L’appel que s’apprête à lancer le FLN à ses élus de Kabylie à abandonner leur mandat n’est ni consensuel ni à proprement parler, attendu.Avant le refus, c’est d’abord un sentiment de surprise qu’expriment les récipiendaires de ce « projet d’appel » qui sont, peu de gens s’en doutaient, 121 dans la seule wilaya de Bgayet si l’on fait abstraction de ceux qui, chemin faisant, ont décidé de virer de bord. « Nous sommes surpris pour la bonne et simple raison que tous les élus FLN de la wilaya de Béjaïa avaient tenu une AG au siège de la mouhafadha pas plus tard que la semaine dernière en présence de M. Abdelkader Bounekraf, membre du comité central, et nous avions décidé à l’unanimité qu’il n’était pas question de nous retirer », relève le vice-président de l’APC de Kherrata. « Il s’agit d’un revirement de dernière minute et le SG du parti nous a réellement surpris », conclut M. Salah Bouhedda.Quel développement nouveau a-t-il donc poussé Belkhadem à prendre une décision aussi peu conforme aux vœux de la base et très peu en rapport avec ses propres positions antérieures ?La revue du feuilleton de ses déclarations sur cette question confine à un mauvais vaudeville. Le SG de l’ex-parti unique avait, dès le début, engagé un chassé-croisé qui semblait viser à isoler Ouyahia dans une tête solitaire avec les archs. Il avait commencé par refuser un « retrait partisan » autrement dit une action limitée aux strictes contours de la coalition présidentielle et à lorgner, ce faisant, du côté d’une entente avec le FFS.Deuxième acte : Belkhadem dénie au chef du gouvernement la qualité de représentant de l’Etat. « C’est à l’Etat, dit-il, à travers le ministre de l’Intérieur de prendre ses responsabilités ». Troisième acte : en annonçant publiquement qu’un décret de dissolution va être pris par le président de la République, Belkhadem aura fini par dessaisir Ouyahia de la gestion du dossier des « indus élus ».Et avant-hier enfin, Belkhadem appelle désormais ses ouailles à s’exécuter alors qu’il avait chargé une semaine auparavant son lieutenant Bounekraf de susciter « démocratiquement » un refus de l’option de la dissolution. Une telle gymnastique dépasse on convient, l’aspect de la souplesse des diplomates pour s’apparenter plutôt aux mouvements des gymnastes spécialistes du trapèze du grand écart.Que s’est-il donc passé dans les arcanes de l’Etat qui a mis Belkhadem dans tous ses états ? Le dossier de la « révocation des indus élus » a indéniablement produit un intense marchandage entre le FLN de Belkhadem et le RND d’Ouyahia qui restent sur une vive querelle de préséance au sein de la coalition. Prenant de plus en plus goût à son statut de porte-parole officieux du Président, c’est sans doute, précisément dans ses toutes dernières déclarations qu’il faut rechercher les raisons de cet énième tropisme de Belkhadem. Il avait notamment une première dans la bouche d’un officiel, confirmé l’imminence d’un réaménagement gouvernemental. Et c’est précisément de ce côté-là, dans la répartition des portefeuilles du futur exécutif qu’il faut guetter pour savoir si Belkhadem a réussi à transformer ses grands écarts en grand chelem.
Mohamed Bessa