef de zone nommé par Krim Belkacem au déclenchement de la révolution, fut blessé, capturé, torturé, jugé et condamné à mort puis guillotiné le 8 avril 1957. Nous avons érigé une stèle à sa mémoire au carrefour de Boudjima, tout près du siège de la commune. Nous avons également des artistes célèbres, tels les chanteurs Arezki Oultache, Belkhir Mohand Akli, Amar Sersour et d’autres plus jeunes dont je ne peux citer tous les noms.

Votre bilan du mandat écoulé ?Nous avons substantiellement amélioré le taux de raccordement à l’AEP, l’électricité et le gaz naturel, qui a atteint 98% cette année. Nous nous félicitons du taux de raccordement au réseau d’assainissement de plus de 95% des habitations, ainsi que de la réalisation d’une bibliothèque, une crèche, de foyers de jeunes, des aires de jeux… Il y a aussi le raccordement des villages au réseau de la fibre optique pour Internet, l’ouverture de pistes agricoles partout où il n’y a pas d’opposition, la réhabilitation d’une retenue collinaire, l’ouverture de quatre cantines scolaires ainsi que des bibliothèques au niveau des écoles de la commune.

On a, par ailleurs, salué l’instauration du Salon du livre de Boudjima, qui concurrencerait même le Salon d’Alger. Comment l’idée vous en est-elle venue ?En fait, c’était en visitant un salon du livre organisé par plusieurs associations à Tigzirt. J’ai pris la décision de lancer le Salon du livre au niveau de notre toute nouvelle bibliothèque municipale en 2013. La première édition ayant connu un franc succès, nous avons pris l’engagement (le comité d’organisation s’entend) de tenir le rendez-vous chaque mois d’avril. Nous en sommes à la 5e édition qui a eu lieu les 19, 20 et 21 avril dernier. Ce qui est agréable à constater, c’est que notre salon a gagné en aura au point d’attirer des sponsors locaux et d’ailleurs. De simples citoyens, commerçants et entrepreneurs nous proposent des aides financières pour prendre en charge les frais d’organisation. Mais ce que nous déplorons, c’est de ne pas bénéficier de subventions au même titre que certaines Fêtes populaires. Pourquoi donc le Salon du livre de Boudjima, qui réunit des écrivains, poètes et artistes de différentes wilayas du pays, et même des écrivains de différentes nationalités, ne bénéficie-t-il pas d’une aide de l’Etat ? En tant que maire, j’en appelle à monsieur le ministre de la Culture. Nous avons des articles de la presse écrite, des reportages radiophonique et télévisuelle qui attestent de la formidable réussite et du taux de visiteurs impressionnant de notre salon du livre. Au demeurant, je tiens à cette occasion à remercier vivement nos partenaires, nos sponsors ainsi que les auteurs et éditeurs qui ont cru en notre salon de proximité. Quand je vois des familles remplir des sacs de livres, je me dis que finalement tout n’est pas perdu. Ce n’est pas rien de voir la commune sortir de l’anonymat grâce à ce salon du livre et ses belles nuits musicales. Deux événements culturels importants que j’essaye avec l’ensemble des élus municipaux d’encourager, mais l’Etat doit nous aider.

La commune souffredu problème des déchets ménagers. Que comptez-vous faire pour y remédier ? Le problème des déchets ménagers est commun à la quasi-totalité des communes riveraines de Boudjima. Nous souffrons de grandes difficultés dans le ramassage des ordures. Des oppositions ont freiné la réalisation de décharges contrôlées, ce qui a compliqué notre tâche. Nous espérons également que les citoyens se mettent au tri en amont, surtout que des récupérateurs de déchets, en tous genres, sillonnent nos villages chaque jour pour les ramasser. Maintenant que les déchets deviennent un enjeu économique, nous ne verrons bientôt plus d’emballages aux abords de nos routes.

Vos projets pour ce nouveau mandat ?D’abord encourager et accompagner le mouvement associatif local pour qu’il puisse encadrer les jeunes et réaliser des activités culturels et sportives pérennes, améliorer l’aménagement urbain du chef-lieu et des villages, aménager les pistes agricoles pour permettre l’accès motorisé aux champs, tout faire pour attirer des investissements créateurs de richesse, continuer à organiser des événements culturels et encourager toute initiative locale.

Pour conclure, que diriez-vous de la fonction de maire, après toutes ces années ?Je vous répondrai par un proverbe «La politique est le premier des arts et le dernier des métiers !». Le premier des arts, puisque à chaque élection mes concitoyens sont convaincus par mon programme et ma façon de gérer leur quotidien au point de voter pour moi, et le dernier des métiers, puisque c’est très dur d’assurer la tâche de maire dans une commune sans ressources, comme la mienne, tout en promettant à mes concitoyens de faire de mon mieux pour honorer mes engagements.Entretien réalisé par Ferhat Tizguine.

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