Immersion dans le tourisme et voyage dans la mémoire

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L’opération effectuée récemment par la Gendarmerie nationale dans les villes de l’Est, dans le cadre de la lutte contre la criminalité et laquelle, nous a également permis de découvrir la face sereine de cette région du pays, aussi riche que variée. Elle recèle un trésor naturel et patrimonial inestimable.Notre voyage avait débuté à la gare centrale d’Alger dans la nuit du 5 avril dernier, où nous avons fait partie des 600 voyageurs du train Alger—Annaba. Un voyage qui s’est terminé pour nous dans la capitale des Hauts-Plateaux. C’est le lendemain de notre arrivée que nous découvrons cette région, marquée par un paysage des plus féeriques en ce milieu de printemps. Une verdure paradisiaque où paissaient des troupeaux de moutons dont la moitié est constituée d’agneaux en cette période des mises bas. Après les Hauts-Plateaux, ce sont les Aurès qui nous ouvrent leurs bras, une autre région avec une autre spécificité. Nous y avançons et la beauté du pays chaoui nous livre de plus en plus ses secrets. Si la première partie de la wilaya de Batna rime avec la spécificité des Hauts-Plateaux, l’autre partie constitue plutôt une porte sur le désert.

El Kantara, trait d’union entre deux régions et plusieurs ères Ainsi, et avant de quitter Aïn Touta, dernière localité de Batna, Les premiers palmiers apparaissent, ce qui nous indique que nous nous rapprochons de Biskra, capitale des Zibans. La chaleur se fait de plus en plus sentir. Nous arrivons aux frontières des deux wilayas où une escorte de gendarmes nous lâche, pour nous livrer à une autre. Nous atteignons El Kantara, première localité de la wilaya de Biskra. Après notre réception au siège de la brigade locale, une petite visite guidée nous permet de découvrir la localité.Le premier lieu visité est l’hôtel Bertrand, à l’abandon. Un hôtel que les Français ont abandonné en 1962, avec tout ce qu’il y a à l’intérieur. Aujourd’hui, il n’en reste que des murs dégradés. Le bâtiment est complètement désossé. En constatant notre présence, Hadja Mbarka vient à notre rencontre. Une femme d’une cinquantaine d’années. Elle nous raconte l’histoire de cet hôtel où son père et Abd el Madjid, un ami à lui, avaient travaillé avant l’Indépendance. “La France l’a laissé avec tout ce qu’il y a dedans, les autorités l’ont abandonné”, nous dit-elle.“On dit qu’il appartient à Abd El Madjid l’ami de ton père”, lui dit l’officier-gendarme. “Pas du tout. C’est une propriété publique”, lui rétorque-t-elle. Ce petit entretien, témoignage résume à lui seul, la problématique de la propriété dans ce bled. Un ancien bureau de poste fait face à l’ancien hôtel. “C’est l’image de cette poste qui a été gravée dans le premier timbre poste algérien après l’Indépendance”, nous affirme El Hadja Mbarka. Cette femme nous affirme qu’elle veut devenir chanteuse, n’ayant pas les moyens d’enregistrer une cassette, elle chante actuellement sur les ondes de la Radio locale. Aussi, El Hadja Mbarka nous révèle son éventuel prochain départ de cette localité, car la source de l’eau qui l’y maintient ne la sécurise plus, dans une région où la présence humaine rime avec source d’eau. Le puit se trouvant dans la cour de l’hôtel en ruines, qui l’approvisionne en eau a vu la “rawda” (instrument pour faire monter l’eau du puit), se faire voler. Donc, rien ne retient cette femme dans ce lieu.

Une histoire millénaire et un lieu qui attend sa réhabilitation Nous quittons l’hôtel pour nous rendre sur le pont qui traverse l’oued s’y trouvant. Un pont construit par l’armée de Napoléon III en 1844 dont une plaque témoigne et porte l’inscription.Une gravure où l’on peut lire : 1862 restavré par le génie militaire 1862Napoléon III EmperevrLe DVC De MalakoffMaréchal de FranceGouverneur général de l’AlgérieUne troisième marque consiste en la signature de Napoléon III. Sur l’un des murs qui portent le pont, la lettre “N”, est taillée dans la pierre.Le troisième lieu que nous avons visité à El Kantara était le village rouge qui est le noyau de la localité, nous dit-on.En pénétrant dans ce lieu, un étranger l’aurait cru inhabité, car il donne l’image d’un lieu abandonné. Mais l’odeur de la bouse de vache remplissant l’atmosphère prouve bien le contraire. Les constructions usées, de type sahraoui sont dépourvues du minimum de confort. Les murs en terre et pierres sont fragilisés par le temps. Les portes en bois vieilles et défaites, les toits, sont également supportés par des troncs d’arbres vieillots. Certains ont même gagné le sol. Ce village se trouve au cœur d’une oasis, de l’eau y coule et différents arbres avec quelques cultures font le décor de ces lieux. “La localité est très sollicitée pour le tournage de films ’’Carnaval fi Dechra’’ y a été tourné”, nous dit-on. En traversant les ruelles, nous n’avons croisé aucune âme qui leur donnerait un semblant de vie. Devant la porte d’une maison, nous reçoit finalement un homme. C’est le maire de la localité se trouvant devant un petit musée.Nous y pénétrons. Un tableau en pierre nous accueille, où l’on peut lire : Musée LapidaireAdcal cœum herculisFondateur Gaston de Vul Pillieres qui y vécut et y consacrera totalement les 25 dernières années de sa vie21 octobre 1934

Le village rouge a été fondé en 1048 avec l’arrivée des musulmans pour ouvrir le Maghreb à l’Islam.Mais les pièces archéologiques qu’abrite le musée, et qui remontent à l’époque romaine, renseignent sur l’histoire millénaire de cette localité. “Beaucoup de pièces archéologiques ont été subtilisées, notamment à l’époque coloniale”, nous dit le premier responsable de la commune. Dans le village se trouvait un saint, connu sous le nom de Cheikh El Hachani, qui y a vécu au 11e siècle également.Après la visite guidée, nous sommes invités à un déjeuner dans une palmeraie. Pour la gagner, il nous a fallu des dizaines de km de route. Sous une chaleur torride, il a fallu à chacun de nous se débarrasser d’un “excès” d’habits. Finalement, c’est à Laghrousse dans la daïra de Foughala que nous avons atterri. Sous de hauts palmiers et un soleil de plomb, un vieil autochtone nous fait part de la culture et de la tradition des gens des oasis. Quant au travail agricole, entre autres, la fécondation des fleurs de palmier, la manière de planter un palmier, etc. “Sous les palmiers, on peut planter ce qu’on veut”, nous dit cet individu. Des figuiers, des grenadiers, des abricotiers, etc. Tous ces arbres ont fleuri sous ces palmiers. A l’arrivée de la délégation de wilaya, à sa tête le wali, nous primes le déjeuner sous une chaleur torride et une sueur coulant à flots. Au menu, la célèbre chekhchoukha de Biskra, caractérisée par une sauce concentrée et piquante, chose qui a ajouté à la chaleur déjà étouffante. Après le déjeuner, nous regagnons la ville de Biskra, et en nous en approchant, le sable se mêlait de plus en plus à la composante de la terre, chose qui caractérise la région et lui donne son charme.

Naima B.

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