Bouira est une wilaya à vocation agricole”. C’est du moins ce que clament à tue-tête les autorités locales et les pouvoirs publics, qui s’entêtent à vouloir faire de Bouira une wilaya à vocation notoirement agricole. Projet qui semble difficilement s’imposer malgré les efforts des services de la DSA et les aides conséquentes du FNRDA. Les statistiques de la wilaya concernant les superficies irriguées et non irriguées rappelent, si besoin est, l’immensité du territoire et les capacités agricoles que cette dernière recèle. Cependant, malgré les expertises stochastiques et autres rapports de l’APW faisant valoir les caractéristiques agricoles, Bouira demeure confinée dans cette “réalité fictive” imposée par la force des choses, ou plutôt par l’administration. Comment expliquer sinon, le peu d’engouement des services publics à redorer le blason de la wilaya dans ce domaine. On se souvient que dans un passé pas si lointain, une fête de l’olive était organisée chaque année dans la daïra de M’chedallah. Une manifestation qui prouvait que l’agriculture existait, du moins concernant l’oléiculture. Mais depuis l’avènement du Printemps noir, l’olive n’est plus célébrée. Pourtant Bouira, ce n’est pas seulement l’olive, c’est aussi la céréaliculture, mais de cette activité, aucune trace en dehors des bureaux de la DSA. Idem pour les figues, les délicieux raisins de table, les cerises et autres fruits qui sont savamment cultivés par des paysans confrontés au statut agricole de la wilaya. Ces produits du terroir, certains hauts responsables les apprécient particulièrement et ils en savent quelque chose, puisqu’ils y goûtent régulièrement au fil des saisons. Des cadeaux agricoles en quelque sorte. “Aigricole” aurait-on tendance à penser, tellement le marasme prévaut dans un secteur aussi négligé mais néanmoins productif, à condition que les services concernés se concertent et se mobilisent. Plusieurs carences apparaissent en effet, notamment dans les terres dites à vocation agricole, et il est inadmissible pour certains paysans que des hectares de terre cultivable soient ainsi laissés à l’abandon. On peut constater sur les plaines fertiles d’El Esnam, la qualité des chardons qui y poussent. Et les exemples de terre en jachère ne manquent pas à travers le territoire de la wilaya, aussi bien à l’Est qu’à l’Ouest et du Nord au Sud, on peut se rendre compte que les statistiques de la wilaya sont en deçà de la réalité, voire carrément faussées. Même si les services de l’agriculture organisent régulièrement des journées de sensibilisation et d’information pour les agriculteurs, certains d’entre eux se laissent séduire par l’appât du gain facile. En louant ces terres fertiles à des businessmen, qui ne connaissent absolument rien en agriculture, les paysans véreux y trouvent doublement leurs comptes, en revendant à prix d’or les semences et les engrais acquis grâce aux aides de l’Etat, à la même personne qui loue le terrain. Des agriculteurs peu scrupuleux s’enrichissent sur le dos d’une agriculture subventionnée à coups de milliards par le FNDRA. De ces milliards, au mieux quelques millions suffiraient pourtant à revaloriser le secteur, en organisant des fêtes ou des kermesses agricoles pour encourager la production des produits agricoles propres à la wilaya. De l’ensemble des produits cultivés à travers le territoire de la wilaya, la pomme de terre s’est accaparée la part du lion, plus facile à produire. Le facteur temps joue en faveur des agriculteurs qui dévient ainsi la vocation céréalière, en causant un manque à gagner sur le marché national. Il faut savoir qu’en 2005 un excédent de 20%, soit près de 400000 tonnes de pommes de terre a été enregistré, alors que durant la même période, l’Algérie a importé pour plus de 700 millions de dollars de céréales. Et la pomme de terre n’a jamais connu de “salon” pour sa promotion à Bouira, de même que la pastèque ou encore le melon.Les manifestations culturelles agricoles ne pourraient qu’encourager davantage les producteurs à se distinguer parmi leurs pairs, et à bâtir une réputation solide à leurs récoltes. D’autant plus que si un prix leur était décerné pour les récompenser de leurs efforts continus, la production n’en serait que meilleure et la vocation agricole de la wilaya serait alors rétribuée à juste titre et à son juste mérite. A quand alors une AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) pour les produits issus de l’agriculture de Bouira ? Sûrement pas pour demain, et au rythme où vont les choses, les raisins, les pommes et l’orge auront tout le temps de fermenter à souhait, avant qu’une initiative de ce genre, ne soit appliquée par les autorités locales. Une réputation même agricole ne s’acquiert pas à coups de milliards, elle se mérite.
Hafidh B.
