En effet, l’ex-Bougie accueillera quelque 2500 “pieds-noirs” au début du mois de mai prochain. Cette communauté bougiote “s’est fixée l’objectif de renouer avec sa ville d’origine et sera l’invitée de l’association France-Maghreb en collaboration avec le Conseil communal de Béjaïa”, selon une source qui requiert l’anonymat. L’initiative prise dans le cadre du traité d’amitié franco-algérien n’est pas un caprice à satisfaire ou une nostalgie d’immigrés. Bien au contraire, ces enfants de l‘Algérie et plus particulièrement ceux de l’ex-Bougie, viendront les valises pleines “de projets d’ordre économique, touristique et culturel”, selon notre interlocuteur. Ces Bougiotes de France, ou ces Français de Béjaïa, ville qui les a vus naître, grandir et passer les meilleurs moments de leur jeunesse, veulent montrer le pas aux investisseurs étrangers qui ne se bousculent pas dans la région pour le moment. D’ailleurs, ils font de ce rapprochement “un devoir moral pour aider leur ville natale à s’émanciper encore plus”, nous dira notre interlocuteur en signalant l’avantage de renouer avec cette communauté. “Surtout que, dira-t-il, ceux-là connaissent la ville parfaitement et ses potentialités, pour y avoir vécu”. En outre, on croit savoir que cette délégation sera conduite par M. Jacques Augarde, ancien ministre et dernier maire de l’ex-Bougie (de 1947 à 1962).Par ailleurs, et à Béjaïa, les promoteurs de cette initiative s’activent ces derniers temps à préparer cette visite et faire en sorte qu’elle soit des plus agréables. Parmi les tâches retenues, le relookage de la haute-ville qui se fait en ce moment et celui du cimetière chrétien, où chaque tombe abrite un parent ou un ami inhumé. Au menu de la rencontre des galas, des visites sur plusieurs sites et anciens quartiers de la ville ainsi que des rencontres avec la société civile et les chefs d’entreprise.Un moment fort et chaleureux sera, sans aucun doute, celui de la rencontre des anciens Kabyles de Bougie avec ces anciens Bougiotes français autour de souvenirs et autres anecdotes du passé. Et Dieu seul sait qu’il y en a eu. Les anciens de Bougie en parlent souvent et se rappellent encore de “Galoufa”, la charrette de la fourrière municipale, des invasions de sauterelles, des jours de grandes pières de la “petite Mecque”, des soirées d’été ou des bals à la place du 1er-Novembre (ex-Gueydon), des promenades en calèches du père Azoulay du marchand de pois chiches chauds à l’entrée du cinéma Caravano, des “Ftaïrs” du Tounsi et des sardines, fraîchement débarquées et grillées à même le port ou bien les parties de chasse au plateau des Chardonnerets ou du côté de la piste du Sanglier… Ce n’est que grâce à ces souvenirs que ces anciens de Bougie ont continué à vivre et à espérer. Certains en organisant, en France, des rencontres entre anciens, d’autres en éditant des livres ou des recueils de poésie. Espérons que cette rencontre sera celle des espoirs aussi bien pour les uns que pour les autres. Pardon ! Pour tous, puisqu’il s’agit d’enfants, comme dirait un pied-noir : “d’un même bled et d’une même houma”.
Yacine Boudraâ